Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 15NT02434, le 3 août 2015, la SARL Anjou Myrtilles, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement du 4 juin 2015 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, en droits et pénalités, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la charge de la preuve du caractère non déductible des frais d'opération commerciale incombe à l'administration en vertu de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, dès lors que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a été saisie et s'est régulièrement prononcée ;
- l'opération promotionnelle a bien eu lieu et a été facturée ;
- les sommes correspondantes ont été enregistrées dans la comptabilité de l'entreprise avec laquelle son cocontractant anglais travaille et assujetties à l'impôt au Royaume-Uni ;
- elle n'a aucun lien de dépendance avec la société Winterwood Farms ainsi que le tribunal l'a admis ;
- elle démontre l'échec global de l'opération de commercialisation qui importe seule et non l'existence ou non d'un échec de l'opération commerciale ;
- il résulte de l'analyse de son expert comptable qu'en dépit de l'échec relatif de l'offre commerciale pour l'année 2007, on aboutit avec le complément de prix refacturé le 10 avril 2008 à un chiffre d'affaires global de fruits bien supérieur cette année là aux années antérieures et postérieures ;
- il n'y a pas eu de soustraction à l'impôt sauf à considérer qu'en ne déduisant pas la facture de participation à l'opération promotionnelle, le chiffre d'affaires aurait pris une proportion telle que les myrtilles auraient été vendues plus du double de ce qu'elles sont vendues d'habitude ce qui n'est pas sérieux ;
- l'attestation de son expert comptable et la date du 10 avril 2008 de la facture de 281 000 euros atteste du lien de causalité entre celle-ci et l'offre promotionnelle ;
- l'origine de l'opération tient à ce qu'au début de la saison 2007, les fruits ont été vendus plus de 20 % plus chers que les autres années en raison de la prévision de la réduction du nombre de fruits et d'une hausse de leur prix de ce fait et de ce qu'il a été décidé au niveau du groupement de producteurs, de mettre en place en Angleterre une offre promotionnelle dont l'ensemble de l'opération a été réalisé la société Winterwood Farms afin de vendre plus chers les produits, ce qui s'est toutefois avéré moins fructueux que prévu ;
- si l'opération s'est révélée moins fructueuse que prévue, elle a néanmoins permis un complément de prix, avec une marge supérieure à celle des années précédentes, et qui, chiffré fin 2007, a été porté en produit à recevoir au bilan, et concrétisé par l'émission d'une facture en 2008 ;
- l'imposition due au titre du chiffre d'affaires correspondant a été réglée ;
- l'idée selon laquelle la facture serait du chiffre d'affaires détourné de l'imposition conduirait à une reconstitution de la marge au kilo de myrtilles commercialisées au cours de l'exercice 2007 absurde ;
- après la déduction de la commission et des frais de promotion et facturation en 2007 d'un complément de prix pour 281 658 euros, non pris en compte par le service, le prix au kilo en 2007 se trouve nettement supérieur à l'année précédente et à l'année suivante, lesquelles n'ont pas fait l'objet d'une opération commerciale ce qui démontre la réalité de l'opération commerciale.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les moyens présentés par la SARL Anjou Myrtilles ne sont pas fondés ;
- l'ensemble des éléments exposés tend à démontrer l'existence d'une dépendance de fait entre la SARL Anjou Myrtilles et la société Winterwood Farms en défaveur de la société française, et donc la possibilité de faire également application des dispositions de l'article 57 du code général des impôts.
Par une ordonnance du 28 novembre 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 décembre 2016.
Un mémoire a été enregistré le 3 mars 2017 pour la SARL Anjou Myrtilles représentée par MeA....
II. Par un recours, enregistré sous le n° 15NT02444, le 4 août 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement du 4 juin 2015 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) de remettre à la charge de la SARL Anjou Myrtilles les sommes de 104 751 euros en droits, 12 570 euros en intérêts de retard et 42 959 euros en majoration pour manquement délibéré.
