Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 août 2015, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 24 juillet 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 mars 2015 du préfet de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ou, à défaut, de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée ; elle n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et les dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité affectant la décision de refus de titre de séjour ;
- la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée ; elle n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ; le préfet s'est estimé lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2015, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bataille,
1. Considérant que M.C..., ressortissant arménien né le 13 mai 1974, relève appel du jugement du 24 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mars 2015 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;
3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant à l'appui de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant qu'à l'appui de sa demande de titre de séjour pour raisons médicales, M. C... a produit un certificat médical établi le 31 janvier 2014 par un médecin psychiatre indiquant qu'il " présente un syndrome dépressif avéré et important " avec un " aspect de stress post-traumatique " ; que, par un avis rendu le 15 mai 2014, le médecin de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a estimé que l'état de santé de M. C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, que le traitement approprié n'existait pas dans son pays d'origine et que les soins dont il faisait l'objet devaient être poursuivis pendant une durée d'un an ; que le préfet de la Loire-Atlantique, qui n'était pas lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, a toutefois refusé de délivrer le titre de séjour sollicité par M. C... au double motif qu'il n'était pas établi que le défaut de prise en charge médicale aurait, pour l'intéressé, des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement approprié existait en Arménie ;
6. Considérant que, pour justifier de l'existence d'un tel traitement, le préfet de la Loire-Atlantique a notamment produit en premier instance un courrier électronique du 10 avril 2012 émanant du médecin conseil de l'ambassade de France en Arménie, un document du service de l'immigration et des naturalisations du ministère de l'intérieur néerlandais rédigé en 2012, issu d'une base de données médicales financée par le Fonds européen pour les réfugiés et la " fiche pays " pour l'Arménie datée du 25 octobre 2006, établie par les services du ministère de l'intérieur ; qu'il résulte de ces documents, dont le requérant ne conteste pas utilement la teneur en se bornant à soutenir qu'ils sont trop anciens, que l'Arménie dispose des structures médicales et des médicaments permettant de soigner les troubles psychologiques et psychiatriques ; que les certificats médicaux établis les 31 janvier 2014 et 2 septembre 2014 par le docteur Barbier, psychiatre, indiquant, sans autre précision, qu'il n'y a pas de soins adaptés en Arménie, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet quant à l'existence d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ; que, contrairement à ce qu'il soutient, les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction en vigueur n'impliquent aucune appréciation quant au caractère effectif de l'accès au traitement en raison de la situation particulière du demandeur ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions précitées du 11° de l 'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer un titre de séjour ;
7. Considérant, en second lieu, que le requérant se borne à reprendre en appel, sans plus de précisions ou de justifications, les moyens invoqués en première instance tirés de l'insuffisante motivation de la décision portant refus de titre de séjour, de l'absence d'examen de sa situation personnelle, de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu' il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant que la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas illégale, le requérant n'est pas fondé à exciper de son illégalité au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
9. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, les moyens tirés de ce que cette décision est insuffisamment motivée et de ce que le préfet se serait cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, que M. C...se borne à réitérer en appel sans apporter de précision nouvelle ;
10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. C... au regard des risques encourus en cas de retour en Arménie ;
11. Considérant, en troisième lieu, que M. C... soutient qu'il risque d'être exposé, à son retour en Arménie, à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, les pièces produites en première instance, constituées d'un examen médico-légal du 28 septembre 2012, indiquant seulement que les cicatrices de M. C... sont compatibles avec ses dires et des traductions d'attestations peu circonstanciées, ne permettent pas d'établir la réalité des menaces auxquelles il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur le surplus des conclusions :
13. Considérant que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Jouno, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 février 2016.
Le président rapporteur,
F. Bataille L'assesseur le plus ancien,
S. Aubert
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N 15NT026593