Vu la procédure devant la cour :
Par un recours et des mémoires enregistrés les 26 juin 2014, 3 mars et 18 mai 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 mai 2014 ;
2°) de remettre à la charge de M. et Mme A...la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.
Il soutient que :
- le tribunal a estimé à tort que M. et Mme A... n'avaient pas à vérifier que l'appartement loué dans le cadre du dispositif résultant de la loi Malraux constituait bien la résidence principale du locataire ;
- la proposition de rectification est suffisamment motivée ;
- l'administration n'est pas tenue de communiquer les documents sur lesquels les redressements sont fondés lorsqu'elle les détient et ne les a pas obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication ;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 20 novembre 2014 et 30 mars 2015, M. et MmeA..., représentés par MeB..., concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 modifiée ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert,
- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.
1. Considérant que le ministre des finances et des comptes publics relève appel du jugement du 7 mai 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a fait droit à la demande de M. et Mme A...tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 résultant de la remise en cause des déficits fonciers déduits, en application du 3° de l'article 156-I du code général des impôts, des revenus déclarés en 2007 et en 2008 ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal (...) sous déduction : I. Du déficit pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent de déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation (...) 3° Des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes (...) Il en est de même, lorsque les travaux de restauration ont été déclarés d'utilité publique en application de l'article L. 313-4-1 du code de l'urbanisme, des déficits provenant des mêmes dépenses effectuées sur un immeuble situé dans un secteur sauvegardé, dès sa création dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 du même code, ou dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager créée en application de l'article 70 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 modifiée relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat. Les propriétaires prennent l'engagement de les louer nus, à usage de résidence principale du locataire, pendant une durée de six ans. La location doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d'achèvement des travaux de restauration. Le revenu global de l'année au cours de laquelle l'engagement ou les conditions de location ne sont pas respectées est majoré du montant des déficits indûment imputés (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le bénéfice de l'avantage fiscal qu'elles prévoient est subordonné à la condition que le locataire fasse effectivement de l'immeuble qui lui est loué par le contribuable son habitation principale ;
3. Considérant que M. et Mme A...ont acquis le 17 décembre 2007 un appartement et une cave situés dans un immeuble restauré d'un secteur sauvegardé de Saumur (Maine-et-Loire) et les ont donnés en location dans le cadre d'un bail d'habitation soumis aux dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ; que pour remettre en cause les déductions de déficits fonciers effectuées par M. et Mme A... en 2007 et 2008, s'élevant respectivement à 27 105 euros et à 25 580 euros, le service s'est fondé sur le non-respect de l'engagement de location de l'appartement pour un usage de résidence principale, sa locataire ayant maintenu sa résidence principale à La Varenne-Saint-Hilaire (Val-de-Marne) ; que M. et Mme A... n'apportent aucun élément de nature à établir que, contrairement à ce qui ressort des mentions portées sur les déclarations de revenus de leur locataire établies dans le Val-de-Marne, en 2009, 2010 et 2011 et produites en défense par le ministre, la résidence principale de leur locataire ne se situait plus à La Varenne-Saint-Hilaire mais à Saumur ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur la circonstance que M. et Mme A...ne disposaient pas d'éléments leur permettant de déterminer si l'immeuble loué était effectivement utilisé ou non à usage d'habitation principale par la locataire pour prononcer la décharge de l'imposition contestée ;
5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés à l'encontre de cette imposition ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration fiscale a l'obligation de tenir à la disposition du contribuable qui le demande, avant la mise en recouvrement d'impositions établies au terme d'une procédure de rectification contradictoire ou par voie d'imposition d'office, les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux redressements correspondants, sauf dans le cas où ces renseignements sont librement accessibles au public, afin de lui permettre de vérifier l'authenticité de ces documents et d'en discuter la teneur ou la portée, ce qui constitue pour lui une garantie ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration s'est fondée sur la mention, portée sur les déclarations de revenus établies au nom de la locataire de M. et Mme A...au titre des années 2009 à 2011, d'une résidence principale située à La Varenne-Saint-Hilaire pour estimer que l'immeuble loué à Saumur n'était pas à usage d'habitation principale ; que M. et Mme A...ont demandé au service de leur communiquer ces documents, qui étaient communicables après occultation des mentions couvertes par le secret fiscal, par un courrier recommandé du 17 décembre 2012, antérieur à la mise en recouvrement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu contestée ; que ces pièces, dont la communication leur a alors été refusée, n'ont été produites qu'en appel, le 10 mars 2016 ; qu'il suit de là que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a fait droit aux conclusions des requérants tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. et Mme A...de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme A...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C...A...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 juin 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01739 2
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