Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 mars 2018 et 3 juillet 2018, le préfet de la Sarthe demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter les demandes de M.A....
Il soutient que :
- il ne ressort pas des termes de l'arrêté contesté qu'il a refusé d'exercer le pouvoir discrétionnaire de régularisation de la situation des étrangers dont il dispose ;
- la décision de refus de séjour est motivée ;
- il n'a commis aucune erreur de fait dans la mesure où M. A...est entré en France muni d'un visa de court séjour ;
- elle n'est pas entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il a examiné sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ;
- elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;
- il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires, enregistrés le 6 avril 2018 et le 8 août 2018, M.A..., représenté par Me Néraudau, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à la mise à la charge de l'Etat au bénéfice de Me Néraudau de la somme de 2 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'il est entré en France muni d'un visa de long séjour ;
- elle est entachée d'une erreur de droit en l'absence d'examen de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il remplit les conditions pour bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par une décision du 25 avril 2018, M. A...a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue ;
- les observations de Me Néraudau, représentant M.A....
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant algérien, a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2017 par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 14 février 2018, dont le préfet de la Sarthe relève appel, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 8 septembre 2017 du préfet de la Sarthe, enjoint à ce dernier de réexaminer la demande de titre de séjour de M. A...dans un délai de deux mois et mis à la charge de l'Etat, au bénéfice de Me Néraudau, avocat de M.A..., la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :
2. Les premiers juges ont prononcé l'annulation de l'arrêté du 8 septembre 2017 au motif qu'il ne ressortait pas des termes de cet arrêté, qui refuse la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, que le préfet de la Sarthe a recherché l'existence de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires susceptibles de fonder une mesure de régularisation et que l'autorité administrative a, de ce fait, commis une erreur de droit en ne faisant pas application de son pouvoir de régularisation.
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A...a sollicité, par courrier du 22 avril 2016, le bénéfice d'un titre de séjour en faisant valoir sa durée de présence en France, son activité au sein de la communauté Emmaüs du Mans, sa maîtrise de la langue française, sa bonne intégration et son souhait de rester en France. Ce faisant, il a, ainsi que l'a lui-même mentionné le préfet de la Sarthe dans la décision contestée, sollicité sa régularisation par admission exceptionnelle au séjour. Dès lors, en se bornant à rejeter la demande de titre de séjour au motif que M. A...ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en application de l'article 6 alinéa 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et que cette décision ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, le préfet de la Sarthe n'a pas examiné la demande sur le fondement dont il était saisi, à savoir son pouvoir de régularisation qui lui permet, au regard de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, de délivrer un titre de séjour à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'un titre de séjour de plein droit. Par conséquent, le préfet de la Sarthe a entaché sa décision d'erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Sarthe n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à la demande de M.A....
Sur les frais liés au litige :
5. M. A...a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me Néraudau dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de la Sarthe est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Me Néraudau la somme de 1 000 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à Me Néraudau et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique le 13 décembre 2018.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No 18NT01020