Procédure devant la cour :
I.- Par une requête, enregistrée le 1er juillet 2020, sous le n° 20NC01411, le préfet de Meurthe-et-Moselle demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 12 juin 2020 ;
2°) de rejeter la demande de M. D....
Il soutient que :
- le refus de délivrer un titre de séjour à M. D... ne méconnait pas les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision en litige est motivée ;
- la décision contestée ayant été prise en réponse à une demande de M. D..., les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne s'appliquait pas ;
- la décision contestée a été signée par la secrétaire générale bénéficiant d'une délégation de signature régulière ;
- la décision contestée ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2020, M. D..., représenté par Me F..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
II.- Par une requête, enregistrée le 1er juillet 2020, sous le n° 20NC01414, le préfet de Meurthe-et-Moselle demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nancy du 12 juin 2020.
Il reprend les mêmes moyens que ceux invoqués dans la requête n° 20NC01411.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2020, M. D..., représenté par Me F..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 août 2020.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les observations de M. E... pour le préfet de Meurthe-et-Moselle.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant macédonien, né en 1973, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, en 2017, accompagné de son épouse et de leurs deux enfants mineurs. M. D... a sollicité, le 2 novembre 2018, un titre de séjour en se prévalant de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 3 avril 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité. Par un jugement du 12 juin 2020, dont le préfet de Meurthe-et-Moselle fait appel, le tribunal administratif de Nancy a annulé cette décision et a enjoint au préfet de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale".
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. D... est arrivé en France en 2017, avec son épouse et leurs deux enfants mineurs. A la date de la décision en litige, sa compagne, qui souffre de la maladie de Crohn iléo-colique, associée à la maladie de Verneuil, et d'une schizophrénie dysthymique, bénéficiait de soins dispensés par le centre psychothérapique de Nancy et, compte tenu de l'impossibilité pour elle de suivre un traitement adapté à son état dans son pays d'origine, le préfet de Meurthe-et-Moselle lui avait délivré un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable jusqu'au 5 juin 2019, et qui a, par ailleurs, ainsi que le fait valoir sans être contredit le requérant, été renouvelé jusqu'en 2021. Il résulte, en outre, d'un certificat médical du 6 juin 2019, que son épouse, totalement dépendante, a besoin de la présence de M. D... à ses côtés. S'il est vrai que son épouse n'avait aucun droit acquis au renouvellement de son titre de séjour qui devait expirer deux mois après la décision de refus opposée au requérant, il résulte notamment d'un certificat médical du 5 juillet 2019, qui, bien que postérieur à la décision en litige, établit une situation de fait existant à la date de son édiction, que le retour de Mme D... en Macédoine, à l'expiration de son titre de séjour, était très hypothétique, eu égard à l'intervention chirurgicale préconisée par ses médecins ainsi qu'à la nécessité d'être suivie médicalement à vie. Enfin, il ressort des pièces du dossier que M. D... a repris, à concurrence de 20 heures hebdomadaire, une activité au sein d'une association en qualité d'agent d'entretien du patrimoine. Par suite, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce et nonobstant la faible durée du séjour de l'intéressé en France et de l'existence d'attaches dans son pays d'origine, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a retenu, pour annuler sa décision de refus de titre de séjour, le moyen tiré de ce qu'elle portait au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise.
4. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé sa décision du 3 avril 2019 et lui a enjoint de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale".
Sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement attaqué :
5. Le présent arrêt statue sur les conclusions du préfet de Meurthe-et-Moselle tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nancy du 12 juin 2020. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 20NC01414 par lesquelles le préfet de MeurtheetMoselle demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.
Sur les frais d'instance :
6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que le requérant demande au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 dans chacune des instances.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 20NC01414 du préfet de Meurthe-et-Moselle à fin de sursis à exécution du jugement du 12 juin 2020.
Article 2 : La requête n° 20NC01411 du préfet de Meurthe-et-Moselle est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me F... pour M. B... D... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de Meurthe-et-Moselle.
N° 20NC01411 et 20NC01414 4