Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2020, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 19 mars 2020 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 28 juin 2018 du préfet de Meurthe-et-Moselle ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux semaines sous astreinte de 155 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a commis une erreur d'appréciation de l'étendue du litige dont il était saisi en se fondant sur le motif relatif à son état de santé alors qu'elle n'a présenté aucune demande sur ce fondement ;
- la décision attaquée méconnaît les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 février 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller, et les observations de Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante algérienne née le 2 juillet 1972, est entrée irrégulièrement en France le 25 janvier 2010. Elle a fait l'objet de deux arrêtés portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire respectivement les 23 juillet 2010 et 30 mars 2012. Le 5 avril 2017, elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. A la suite du rejet implicite de sa demande, Mme D... a sollicité la communication des motifs de cette décision par lettre du 15 mai 2017. Par décision du 28 juin 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a expressément refusé la délivrance d'un titre de séjour. Mme D... fait appel du jugement du 19 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement :
2. Le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient commis " une erreur d'appréciation du périmètre du contentieux dont ils étaient saisis ", qui relève du bien-fondé du jugement, est sans incidence sur sa régularité.
[AS1]
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. Mme D... se prévaut de son entrée en France en 2009 et de son concubinage depuis 2011 avec un ressortissant de nationalité française. Il ressort cependant des pièces du dossier que Mme D... serait entrée en France le 25 janvier 2010 et s'y est maintenue en situation irrégulière, en dépit de deux mesures d'éloignement prononcées en 2010 et 2012. En outre, elle ne justifie pas d'une résidence ininterrompue depuis cette date dès lors qu'elle ne produit aucun justificatif de preuve d'une résidence en France au titre des années 2013, 2014 et 2015. Enfin, à la date à laquelle la décision attaquée a été prise, Mme D... ne justifiait d'une vie commune avec son concubin que depuis 2016, soit de moins de deux ans, et n'établissait pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine. Dans ces circonstances, eu égard notamment au caractère récent de son concubinage et des conditions de son séjour en France, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été adoptée. Les moyens tirés de la violation du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent par suite être écartés.
5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
[AS1]Moyen à la noix... requête indigente devant le TA avec moyen unique article 8 CEDH et 6-5 accord franco algérien et citation de diverses circonstances dont état de santé (dans le mémoire en réplique de juin 2019...). Du coup le TA, en répondant au seul moyen invoqué a répondu à chaque argument.
Il n'y a donc pas " d'erreur d'appréciation du périmètre du contentieux qui lui était soumis "... difficile à requalifier mais pas d'erreur
Je pense plutôt qu'il faut répondre que le moyen tiré de que le tribunal aurait commis " une erreur d'appréciation du périmètre du contentieux dont il était saisi " n'est pas relatif à la régularité du jugement mais à son bien-fondé.
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N° 20NC01417