Il soutient que :
- les dispositions de l'article 57 du code général des impôts trouvaient à s'appliquer dès lors qu'il existait une dépendance de fait entre la société Anjou Myrtilles et la société Winterwood Farms au bénéfice de celle-ci ;
- l'application de la retenue à la source n'était pas conditionnée à la mise en oeuvre de l'article 57 du code général des impôts car elle était fondée d'une part sur les dispositions combinées du 1° du 1 de l'article 109 et 2 de l'article 119 bis du code général des impôts qui prévoient respectivement que sont considérés comme revenus distribués tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital et que les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France, ainsi que, d'autre part, sur l'article 9 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968 alors en vigueur qui permet l'application de la retenue à la source dès lors que le terme " dividendes " employé dans cet article désigne notamment les revenus soumis au régime des distributions par la législation fiscale de l'Etat dont la société distributrice est un résident, c'est à dire notamment les revenus distribués en application de l'article 109 du code général des impôts ;
- la réintégration des frais liés à l'opération promotionnelle a également été fondée sur le 1 de l'article 39 du code général des impôts ainsi que l'a rappelé l'administration en première instance et une retenue à la source peut être appliquée lorsque des revenus distribués trouvent leur origine dans une rectification fondée sur cet article ;
- la somme de 593 592 euros ne pouvait être admise en déduction du résultat imposable de la SARL Anjou Myrtilles en application du 1 de l'article 39 du code général des impôts au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2007 faute pour la société de justifier de la réalité de l'opération commerciale menée et de son échec, ainsi que de la réalité des frais supportés au titre de cette opération promotionnelle ainsi que le tribunal l'a à juste titre estimé.
Par un mémoire enregistré le 3 mars 2017, la SARL Anjou Myrtilles, représentée par MeA..., conclut :
1°) au rejet du recours du ministre ;
2°) à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, en droits et pénalités, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2006 et 2007 ;
3°) à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les moyens présentés par le ministre chargé des finances publiques ne sont pas fondés ;
- la charge de la preuve du caractère non déductible des frais d'opération commerciale incombe à l'administration en vertu de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, dès lors que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a été saisie et s'est régulièrement prononcée ;
- l'opération promotionnelle a bien eu lieu et a été facturée ;
- les sommes correspondantes ont été enregistrées dans la comptabilité de l'entreprise avec laquelle son cocontractant anglais travaille et assujetties à l'impôt au Royaume-Uni ;
- elle n'a aucun lien de dépendance avec la société Winterwood Farms ainsi que le tribunal l'a admis ;
- elle démontre l'échec global de l'opération de commercialisation qui importe seule et non l'existence ou non d'un échec de l'opération commerciale ;
- il résulte de l'analyse de son expert comptable qu'en dépit de l'échec relatif de l'offre commerciale pour l'année 2007, on aboutit avec le complément de prix refacturé le 10 avril 2008 à un chiffre d'affaires global de fruits bien supérieur cette année là aux années antérieures et postérieures ;
- il n'y a pas eu de soustraction à l'impôt sauf à considérer qu'en ne déduisant pas la facture de participation à l'opération promotionnelle, le chiffre d'affaires aurait pris une proportion telle que les myrtilles auraient été vendues plus du double de ce qu'elles sont vendues d'habitude ce qui n'est pas sérieux ;
- l'attestation de son expert comptable et la date du 10 avril 2008 de la facture de 281 000 euros atteste du lien de causalité entre celle-ci et l'offre promotionnelle ;
- l'origine de l'opération tient à ce qu'au début de la saison 2007, les fruits ont été vendus plus de 20 % plus chers que les autres années en raison de la prévision de la réduction du nombre de fruits et d'une hausse de leur prix de ce fait et de ce qu'il a été décidé au niveau du groupement de producteurs, de mettre en place en Angleterre une offre promotionnelle dont l'ensemble de l'opération a été réalisé la société Winterwood Farms afin de vendre plus chers les produits ce qui s'est toutefois avéré moins fructueux que prévu ;
- si l'opération s'est révélée moins fructueuse que prévue, elle a néanmoins permis un complément de prix, avec une marge supérieure à celle des années précédentes, et qui chiffré fin 2007 a été porté en produit à recevoir au bilan, et concrétisé par l'émission d'une facture en 2008 ;
- l'imposition due au titre du chiffre d'affaires correspondant a été réglée ;
- l'idée selon laquelle la facture serait du chiffre d'affaires détourné de l'imposition conduirait à une reconstitution de la marge au kilo de myrtilles commercialisées au cours de l'exercice 2007 absurde ;
- après la déduction de la commission et des frais de promotion et facturation en 2007 d'un complément de prix pour 281 658 euros, non pris en compte par le service, le prix au kilo en 2007 se trouve nettement supérieur à l'année précédente et à l'année suivante, lesquelles n'ont pas fait l'objet d'une opération commerciale ce qui démontre la réalité de l'opération commerciale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention du 22 mai 1968 entre la France et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, modifiée, tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur les revenus ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Delesalle,
- et les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.
