1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 13 mars 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 300 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de le munir d'un récépissé le temps du réexamen de sa demande dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à verser la somme de 1 500 euros à Me C... en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique.
Il soutient que :
Sur le refus de titre de séjour :
- sa demande de titre de séjour aurait dû être examinée sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour de des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée a été prise en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour de des étrangers et du droit d'asile ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
- en raison de l'annulation du refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français sera privée de base légale ;
- elle est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- en raison de l'annulation du refus de titre de séjour, la décision sera privée de base légale.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 février 2020, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance, que le requérant n'avait pas demandé de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'en tout état de cause, sa vie privée et familiale a été examinée au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 décembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant marocain né le 4 juillet 1974, déclare être entré en France le 18 septembre 2002. Il a sollicité le 24 juillet 2015 du préfet de la Loire-Atlantique la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé. Par un arrêté du 15 décembre 2015, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de délivrer le titre sollicité. Le 15 février 2016, M. E... a attaqué cet arrêté devant le tribunal administratif de Nantes. Postérieurement à l'introduction de la requête, le préfet de la Loire-Atlantique a remis à M. E..., le 7 novembre 2016, un titre de séjour valable jusqu'au 27 septembre 2017. Par conséquent, le tribunal administratif de Nantes a prononcé le 20 juillet 2017 un non-lieu à statuer sur la requête introduite le 15 février 2016. En août 2017, M. E... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour et a bénéficié de récépissés le temps de l'instruction de sa demande. Par un arrêté du 13 mars 2019, le préfet de la Loire-Atlantique a prononcé à son encontre un refus de renouvellement de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré. M. E... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 15 octobre 2019, le tribunal a rejeté sa demande. M. E... fait appel de ce jugement.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait demandé au préfet de la Loire-Atlantique le renouvellement ou l'obtention d'un titre de séjour fondé sur les dispositions de l'article 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si le requérant, qui reconnaît ne pas avoir de copie de sa demande de renouvellement de titre de séjour, se prévaut de ce que le titre qu'il avait précédemment obtenu le 7 novembre 2016 portait la mention " vie privée et familiale ", cela ne saurait établir qu'il avait été obtenu non pas au titre du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais du 7° de ce même article. Sa demande initiale de titre de séjour du 15 juillet 2015 se bornait à citer, sans autre précision, l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14, même s'il y faisait état à la fois de ses liens amicaux et familiaux et de son état de santé. En outre, le préfet a produit en appel un courrier du 29 septembre 2017, non ensuite contredit, par lequel l'intéressé était convoqué en février 2018 pour " renouvellement titres de séjour pour raisons de santé L. 313-11 11° ". En tout état de cause, il résulte des termes de la décision litigieuse que le préfet de la Loire-Atlantique a examiné l'intensité de la vie familiale attestée par le requérant au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui porte sur le même aspect que le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen tiré de ce que la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. E... aurait dû être examinée également sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".
4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. Dans son avis du 1er juillet 2018, le collège de médecins de l'OFII a considéré que si l'état de santé de M. E... nécessite une prise en charge médicale et que le défaut d'une telle prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié à ses pathologies dans son pays d'origine.
6. Le requérant, se borne à soutenir en appel qu'il " souffre d'une pathologie invalidante nécessitant des soins permanents liés à des lésions du rachis lombaire " et qu' " il apparaît difficile de comprendre pourquoi le renouvellement [de son titre] ne serait pas accordé alors que [son] état de santé s'est au contraire dégradé en plus de deux années ". Il produit également deux attestations émanant du même médecin, au demeurant portant sur d'autres pathologies que celle dont il se prévaut, et indiquant que l'intéressé suit un traitement et que son état est très dégradé. Si ces certificats mentionnent qu' " il lui sera matériellement impossible de suivre son traitement au Maroc ", ils ne suffisent pas, en l'absence de précision des raisons de cette impossibilité matérielle, à établir que M. E... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, alors que le préfet établit, par les pièces produites en première instance, que de nombreux établissements médicaux ont un service d'orthopédie et que l'ensemble des pathologies sont prises en charge. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale ne peut qu'être écarté.
8. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier que si le requérant soutient être entré en France en 2002, il ne produit aucun document, excepté des attestations non circonstanciées, faisant état de sa présence en France avant 2006. Pour les mêmes raisons, il n'établit pas sa présence en France entre 2008 et 2012. Il soutient également être en concubinage depuis 2007 avec Mme B..., de nationalité française. Toutefois, dans une première attestation du 26 avril 2015, cette dernière ne se présentait que comme une " amie " de l'intéressé et indiquait uniquement, d'une part, qu'elle " connaissait " le requérant, et d'autre part, que ce dernier résidait en France " depuis octobre 2007 ". Dans une deuxième attestation du 25 octobre 2019 produite en appel, elle indique qu'elle vit en concubinage avec lui depuis 2007 et qu'elle le prend en charge financièrement. Une troisième attestation datée du 3 mars 2020 est rédigée dans les mêmes termes que la deuxième. Dans ces conditions, ces attestations, ainsi que celles de proches, toutes peu précises et rédigées dans des termes stéréotypés, et les quelques document administratifs faisant état d'une adresse du requérant chez Mme B..., au demeurant uniquement pour la période allant de 2012 à 2015, ne suffisent pas à établir la réalité d'un concubinage durable à la date de l'arrêté contesté. M. E..., qui n'a pas d'enfant, a vécu la majeure partie de sa vie hors de France et n'allègue pas être isolé dans son pays d'origine. Ainsi, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale ne peut qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté, par le jugement attaqué, sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié aux ayants droit de M. A... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme D..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 septembre 2020.
Le rapporteur,
P. D...
Le président,
F. Bataille
La greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT04381