Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 août 2015, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 janvier 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Mayenne du 9 septembre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Mayenne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté est entaché d'incompétence ;
- contrairement à ce qu'ont estimé le médecin de l'agence régionale de santé et le préfet, le syndrome dépressif qu'il présente nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;
- l'existence d'un lien entre ce syndrome dépressif et les événements qu'il a subis dans son pays d'origine équivaut à l'absence de traitement approprié à son état de santé dans ce pays ;
- il ne pourra pas bénéficier dans son pays d'origine du traitement que les troubles psychiatriques qu'il présente nécessitent ;
- il excipe de l'illégalité du refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2016, le préfet de la Mayenne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la mention de l'absence de nécessité d'un traitement médical résulte d'une simple erreur de plume ; à défaut, il demande la substitution à ce motif du constat que l'état de santé de M. A...nécessite un traitement médical ;
- le moyen tiré de l'absence de traitement approprié dans le pays d'origine est inopérant, l'arrêté contesté n'étant pas fondé sur ce motif ;
- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 25 janvier 2016 par une ordonnance du 11 janvier 2016.
Un mémoire en production de pièces, présenté pour M.A..., enregistré le 18 février 2016, n'a pas été communiqué.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 juillet 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Aubert.
1. Considérant que M.A..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, relève appel du jugement du 30 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Mayenne du 9 septembre 2014 portant refus de titre de séjour en qualité d'étranger malade et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / (...) / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois " ;
3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant que, par un avis rendu le 29 août 2014, le médecin de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a estimé que l'état de santé de M. A...ne nécessitait pas une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'état de santé de l'intéressé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine ; que le préfet de la Mayenne, qui n'était pas lié par cet avis, a refusé de délivrer le titre de séjour demandé pour les mêmes motifs ;
6. Considérant, en premier lieu, que M. A...établit présenter un syndrome dépressif et un diabète pour lesquels il bénéficie d'un traitement médical et que la tuberculose traitée en 2013 a fait l'objet d'une surveillance régulière au cours de l'année 2014 ; qu'il suit de là que le préfet de la Mayenne ne pouvait pas se fonder notamment sur le fait que son état de santé ne nécessitait pas une prise en charge médicale pour refuser de lui délivrer un titre de séjour ; que, toutefois, le préfet soutient en appel qu'il ne se fonde plus sur ce motif ; que le moyen invoqué par M. A...doit dès lors être écarté comme inopérant ;
7. Considérant, en second lieu, que M. A...ne soutient pas ne pas pouvoir bénéficier en République Démocratique du Congo d'un traitement approprié au diabète qu'il présente et d'une surveillance régulière de la tuberculose soignée en France en 2013 mais seulement que, trouvant leur origine dans des événements auxquels il a été confronté dans ce pays, ses troubles psychiatriques ne pourront pas y être traités efficacement, qu'en tout état de cause, un tel traitement n'y est pas disponible et que l'absence de traitement de cette pathologie pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;
8. Considérant, d'une part, que les instances compétentes en matière d'asile ont estimé que les faits allégués d'emprisonnement ayant sanctionné son engagement politique n'étaient pas établis ; que, dans ces conditions, le syndrome dépressif que présente le requérant ne peut être regardé, ainsi qu'il le soutient, comme trouvant sa cause dans ces événements ; qu'il s'ensuit que M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'origine de sa pathologie l'empêche de bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en République Démocratique du Congo ;
9. Considérant, d'autre part, que si le préfet n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'existence d'un tel traitement dans ce pays, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de ce traitement est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
11. Considérant que, pour le surplus, M. A...se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément nouveau, les moyens invoqués en première instance tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté, de l'illégalité du refus de titre de séjour invoquée par voie d'exception au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de la méconnaissance par cette dernière décision de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de la contrariété de la décision fixant le pays de renvoi à l'article 3 de la même convention ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur le surplus des conclusions :
13. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Mayenne.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT02480 2
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