Par une requête, enregistrée le 19 mars 2020, M. B..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 26 septembre 2019 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 mai 2019 par lequel préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il justifie de la régularité de son entrée en France en application du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- l'arrêté litigieux porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 91-294 DC du 25 juillet 1991;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C..., présidente, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 10 décembre 1978, est entré en France en février 2015 sous couvert d'un visa Schengen de court séjour. Il a épousé une ressortissante française, le 21 juillet 2018. Par un arrêté du 16 mai 2019, le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Par un jugement du 26 septembre 2019, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ".
3. L'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990, stipule que : " I- Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. / Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent (...) ".
4. L'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la déclaration obligatoire mentionnée à l'article 22 de la convention de Schengen est souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen. Selon l'article R. 211-33 du même code, la déclaration est souscrite auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale contre remise d'un récépissé. Sont toutefois dispensés de cette formalité, en vertu de l'article R. 212-6 du même code, les étrangers qui ne sont pas astreints à l'obligation de visa pour un séjour inférieur à trois mois et ceux qui sont titulaires d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, délivré par un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen. De plus, lorsqu'un étranger entre ou séjourne sur le territoire métropolitain sans souscrire à la formalité de déclaration s'il y est astreint, il peut, en vertu des dispositions de l'article L. 531-2 du même code, être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire ou dont il provient directement.
5. Il résulte de la décision n° 91-294 DC du 25 juillet 1991 du Conseil constitutionnel que la souscription de la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.
6. M. B..., titulaire d'un visa de court séjour Schengen délivré par l'Espagne d'une durée de trente jours, valable du 7 février au 6 mai 2015, déclare être entré régulièrement en France le 11 février 2015. Il produit à cet égard l'attestation de sa mère déclarant l'avoir hébergé du 11 février 2015 au 20 juillet 2018, une facture du 28 février 2015 et une ordonnance médicale du 2 avril 2015. Cependant, alors même qu'il serait entré en France dès le 11 février 2015 sous couvert d'un visa en cours de validité délivré par le consulat d'Espagne à Oran, et non le 11 février 2018 comme il l'a indiqué à tort dans sa demande de titre de séjour, il n'établit, ni même n'allègue avoir souscrit, au moment de son entrée en France, la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis, comme M. B..., à l'obligation de visa en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire tel que l'Espagne.
7. Par suite, en estimant que M. B... ne pouvait être regardé comme étant entré régulièrement en France en application des stipulations du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le préfet de la Moselle n'a pas entaché son arrêté d'erreur d'appréciation.
8. En second lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté litigieux, à laquelle sa légalité doit être appréciée, le mariage de M. B... et de Mme D..., le 21 juillet 2018, était récent. Alors même que M. B... fait valoir qu'il entretient une relation affective avec Mme D... depuis le mois de juillet 2017 et produit, à cet égard, une photo qui serait datée d'octobre 2017, seule une facture au nom de Mme D... et de M. B... pour la période d'avril à mai 2018 établit l'ancienneté de la relation entre M. B... et son épouse, laquelle était, en tout état de cause, récente à la date de l'arrêté litigieux. En outre, M. B..., entré en France le 11 février 2015, s'y est maintenu en situation irrégulière jusqu'à son mariage. M. B... ne justifie pas d'une insertion particulière en France par les attestations de bénévolat au sein de quelques associations et la promesse d'embauche du 20 août 2019, postérieure à l'arrêté litigieux, qu'il produit. Si sa mère et sa soeur sont titulaires d'un certificat de résidence et que son frère détenait, à la date de l'arrêté litigieux, un récépissé de demande de titre de séjour, M. B... n'établit pas être dépourvu de toute attache privée ou familiale en Algérie, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans. Enfin, l'arrêté litigieux ne fait pas obstacle à ce que M. B... sollicite un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, une fois de retour dans son pays d'origine.
10. Par suite, l'arrêté contesté ne porte pas au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été édicté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 mai 2019 du préfet de la Moselle. Les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, en conséquence, être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Moselle.
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N° 20NC00735