Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 août 2015, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 5 mars 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de réexaminer sa situation et de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivé ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie pour avis ;
- elle ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ;
- elle remplit les conditions requises pour bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour au titre du travail ;
- l'arrêté contesté méconnaît son droit au travail garanti par la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Constitution du 4 octobre 1958, l'article 6 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et l'article 1er de la charte sociale européenne ; les premiers juges ont estimé à tort qu'elle ne pouvait pas en invoquer la teneur ;
- en indiquant qu'elle n'a plus d'attaches dans son pays d'origine, le préfet a commis une erreur de fait ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2015, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il indique qu'en l'absence de moyens nouveaux, il s'en remet à ses écritures de première instance.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Aubert.
1. Considérant que MmeC..., ressortissante de la République Démocratique du Congo, relève appel du jugement du 25 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 5 mars 2015 portant refus de titre de séjour en qualité d'étranger malade et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. (...) " ;
3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant que, par un avis rendu le 18 novembre 2014, le médecin de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a estimé que l'état de santé de Mme C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas en République Démocratique du Congo de traitement approprié à cet état de santé ; que le préfet de la Loire-Atlantique, qui n'était pas lié par cet avis, a toutefois refusé de délivrer le titre de séjour demandé au motif de l'existence d'un traitement approprié dans ce pays ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des pièces produites par MmeC..., qu'elle souffre de troubles psychiatriques nécessitant un traitement médical ; que le préfet de la Loire-Atlantique a justifié en première instance de la possibilité pour la requérante de bénéficier de son traitement en produisant notamment la liste nationale des médicaments essentiels établie par le ministère de la santé publique de la République Démocratique du Congo, révisée en mars 2010, qui mentionne les psychotropes, les antidépresseurs et les sédatifs ; qu'en se bornant, d'une part, à soutenir qu'une fiche sanitaire établie en 2006, également produite par le préfet, fait état de l'insuffisance de l'offre de soins relative au traitement de la dépression et que l'offre de soins décrite serait limitée à la ville de Kinshasa et, d'autre part, à se prévaloir d'un certificat médical établi le 31 mars 2015 mentionnant un traitement contre la dépression et l'anxiété, Mme C...ne remet pas sérieusement en cause les éléments de preuve apportés en défense ; que ces éléments établissent de manière suffisante qu'elle pourra bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement médical adapté à son état de santé ; que les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction en vigueur n'impliquent aucune appréciation quant au caractère effectif de l'accès au traitement en raison de la situation particulière du demandeur ; que, dans ces conditions, le préfet a pu légalement s'écarter de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé et refuser de délivrer à la requérant un titre de séjour en qualité d'étranger malade ;
7. Considérant que n'ayant pas présenté une demande de titre de séjour mention " salarié ", la requérante n'est en tout état de cause pas fondée à soutenir que le refus de titre de séjour contesté a porté atteinte à son droit au travail garanti par la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948, la Constitution du 4 octobre 1958, l'article 6 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et l'article 1er de la charte sociale européenne signée à Strasbourg le 3 mai 1996 ;
8. Considérant qu'ainsi qu'il est dit au point 6 du présent arrêt, Mme C...pourra bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en République Démocratique du Congo ; que si elle soutient que son éloignement vers ce pays priverait d'efficacité ce traitement, les troubles psychologiques qu'elle présente ayant pour cause les événements dont elle a été victime dans ce pays, le lien de causalité entre ces événements, dont la réalité n'a pas été tenue pour établie par les instances qui ont examiné et rejeté sa demande d'asile, ne ressort pas des pièces du dossier ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, invoqué au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté ;
9. Considérant que, pour le surplus, Mme C...se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément nouveau, les moyens invoqués en première instance, tirés de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour, de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, de l'erreur de fait commise par le préfet dans la détermination de ses attaches familiales en République Démocratique du Congo et du respect des conditions d'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur le surplus des conclusions :
11. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT02489 6
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