Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 14 mars 2019, 21 septembre 2020 et 12 octobre 2020, la SAS Sonepar, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer cette décharge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le maintien à l'actif de son bilan du fonds de commerce, à hauteur d'un montant de 1 798 898 euros, résulte d'une erreur comptable ; ce fonds de commerce correspond à l'activité dédiée aux grandes surfaces alimentaires qui était exercée sur le site d'Aulnay-Sous-Bois ; la fermeture de ce site en 2007 aurait dû donner lieu à la sortie du fonds du commerce du bilan ; elle est ainsi fondée, en application du deuxième alinéa des dispositions du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, à solliciter la correction du bilan de clôture du premier exercice non prescrit, soit l'exercice 2012 afin de tenir compte de la disparition de ce fonds de commerce ;
- elle est fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B, de la prise de position formelle de l'administration contenue dans la proposition de rectification du 18 décembre 2015, le vérificateur ayant constaté que le fonds de commerce a cessé d'être exploité en 2007.
Par un mémoire en défense et des mémoires, enregistrés les 18 septembre 2019, 5 octobre 2020 et 26 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la SAS Sonepar ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., pour la SAS Sonepar.
Considérant ce qui suit :
1. La société Cadelec avait pour activité la vente de matériel électrique et dérivés à destination du grand public, la commercialisation étant assurée par les grandes surfaces de l'alimentation et du bricolage. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. A l'issue de ce contrôle, le vérificateur a constaté que le fonds de commerce, inscrit à l'actif du bilan pour un montant de 1 798 898 euros, avait fait l'objet d'une provision pour dépréciation pour la totalité de ce montant. Constatant que ce fonds de commerce n'était plus exploité, il a alors estimé que cette provision était devenue sans objet et a décidé de remettre en cause cette provision dans le bilan de clôture du premier exercice non prescrit, soit l'exercice clos le 31 décembre 2012. La société n'a pas contesté cette rectification et a souhaité régulariser sa situation en faisant usage de la procédure prévue à l'article L. 62 du livre des procédures fiscales. Le délai de reprise arrivant à son terme avant que cette régularisation ne soit effective, le service a adressé à la société, à titre conservatoire, une proposition de rectification datée du 18 décembre 2015. La procédure de régularisation a été menée à son terme et la société s'est acquittée des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt consécutives à cette régularisation. Par une réclamation du 30 décembre 2015, la société par actions simplifiée (SAS) Sonepar, agissant pour le compte de la société Cadelec en tant que société intégrante, a demandé à être déchargée de ces impositions, estimant que la disparition du fonds de commerce devait également être prise en compte, venant ainsi compenser la remise en cause de la provision. Cette réclamation a été rejetée le 3 octobre 2017. Par un jugement n° 1703611 du 15 janvier 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande présentée par la société Sonepar tendant à la décharge de ces impositions. La SAS Sonepar relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) / 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit. / (...) / Les corrections des omissions ou erreurs mentionnées aux deuxième et troisième alinéas restent sans influence sur le résultat imposable lorsqu'elles affectent l'actif du bilan. Toutefois, elles ne sont prises en compte ni pour le calcul des amortissements ou des provisions, ni pour la détermination du résultat de cession (...) ".
3. En premier lieu, la SAS Sonepar soutient que le fonds de commerce, inscrit à l'actif du bilan de la société Cadelec pour une valeur de 1 798 898 euros, correspondait à l'activité dédiée aux grandes surfaces alimentaires, exercée sur le site d'Aulnay-sous-Bois, qui a cessé lors de la fermeture de ce site en 2007. Il est constant que ce fonds a été acquis par la société Cadelec par une convention d'apport partiel d'actif du 26 juin 2003 et appartenait auparavant à la société CGED. Si l'acte d'acquisition de ce fonds de commerce daté du 29 décembre 1999 permet de démontrer que la société CGED avait elle-même acquis ce fonds pour une valeur de 11 800 000 francs, soit 1 798 898 euros, il ressort toutefois du premier paragraphe de la deuxième page de cet acte que ce fonds portait non seulement sur une activité à destination des grandes surfaces alimentaires mais également sur une activité à destination des grandes surfaces de bricolage. Or il n'est pas contesté que la société Cadelec a, après l'acquisition du fonds de commerce en 2003, restructuré son activité en fermant les sites d'Aulnay-sous-Bois et Saint-Jean-de-la-Ruelle, et a transféré son activité sur le site de Saran où elle a poursuivi son activité à destination des grandes surfaces de bricolage. Ainsi, outre le fait que la société appelante n'apporte aucun élément permettant de démontrer qu'elle aurait cessé son activité auprès des grandes surfaces alimentaires, l'allégation selon laquelle le site d'Aulnay-sous-Bois était dédié à ces grandes surfaces alimentaires est contredite par les mentions de l'acte de d'acquisition du 29 décembre 1999. Dès lors, la fermeture de ce site n'a pas nécessairement eu pour conséquence la disparition du fonds de commerce, en raison du transfert de l'activité sur le site de Saran. Il suit de là que la SAS Sonepar n'apporte pas la preuve, qui lui incombe en application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, de ce que le fonds de commerce, figurant à l'actif de la société Cadelec pour une valeur de 1 798 898 euros, avait disparu et que son maintien à l'actif du bilan résultait par conséquent d'une erreur comptable.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) ". Aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; (...) ".
5. Dans la proposition de rectification du 18 décembre 2015, le vérificateur a indiqué qu'à la suite des entretiens menés avec la société, celle-ci avait indiqué que le fonds de commerce avait définitivement cessé en 2007 et qu'il n'avait plus de valeur. Le vérificateur en a donc déduit que la provision afférente à ce fonds était devenue sans objet. Par ce raisonnement, le vérificateur s'est borné à tirer les conséquences des déclarations de la société. En outre, l'appréciation portée par le vérificateur a porté sur la validité de la provision passée par la société, au regard des dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, et non sur la validité de l'inscription du fonds de commerce à l'actif du bilan. Le vérificateur n'a donc pas formellement pris position sur la disparition du fonds de commerce. Il suit de là que la société Sonepar n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, d'une prise de position formelle de l'administration.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Sonepar n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Sonepar est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Sonepar et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 février 2021.
Le rapporteur,
H. A...Le président,
F. Bataille
La greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 19NT010542