- et les observations de Me A...pour la SARL Anjou Myrtilles.
1. Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) Anjou Myrtilles, qui exerce une activité agricole de production de fruits rouges et notamment de myrtilles, a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité qui a porté, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos les 30 septembre 2006 et 31 décembre 2007 ; qu'à son issue, lui ont été notifiées deux propositions de rectification des 15 décembre 2009 et 7 mai 2010, portant respectivement sur chacun de ces exercices ; qu'elle a présenté les 13 février 2010 et 6 juillet 2010 des observations, auxquelles le service a répondu le 26 juillet 2010 ; que la commission départementale des impôts et directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, saisie à sa demande, a émis le 11 février 2011 un avis partiellement favorable à la société ; qu'ont été finalement notifiés à la société des redressements en matière d'impôt sur les sociétés et une retenue à la source qui ont été mis en recouvrement le 18 juillet 2011 ; qu'elle a alors formé une réclamation à laquelle le service a partiellement fait droit le 3 avril 2012 ; que la SARL Anjou Myrtilles a demandé au tribunal administratif de Nantes la décharge, en droit et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de la retenue à la source au titre des exercices clos en 2006 et 2007 ; que par un jugement du 4 juin 2015, le tribunal a, à son article 1er, fait droit à sa demande de décharge de la retenue à la source au titre de l'année 2007 pour des montants de 104 751 euros en droits et 55 529 euros en pénalités, correspondant à la réintégration à son résultat fiscal de la somme de 593 592 euros déduite à raison d'une opération commerciale, à son article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, à son article 3, rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; que, sous le n° 15NT02434, la SARL Anjou Myrtilles relève appel de l'article 3 de ce jugement ; que, sous le n° 15NT02444, le ministre chargé des finances publiques relève appel des articles 1er et 2 de ce jugement ;
2. Considérant que la requête de la SARL Anjou Myrtilles et le recours du ministre chargé des finances publiques sont dirigés contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur l'impôt sur les sociétés :
3. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;
4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission ". / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge. / Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69. " ; qu'en adoptant le premier alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, éclairé, au demeurant, par les travaux préparatoires auxquels celui-ci a donné lieu, le législateur a seulement entendu mettre fin, sous réserve du cas prévu au deuxième alinéa du même article, à l'état du droit antérieur selon lequel l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur les chiffres d'affaires avait pour effet, s'il était favorable à l'administration fiscale, d'attribuer au contribuable la charge d'une preuve que l'intéressé n'aurait pas supportée en l'absence de saisine de cette commission ; qu'en revanche, le législateur n'a pas entendu déroger aux principes généraux régissant la charge de la preuve et exiger de l'administration fiscale qu'elle justifie qu'une charge n'est pas déductible dans son principe, dès lors que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur les chiffres d'affaires, saisie, a rendu un avis même favorable au contribuable ;
5. Considérant que la SARL Anjou Myrtilles, à laquelle incombe la charge de la preuve conformément à ce qui a été dit aux points 3 et 4, a comptabilisé en charges au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007 une somme de 593 592 euros correspondant à des frais de marge arrière et des frais de promotion liés à une opération commerciale menée selon elle à destination de supermarchés britanniques et objet d'une facture du 21 décembre 2007 établie par la société Winterwood Farms ; que l'administration a remis en cause cette déduction aux motifs que la prise en charge de ces frais n'était prévue par aucun contrat, que la facture avait été établie par la société Winterwood Farms alors que les myrtilles avaient été achetées en 2007 par le groupement de producteurs The Berryworld Producer Organisation et qu'il n'était pas démontré que la société Winterwood Farms avait mené cette opération commerciale ;
