Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 novembre 2017, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 octobre 2017 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 5 septembre 2017 pris à son encontre par le préfet du Haut-Rhin ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- elle n'est pas justifiée dès lors qu'il est présent sur le territoire français depuis dix ans et qu'il dispose d'attaches familiales en France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2018, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 5 août 1968, a, en dernier lieu, sollicité le 2 mai 2017 la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 5 septembre 2017, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé et pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Alors qu'il avait déjà saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande d'annulation de cet arrêté, le préfet du Haut-Rhin a, par un arrêté du 26 septembre 2017, ordonné son assignation à résidence. Par jugement du 3 octobre 2017, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg, statuant, par suite, selon la procédure prévue au III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a rejeté la demande tendant à l'annulation des décisions du 5 septembre 2017 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant son pays de destination et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français. Il n'a pas statué sur les conclusions de la demande tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, celles-ci relevant d'une formation collégiale du tribunal. M. C...relève appel de ce jugement.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ".
3. Indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi prescrit ou qu'une convention internationale stipule que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'un éloignement.
4. Si M. C... soutient résider habituellement en France depuis 2002, il n'a produit pour en justifier au titre de l'année 2007, que deux cartes d'adhésion à des associations, une attestation établie en 2017 par sa soeur affirmant qu'elle l'héberge depuis le mois de mars 2000 ainsi que son passeport, qui ne comporte pas de mention d'une sortie du territoire français. Ces éléments ne suffisent toutefois pas à établir la réalité de sa présence habituelle en France au cours de l'année 2007 et M. C... ne peut ainsi justifier qu'il résidait en France depuis plus de dix ans à la date de la décision en litige. Dès lors, il ne remplissait pas, à cette date, les conditions d'attribution de plein droit du certificat de résidence prévues par les stipulations précitées du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait, pour ce motif, faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.
5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Ainsi qu'il a été dit au point 4, M. C... n'établit pas résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de la décision contestée. En outre, s'il soutient habiter chez sa soeur, de nationalité française, il ne ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué qu'il disposerait d'autre attache familiale en France où il ne justifie pas d'une insertion particulière. Il n'est pas davantage établi qu'il ne pourrait pas poursuivre une vie privée et familiale normale en Algérie où résident ses parents et huit membres de sa fratrie. Dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté.
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
7. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français " .
8. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a déjà fait l'objet de trois mesures d'éloignement décidées par des arrêtés des 16 octobre 2002, 25 janvier 2012 et 13 mai 2014. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il ne justifie pas, en outre, d'une insertion particulière sur le territoire français et il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents et huit membres de sa fratrie. Par suite, le préfet du Haut-Rhin n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées en lui faisant interdiction de retour pendant une durée de deux ans.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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N° 17NC02670