Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 25 juin 2015 et 4 mai 2016, la SCI Cauvin, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 29 avril 2015 ;
2°) de prononcer la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'immeuble à l'origine du litige ayant été cédé dans les cinq ans suivant son acquisition, cette cession est soumise à la taxe sur la valeur ajoutée en application des articles 257 et 271 du code général des impôts, ce qui l'autorisait à déduire la taxe sur la valeur ajoutée acquittée lors de son acquisition de la taxe collectée lors de sa revente ;
- le régime de taxation applicable relève de ces dispositions et non de l'option pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de son activité de location de locaux à usage professionnel, qu'elle avait levée le 26 mai 2009 et dont elle n'a pas fait usage avant la date de péremption du droit à déduction en résultant ;
- à titre subsidiaire, le solde du prix n'ayant été versé que le 21 novembre 2012, son droit à déduction a pris naissance à cette date et pouvait être exercé jusqu'au 31 décembre 2014.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 décembre 2015 et 31 mai 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par la SCI Cauvin ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour la SCI Cauvin.
1. Considérant que la société civile immobilière (SCI) Cauvin, qui exerce une activité de location de terrains et d'immeubles, relève appel du jugement du 29 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la réduction, en droits et intérêts de retard, d'un rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 72 343 euros en droits mis à sa charge correspondant à la taxe restant due au titre de l'acquisition, en mai 2008, d'un immeuble situé à Cavalaire-sur-Mer (Var) ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la date de l'acquisition de l'immeuble : " Sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) / 7° Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles. / Ces opérations sont imposables même lorsqu'elles revêtent un caractère civil. " ; qu'aux termes de l'article 260 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Peuvent sur leur demande acquitter la taxe sur la valeur ajoutée : / (...) : / 2° Les personnes qui donnent en location des locaux nus pour les besoins de l'activité d'un preneur assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (...) / (...) / les conditions et modalités de l'option (...) sont fixées par un décret en Conseil d'Etat. " ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un courrier du 26 mai 2009, la SCI Cauvin a, conformément à l'article 260 du code général des impôts, opté pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de l'immeuble situé à Cavalaire-sur-Mer, acquis en l'état futur d'achèvement, en précisant qu'il était destiné à la location à un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, cette option a eu pour effet de placer cet immeuble sous le régime des opérations imposables sur option, selon les modalités et les délais définis par les articles 193 et suivants de l'annexe II au code général des impôts, et l'a corrélativement privée de la possibilité de déduire la taxe sur la valeur ajoutée acquittée lors de l'acquisition de l'immeuble, de la taxe due lors de sa revente, intervenue en novembre 2012, faute de l'avoir portée en déduction sur ses déclarations mensuelles de chiffre d'affaires dans le délai de deux ans prévu par l'article 208 de la même annexe ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 269 du code général des impôts : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : / (...) / c) Pour les mutations à titre onéreux (...) entrant dans le champ d'application du 7° de l'article 257, à la date de l'acte qui constate l'opération ou, à défaut, au moment du transfert de propriété ; (...) / 2. La taxe est exigible : / a. Pour les livraisons et (...) pour les opérations mentionnées aux b, c, d, et e du 1, lors de la réalisation du fait générateur " ; qu'aux termes de l'article 271 du même code dans sa rédaction alors applicable : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...) / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance (...) " ; qu'aux termes de l'article 1601-3 du code civil : " La vente en l'état futur d'achèvement est le contrat par lequel le vendeur transfère immédiatement à l'acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l'acquéreur au fur et à mesure de leur exécution ; l'acquéreur est tenu d'en payer le prix à mesure de l'avancement des travaux. " ; que, dans le cas d'une vente effectuée en l'état futur d'achèvement, la taxe sur la valeur ajoutée est exigible au fur et à mesure de la construction de l'immeuble, au moment de l'encaissement des acomptes, le reliquat de taxe due devenant exigible au plus tard à la date de la livraison ;
5. Considérant que le ministre soutient sans être contredit qu'à la date du 10 novembre 2009 à laquelle le vendeur l'a mis à la disposition de la société requérante, après le refus de cette dernière d'en prendre livraison le 24 juin 2009, l'immeuble était achevé ; que cette date doit être regardée comme ayant été celle de la livraison et, par voie de conséquence, celle à laquelle la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé son acquisition était, au plus tard, exigible ; qu'il suit de là que la société n'est pas fondée à soutenir, à titre subsidiaire, que le point de départ du délai de deux ans prévu par l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts, dans lequel elle pouvait exercer le droit à déduction résultant de son option, a commencé à courir le 21 novembre 2012, date à laquelle elle a payé au vendeur le solde du prix de vente ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI Cauvin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SCI Cauvin demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI Cauvin est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Cauvin et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Delesalle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mars 2017.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT01930 2
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