Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 novembre 2019, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 3 juin 2019 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 mai 2019 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et lui a interdit de retourner en France pendant 28 mois ;
3°) d'annuler l'arrêté du 24 mai 2019 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence ;
4°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de réexaminer sa situation et de lui délivrer, pendant l'instruction de sa demande, une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de retirer son signalement aux fins de non-admission dans le système Schengen (DIS) ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le droit à être entendu, principe général du droit de l'Union européenne, a été méconnu ;
- la motivation lapidaire de la décision portant obligation de quitter le territoire français révèle le défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant à tort en situation de compétence liée pour prononcer une mesure d'éloignement à son encontre ;
- la décision portant refus de départ volontaire est illégale, en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation, d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai ;
- elle n'est pas motivée en fait ;
- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée pour fixer le pays de renvoi ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité des décisions précédentes ;
- elle est insuffisamment motivée dans son principe et sa durée ;
- elle est entachée d'erreur de fait, d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mai 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les membres de la famille de M. B... sont en situation irrégulière en France, l'un de ses fils étant d'ailleurs déjà retourné en Albanie, le 15 décembre 2018 ;
- les autres moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C..., présidente assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant albanais né le 7 janvier 1968, est entré en France le 15 mars 2017, accompagné de son épouse et de deux de ses enfants. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 17 juillet 2017 de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par une décision du 30 janvier 2018 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Sa demande de réexamen de sa demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA, le 10 juillet 2018, décision confirmée par la CNDA le 5 février 2019. Un arrêté portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination lui a été notifié le 23 février 2018. M. B... s'est cependant maintenu sur le territoire français. Il a été interpellé en situation irrégulière le 23 mai 2019. Par un arrêté du 24 mai 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle a obligé M. B... à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et lui a interdit de retourner en France pendant une durée de 28 mois. Par un arrêté du même jour, il l'a assigné à résidence. Par un jugement du 3 juin 2019, dont M. B... relève appel, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 24 mai 2019.
Sur le moyen commun soulevé à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour en France :
2. Aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / 2. Cette droite comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ". Le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français ou sur la décision le plaçant en rétention dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement.
3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de son interpellation, le 23 mai 2019, M. B... a été auditionné par les services de police, le 24 mai 2019, sur la régularité de son séjour en France. Il a alors été en mesure de présenter ses observations sur la perspective d'un retour en Albanie et a précisé qu'il désirait rester en France avec son épouse et ses enfants tout en relevant qu'il souhaitait que son fils A..., éloigné à destination de l'Albanie le 15 décembre 2018, puisse revenir en France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu garanti par le paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui manque en fait, doit être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".
5. En premier lieu, l'arrêté du 24 mai 2019 du préfet de Meurthe-et-Moselle rappelle les conditions d'entrée de M. B... en France. Il précise que ses demandes d'asile et de réexamen ont été rejetées et qu'il n'a pas exécuté une précédente décision portant obligation de quitter le territoire français. Il décrit la situation familiale de M. B... et en particulier la présence en France de son épouse et de leurs trois enfants, également en situation irrégulière. Il mentionne que son fils majeur, A..., a été éloigné à destination de l'Albanie, le 15 décembre 2018. Il énonce également qu'un retour en Albanie ne fait courir aucun risque à M. B... pour sa vie ou sa liberté. Par suite, il résulte des termes mêmes de la décision portant obligation de quitter le territoire français litigieuse, qui est suffisamment motivée, que le préfet de Meurthe-et-Moselle a procédé à un examen réel et sérieux de la situation de M. B... et en particulier de sa situation privée et familiale.
6. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit, le préfet de Meurthe-et-Moselle a examiné la situation privée et familiale de M. B... avant de prononcer une mesure d'éloignement à son encontre, sans s'estimer en situation de compétence liée pour édicter cette mesure. Le moyen d'erreur de droit doit, en conséquence, être écarté.
7. En dernier lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré récemment en France, le 15 mars 2017. Son épouse, dont la demande d'asile a été rejetée, est en situation irrégulière en France. L'un de ses fils majeurs, A..., entré en France quelques semaines avant ses parents, a fait l'objet d'une mesure d'éloignement à destination de l'Albanie, qui a été exécutée le 15 décembre 2018. Une obligation de quitter le territoire français a été édictée, le 18 juin 2019, à l'encontre de son autre fils majeur, Aleksander. Rien ne s'oppose à ce que son plus jeune fils, né le 9 avril 2000, suive ses parents en cas de retour en Albanie. De plus, une obligation de quitter le territoire français a également été édictée, le 16 décembre 2019, à l'encontre du frère et de la belle-soeur du requérant. Enfin, M. B... n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Albanie, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 49 ans et où son fils A... est retourné le 15 décembre 2018. Ainsi, en l'absence de situation régulière en France des membres de la famille de M. B... et en particulier de son épouse, la décision portant obligation de quitter le territoire français du 24 mai 2019 ne porte pas au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été édictée.
9. Il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par M. B... tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doivent être rejetées.
Sur la décision portant refus de délai de départ volontaire :
10. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français: (...) / 2° Si l'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était ou manifestement infondée ou frauduleuse ; / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) / h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français (...) ".
11. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré de son illégalité doit être écarté.
12. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté du 24 mai 2019 que le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé d'accorder un délai de départ volontaire à M. B... en se fondant sur le 2° et le d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après avoir rappelé que la demande d'asile de M. B... avait été rejetée et qu'il s'était soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de délai de départ volontaire doit être écarté.
