Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 20NC02360, le 14 août 2020, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 8 juillet 2020 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 7 février 2020 du préfet du Doubs ;
3°) d'enjoindre au préfet du Doubs, à titre principal de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, et dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous une astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en appel et en première instance sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
en ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en écartant les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué est entaché d'erreurs matérielles et que le préfet n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 6°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 6°) de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
en ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2021, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. A... B... n'est fondé.
M. A... B... a présenté des pièces nouvelles, enregistrées le 12 février 2021, qui n'ont pas été communiquées.
II. Par une requête, enregistrée sous le n°20NC02361, le 14 août 2020, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Besançon du 8 juillet 2020 ;
2°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente de l'arrêt au fond, dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
3°) de dire que la décision sera exécutoire dès qu'elle aura été rendue ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a présenté à l'appui de sa requête au fond des moyens sérieux de nature à entrainer l'annulation du jugement ;
- l'exécution de la décision risque d'entrainer des conséquences difficilement réparables ;
en ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en écartant les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué est entaché d'erreurs matérielles et que le préfet n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 6°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 6°) de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
en ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2021, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. A... B... n'est fondé.
M. A... B... a présenté des pièces nouvelles, enregistrées le 12 février 2021, qui n'ont pas été communiquées.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant tunisien né en 1983, entré en France, selon ses déclarations, en 2009, a présenté, le 7 juin 2018, une demande de titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 février 2020, le préfet du Doubs a rejeté cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par deux requêtes, enregistrées respectivement sous les n° 20NC02360 et 20NC02361, qu'il y a lieu de joindre, M. A... B... fait appel du jugement du 8 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté et demande qu'il soit sursis à son exécution.
Sur la requête 20NC02360 :
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :
2. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B..., entré en France en 2009, a épousé une ressortissante de nationalité française le 21 octobre 2017 avec laquelle il avait déjà noué une relation qui s'est cependant interrompue en 2014. Il a reconnu, le 25 octobre 2017, le fils de son épouse, né le 24 avril 2004 dont il s'occupe. Il est en outre père d'un enfant, né le 5 septembre 2014, de sa relation avec une ressortissante libyenne, dont il est séparé, et qui est placé à l'aide sociale à l'enfance depuis le 20 juillet 2017. Il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de cet enfant conformément au jugement en assistance éducative du 25 juillet 2018, qui en définit les modalités. Enfin, deux de ses frères sont titulaires de titre de séjour en France et un autre est titulaire de la nationalité française. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à l'intensité des liens familiaux dont M. A... B... dispose en France et alors même qu'il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de vingt-six ans, l'arrêté contesté doit être regardé comme ayant porté au droit de M. A... B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, M. A... B... est fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à en demander, pour ce motif, l'annulation.
4. Les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi doivent, par voie de conséquence, être annulées.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande d'annulation des décisions de refus de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
6. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance à M. A... B... d'une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Doubs, sous réserve d'un changement de circonstance de droit ou de fait, de délivrer ce titre à M. A... B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et dans cette attente, en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur la requête 20NC02361 :
7. Le présent arrêt statue sur les conclusions de M. A... B... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Besançon du 8 juillet 2020. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête susvisée par lesquelles le requérant demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.
Sur les frais liés aux instances :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à M. A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 20NC02361 de M. A... B... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 2000518 du 8 juillet 2020 du tribunal administratif de Besançon.
Article 2 : Le jugement n° 2000518 du tribunal administratif de Besançon du 8 juillet 2020 et l'arrêté du préfet du Doubs du 7 février 2020 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Doubs de délivrer à M. A... B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et dans cette attente, de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour.
Article 4 : L'Etat versera à M. A... B... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... B... est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
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N° 20NC02360, 20NC02361