Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 juin 2019, M. B... A..., représenté par la société d'avocats AARPI Themis, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Besançon du 9 avril 2019 ;
2°) d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre le 5 septembre 2016 pour un montant de 2 170,59 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est irrégulière dès lors qu'elle a été rendue malgré sa demande de délai sollicité à la suite du dépôt de mandat de son avocat ;
- le titre exécutoire est insuffisamment motivé ;
- il ne doit plus de loyers ; la commission de surendettement avait constaté, en 2010, un reliquat de loyer de 1 220,01 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 décembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public.
1. M. A..., conseiller d'administration scolaire et universitaire, a bénéficié d'un logement de fonction, lors de son affectation à l'établissement régional d'enseignement adapté (EREA) Alain Fournier à Besançon, à compter de 2001. En raison de difficultés financières, l'intéressé n'a pas réglé ses loyers au cours de la période d'août 2001 à septembre 2002. En dépit de plusieurs plans de surendettement et de procédures de recouvrement forcé, il n'a réglé que partiellement ses arriérés de loyers. Le 5 septembre 2016, l'agent comptable de l'EREA Alain Fournier lui a notifié un titre exécutoire pour un montant de 2 170,59 euros correspondant à des loyers et charges impayés respectivement pour la période de mai à septembre 2002 et de janvier à septembre de la même année. Le recours gracieux formé par l'intéressé contre ce titre exécutoire a été rejeté le 18 novembre 2016. Par une ordonnance du 6 mars 2019, dont M. A... fait appel, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande pour irrecevabilité manifeste sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Il résulte de l'instruction, notamment des pièces du dossier de première instance, que le tribunal administratif de Besançon a adressé au conseil de M. A... un courrier en date du 7 mars 2019 lui demandant, en application de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, de lui communiquer un mémoire récapitulatif, dans un délai d'un mois.
3. S'il résulte également de l'instruction que M. A... a lui-même produit un mémoire récapitulatif, enregistré le 25 mars 2019 soit dans le délai imparti par le tribunal, il a, ensuite, avant même l'expiration du délai d'un mois, sollicité, par un courrier du 23 mars 2019 enregistré au greffe le 26 mars suivant, une prorogation du délai pour lui permettre, compte tenu du dépôt de mandant par son conseil, de constituer un nouvel avocat, en indiquant ne pas savoir ce que signifiait " un mémoire récapitulatif " et avoir produit un mémoire dans le seul but d'éviter la " prescription ".
4. Le tribunal administratif de Besançon n'a toutefois pas pris en considération cette demande, et, après avoir constaté que le mémoire récapitulatif produit par M. A... ne comportait aucune conclusion ni moyen intelligible, a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable en vertu du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Ce faisant, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Besançon a méconnu le droit de M. A... à un recours effectif. Ce dernier est, dès lors, fondé à soutenir que l'ordonnance attaquée a été rendue au terme d'une procédure irrégulière.
5. Il y a lieu, par suite, d'annuler, pour ce motif, l'ordonnance attaquée et, par la voie de l'évocation, de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Besançon.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la régularité du titre exécutoire :
6. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ". Ces dispositions imposent à la personne publique qui émet un état exécutoire d'indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis.
7. En l'espèce, si le titre exécutoire mentionne pour la période de mai à septembre 2002, le montant mensuel du loyer de 320,14 euros, le nombre de mois (5) et le montant global des loyers impayés de 1 600,70 euros, il se borne, s'agissant des charges, à indiquer " charges 2002 : janvier à septembre " suivi de la somme de 746,27 euros, sans autre précision, puis un solde à régler de 2 170,59 euros alors que le total des loyers et charges s'élève à la somme de 2 346,97 euros. Ces seules mentions ne permettent pas de comprendre les modalités de calcul de la créance réclamée. Si d'autres titres exécutoires ont été notifiés à l'intéressé, seul l'un deux seulement concernait la période en litige et ne comportait pas plus de précisions sur les modalités d'établissement de la créance. Dès lors, le requérant est fondé à soutenir que le titre exécutoire émis à son encontre est illégal.
8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à demander l'annulation du titre exécutoire émis à son encontre le 5 septembre 2016 pour un montant de 2 170,59 euros.
Sur les frais liés aux instances :
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre des frais liés au litige.
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 1601609 du 6 mars 2019 rendue par le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Besançon est annulée.
Article 2 : Le titre exécutoire émis à l'encontre de M. A... est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus de la demande présentée devant le tribunal administratif de Besançon et des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société d'avocats AARPI Themis pour M. B... A... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
N° 19NC01783 2