13. En dernier lieu, ainsi qu'il a été dit, M. B... n'a pas été admis au séjour au titre de l'asile et n'a obtenu aucun titre de séjour. En outre, il n'a pas exécuté la décision portant obligation de quitter le territoire français du 23 mars 2018, qui doit être regardée comme lui ayant été régulièrement notifiée, alors même qu'il n'a pas réclamé le pli. Cette précédente mesure d'éloignement lui a d'ailleurs été rappelée lors d'une audition par les services de police, le 27 février 2019, sans qu'il n'y ait déféré avant d'être interpellé, le 23 mai suivant. Par ailleurs, lors de son audition du 24 mai 2019 par les services de police, M. B... a expressément indiqué ne pas souhaiter retourner en Albanie et a également déclaré vouloir que son fils, A..., éloigné à destination de l'Albanie, revienne en France. Le risque que M. B... se soustraie à l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français du 24 mai 2019 est, en conséquence, suffisamment établi. Par suite, le préfet de la Meurthe-et-Moselle pouvait, sans commettre d'erreur de droit, ni entacher sa décision d'erreur d'appréciation, refuser d'accorder un délai de départ volontaire à M. B....
14. Il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par M. B... tendant à l'annulation de la décision portant refus de délai de départ volontaire doivent être rejetées.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
15. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré de son illégalité doit être écarté.
16. En deuxième lieu, la décision fixant le pays de destination précise que M. B... n'allègue pas être exposé à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'elle vise. Elle est, en conséquence, suffisamment motivée en fait et en droit.
17. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour estimer que M. B... ne subirait aucun risque pour sa vie ou sa liberté en cas de retour en Albanie, le préfet de Meurthe-et-Moselle se soit uniquement fondé sur le rejet de sa demande d'asile et de sa demande de réexamen de celle-ci, sans prendre en compte la situation de M. B... à la date d'édiction de la décision litigieuse. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de Meurthe-et-Moselle s'est estimé, à tort, en situation de compétence liée, doit être écarté.
18. En quatrième lieu, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
19. La demande d'asile de M. B... a été rejetée ainsi que sa demande de réexamen. S'il produit un nouveau récit des persécutions subies dans son pays d'origine, il ne fait état d'aucun élément, autres que ceux déjà examinés par l'OFPRA et la CNDA, de nature à établir qu'il ferait l'objet d'un risque pour sa vie et sa liberté en cas de retour en Albanie. Il n'a, en particulier, pas fait état d'un tel risque lors de son audition du 24 mai 2019 par les services de police en se bornant à indiquer qu'il avait quitté l'Albanie suite à " un problème de vendetta ". Par suite, faute d'apporter des éléments de nature à démontrer la réalité des risques actuels et personnels qu'il allègue encourir en cas de retour dans son pays d'origine, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
20. En cinquième lieu, ainsi qu'il a été dit, l'épouse et les enfants de M. B... sont eux-mêmes en situation irrégulière en France et ont vocation à retourner en Albanie. M. B... ne fait état d'aucun obstacle au maintien de la cellule familiale qu'il compose avec son épouse et ses trois enfants, désormais majeurs. Par suite, la décision fixant le pays de renvoi ne méconnaît, en tout état de cause, pas le droit de M. B... à mener une vie privée et familiale normale.
21. En dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant n'est, en tout état de cause, pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.
Sur la décision portant interdiction de retour :
22. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III. _ L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
23. En premier lieu, en l'absence d'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant le pays de destination, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré de leur illégalité doit être écarté.
24. En deuxième lieu, d'une part, ainsi qu'il a été dit, le préfet de Meurthe-et-Moselle a édicté une décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire à l'encontre de M. B.... Cette décision devait nécessairement être assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français en application du premier alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, en rappelant qu'aucun délai de départ volontaire n'avait été accordé à M. B..., la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est suffisamment motivée dans son principe.
25. D'autre part, la décision litigieuse, qui rappelle que M. B... a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, qu'il a passé la majeure partie de sa vie hors de France, qu'il a des attaches familiales dans son pays d'origine et que la cellule familiale qu'il forme avec son épouse et ses trois enfants a vocation à s'y reconstituer, est suffisamment motivée quant à sa durée.
26. Par suite, le moyen d'insuffisance de motivation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être écarté.
27. En dernier lieu, d'une part, l'interdiction de retour édictée à l'encontre de M. B... n'a ni pour objet, ni pour effet de le séparer de son épouse et de ses fils, au demeurant majeurs, qui sont eux-mêmes en situation irrégulière en France. Par suite, elle ne porte pas au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été édictée.
28. D'autre part, pour fixer la durée de 28 mois de l'interdiction de retour litigieuse, le préfet a pris en compte l'entrée récente de M. B... en France en mars 2017, la circonstance qu'il a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement le 23 février 2018 qu'il n'a pas exécutée, la présence de l'un de ses fils en Albanie ainsi que l'absence de régularité du séjour en France des autres membres de sa famille et en particulier de son épouse. De plus, en l'absence de menace pour l'ordre public, le préfet n'avait pas à mentionner expressément ce point.
29. Par suite, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a entaché la décision portant interdiction de retour sur le territoire français, notamment quant à sa durée de 28 mois, ni d'erreur de fait, ni d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation.
30. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mai 2019 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et lui a interdit de retourner en France pendant une durée de 28 mois ainsi que de l'arrêté du même jour l'assignant à résidence. Ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, en conséquence, être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 19NC03199