Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 novembre 2017, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg du 2 août 2017 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 6 juin 2017 pris à son encontre par le préfet du Haut-Rhin ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision quant à sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2017, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. A..., ressortissant malien né le 15 mai 1999, a déclaré être entré irrégulièrement en France le 27 janvier 2016 ; qu'en raison de sa minorité, il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département du Haut-Rhin ; qu'il a déposé une demande tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié le 8 juin 2016, soit plus de 120 jours après son entrée en France mais n'a pas poursuivi la procédure de demande d'asile qu'il a initiée ; que, par un arrêté du 6 juin 2017, le préfet du Haut-Rhin a pris à son encontre, sur le fondement des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours assortie d'une décision fixant le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé ; que M. A...relève appel du jugement du 2 août 2017 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées du 6° du I de l'article L. 511-1 et des articles L. 743-2, L. 723-1 et L. 723-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité préfectorale peut prendre une décision portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger demandeur d'asile qui, sans motif légitime, n'a pas finalisé sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans les délais prescrits et qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français ;
3. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté du 20 septembre 2016 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 21 septembre 2016, le préfet du Haut-Rhin a donné délégation à M. Christophe Marx, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer la décision en litige ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée, après avoir notamment visé le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne les motifs de droit et de fait pour lesquels une obligation de quitter le territoire français a été prise à son encontre ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écartée ;
5. Considérant, en troisième lieu, que M. A...soutient que, mineur, il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département du Haut-Rhin et que s'il n'a pas donné suite à sa demande d'asile, c'est en raison de la signature, le 5 décembre 2016, d'un contrat d'apprentissage en vue de la préparation d'un certificat d'aptitude professionnelle de boulanger ; que contrairement à ce que fait valoir le requérant, il n'appartenait pas à l'administration préfectorale, même informée de sa prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance, de s'enquérir des motifs de l'abandon de sa demande d'asile ; qu'en tout état de cause, il n'est pas contesté qu'alors que le récépissé de demande d'asile a été remis à M. A... le 8 juin 2016, son contrat d'apprentissage n'a été conclu qu'au mois de décembre 2016 et qu'ainsi, le requérant aurait pu mener à son terme, avant même la signature de ce contrat, la procédure accélérée de demande d'asile qui avait été engagée ; qu'enfin, si M. A...justifie de son inscription dans un lycée professionnel jusqu'au 31 août 2018, de son assiduité dans ses études, d'appréciations encourageantes de ses professeurs ainsi que d'une réelle volonté de poursuivre sa formation et de s'intégrer, il ressort des pièces du dossier que M. A...n'est présent en France que depuis un an et quatre mois à la date de la décision en litige et qu'il n'établit pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré de ce que le préfet du Haut-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée quant à sa situation personnelle doit être écarté ;
6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant qu'ainsi qu'il a été précédemment dit, M. A...est entré très récemment sur le territoire français et n'établit pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine ; que, par suite, et alors même qu'il a poursuivi avec assiduité et sérieux ses études en vue de l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle de boulanger, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
9. Considérant que si M. A...soutient que le Mali présente des caractères d'insécurité importants, que les autorités françaises elles-mêmes prônent une extrême vigilance pour les ressortissants des pays tiers souhaitant voyager dans ce pays et qu'une attaque terroriste est encore survenue récemment dans ce pays, il n'établit pas le caractère réel, personnel et actuel des risques allégués ; que, dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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N°17NC02669