Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 mai et 30 octobre 2020, le département des Ardennes, représenté par Me C..., demande à la cour, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, de prononcer le sursis à exécution du jugement du 12 mars 2020 et de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens qu'il soulève contre le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué, ainsi que le rejet des conclusions à fin d'annulation et d'injonction accueillies par ce jugement, de sorte que les conditions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont réunies ;
- le jugement attaqué est entaché d'un défaut de motivation, dès lors qu'il n'a pas statué sur l'ensemble des moyens soulevés par M. B... ;
- les premiers juges ont commis une erreur de droit, dès lors que les dispositions de l'article R. 121-11 du code rural et de la pêche maritime n'imposent pas à la commission départementale de l'aménagement foncier (CDAF) d'apporter en temps utile au propriétaire de terres comprises dans le périmètre des opérations et dont les attributions sont susceptibles d'être modifiées, les informations de nature à le mettre à même de formuler d'éventuelles observations quant à la modification envisagée ;
- les moyens de première instance étaient infondés et notamment ceux tirés de la méconnaissance des articles R. 121-12, L. 123-1 et L. 121-3 du code rural et de la pêche maritime.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2020, M. B..., représenté par la Selas Devarenne associés Grand Est, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du département des Ardennes la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- aucun des moyens soulevés par le département des Ardennes ne justifie l'annulation du jugement du 12 mars 2020 ;
- les autres moyens de légalité soulevés à l'encontre de la décision litigieuse de la CDAF du 5 juillet 2018 ne sont pas de nature à confirmer l'annulation de cette décision ;
- le jugement attaqué est motivé en droit et en fait, conformément aux prescriptions de l'article L. 9 du code de justice administrative ;
- le tribunal n'était pas tenu d'examiner l'ensemble des moyens de la requête dès lors qu'il ne l'a pas rejetée ;
- c'est à bon droit que le tribunal a considéré que la décision de la CDAF du 5 juillet 2018 est intervenue irrégulièrement, dès lors qu'il n'a pas été préalablement informé de la réclamation des époux A..., alors même qu'à la suite de celle-ci, la parcelle AB n° 125 qui lui avait été précédemment attribuée par la décision de la commission communale a été amputée dans sa largeur et qu'il a été privé de son chemin d'accès au profit des époux A... ;
- le département ne met pas la cour en mesure de vérifier si plus de la moitié des membres de la CDAF ont participé à l'ensemble des séances d'instruction et à la séance du 5 juillet 2018 ;
- la décision de la CDAF méconnait l'article L. 123-1 du code rural et de la pêche maritime, dès lors que ses parcelles d'attribution sont enclavées ;
- la décision de la CDAF méconnait l'article L. 123-3 du code rural et de la pêche maritime, dès lors qu'elle le prive d'une partie de parcelle constructible ;
- cette décision est entachée d'un détournement de procédure, dès lors qu'elle tend à satisfaire un intérêt privé visant à agrandir le terrain à bâtir autour de la maison d'habitation des époux A..., sans aucune considération au regard des objectifs relevant de l'aménagement foncier.
Vu :
- la requête n° 20NC01113 enregistrée le 14 mai 2020 par laquelle le département des Ardennes a demandé l'annulation du jugement n° 1801939 du 12 mars 2020 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller,
- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,
- les observations de Me E..., représentant le département des Ardennes,
- et les observations de Me I..., représentant le M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est le propriétaire de parcelles comprises dans le périmètre des opérations d'aménagement foncier agricole et forestier des communes d'Evigny, de La Francheville, de Mondigny, de Prix-les-Mézières, de Warcq et de Warnecourt. Par un jugement du 12 mars 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de M. B..., la décision de la commission départementale d'aménagement foncier des Ardennes du 5 juillet 2018 en tant qu'elle a admis la réclamation des époux A... et a modifié ses attributions. Le département des Ardennes relève appel de ce jugement et demande, par la présente requête, qu'il soit sursis à son exécution.
2. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ".
3. En l'état de l'instruction, aucun des moyens soulevés par le département des Ardennes, tirés de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué et de ce que les premiers juges auraient commis une erreur de droit dans l'application de l'article R. 121-11 du code rural et de la pêche maritime, ne paraît sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 12 mars 2020, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. Dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement présentées pour le département des Ardennes doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le département des Ardennes demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En outre, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département des Ardennes la somme demandée par M. B... sur le fondement des mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du département des Ardennes est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. B... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département des Ardennes, à M. F... B... et à M. et Mme H... A....
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N° 20NC01114