6. Considérant que la SARL Anjou Myrtilles produit la facture du 21 décembre 2007 établie par la société Winterwood Farms dont le dirigeant ainsi que le cabinet d'expertise comptable attestent, les 10 mai 2010 et 9 février 2011, que celle-ci en a effectivement reçu paiement ; qu'elle produit également une attestation du 6 avril 2010 émanant du même dirigeant selon laquelle, sur ses recommandations, la SARL Anjou Myrtilles avait majoré de 20 % le prix habituel facturé par anticipation d'une hausse des prix du fait d'une pénurie de fruits mais que les résultats des ventes n'ayant pas été à la hauteur des attentes, la somme de 593 592 euros correspondait principalement au reversement de cet excédent de prix ainsi qu'il en avait été convenu et à divers frais de promotion et coûts ; que, toutefois, et ainsi que le fait valoir l'administration, d'une part, la facture n'a pas été établie par le groupement de producteurs The Berryworld Producer Organisation, qui n'a pas été bénéficiaire de son paiement, alors même que la société requérante lui a vendu sa production en 2007 et, que selon l'attestation du 6 avril 2010, la majeure partie de la somme acquittée correspond au reversement du prix initialement envisagé ; que si la SARL Anjou Myrtilles soutient qu'elle a refacturé le 10 avril 2008 au groupement de producteurs un complément de prix sur la vente de myrtilles en 2007 pour un montant de 281 656 euros compensant les frais facturés le 21 décembre 2007, elle n'établit pas, par la production d'une attestation émanant de son expert-comptable ou par la proximité dans le temps des deux opérations, le lien entre cette facture et les frais supportés dont les montants ne correspondent pas ; que, d'autre part, la société n'a apporté aucun élément sur la nature exacte ou les modalités de l'opération commerciale qui aurait été menée par l'intermédiaire de la société Winterwood Farms mais qui n'a donné lieu à aucun engagement écrit ; que, par ailleurs, la circonstance que le prix moyen de vente et son chiffre d'affaires global en 2007, sur lequel elle a été imposée, seraient finalement supérieurs à ceux des années précédente et suivante est sans incidence sur la déductibilité ; que, dès lors, et contrairement à ce que soutient la SARL Anjou Myrtilles, c'est à bon droit que l'administration n'a pas admis la somme de 593 592 euros en charges déductibles et l'a, pour ce motif, réintégrée à son résultat fiscal et a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007 pour des montants de 197 864 euros en droits et 98 233 euros en pénalités ;
Sur la retenue à la source :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du même code : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 110 de ce code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés " ; qu'aux termes du 2 de l'article 119 bis du code : " Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. (...). " ; qu'en vertu du 1 de l'article 48 de l'annexe II au code général des impôts, la retenue à la source mentionnée au 2 de l'article 119 bis est liquidée sur le montant brut des revenus mis en paiement ;
8. Considérant que pour appliquer une retenue à la source correspondant à la réintégration de la charge de la somme de 593 592 euros évoquée aux points 5 et 6, le service s'est fondé sur l'existence d'une relation de dépendance entre la SARL Anjou Myrtilles et la société Winterwood Farms bénéficiaire au sens de l'article 57 du code général des impôts, d'une part, et sur la réintégration de la charge au regard de l'article 39 du même code pour en déduire qu'il existait un revenu distribué au sens du 1° du 1 de l'article 109, d'autre part ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 6, que c'est à bon droit que cette somme a été considérée comme une charge non déductible au sens de l'article 39 du code général des impôts ; que, de ce fait, et à supposer même qu'il n'existât pas de situation de dépendance entre les sociétés Anjou Myrtilles et Winterwood Farms au sens de l'article 57 du même code, le service était en droit d'appliquer une retenue à la source au titre des revenus distribués sur le fondement des dispositions combinées des articles 109, 110 et 119 bis du code général des impôts dans les conditions prévues par le 1 de l'article 48 de l'annexe II au même code ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1er et 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la retenue à la source et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, la SARL Anjou Myrtilles, qui ne présente aucun moyen à l'appui de ses conclusions présentées au titre de l'exercice clos au 30 septembre 2006, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté le surplus de sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du 4 juin 2015 du tribunal administratif de Nantes sont annulés.
Article 2 : La retenue à la source, en droits et pénalités, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007 est remise à la charge de la SARL Anjou Myrtilles.
Article 3 : La demande de la SARL Anjou Myrtilles et le surplus de ses conclusions sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Anjou Myrtilles et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Delesalle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mars 2017.
Le rapporteur,
H. DelesalleLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 15NT02434,15NT02444