Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 janvier 2020, Mme G... B..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler ce jugement du 19 novembre 2019 ;
3°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 20 septembre 2017 ;
4°) d'enjoindre, sous astreinte, au ministre de l'intérieur de délivrer à M. C... I... D... le visa de long séjour sollicité, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut et dans les mêmes conditions, d'enjoindre au ministre de réexaminer sa demande de visa d'entrée et de long séjour en France ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
faute de justifier de la composition régulière de la commission, la décision contestée est irrégulière ;
cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que les liens qui l'unissent avec M. C... I... D... sont établis par ses déclarations constantes depuis son entrée en France,
Mme G... B... été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu
la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
le code civil ;
le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
le rapport de M. A...'hirondel,
et les observations de Me E..., représentant Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante centrafricaine née le 20 mars 1985, est entrée en France le 28 juin 2015 et a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 23 mars 2016. M. C... H... I... D..., né le 29 mai 1982 et de nationalité centrafricaine, qui se présente comme son concubin, a déposé, le 25 janvier 2017, auprès des autorités consulaires françaises à Rabat une demande de visa de long séjour pour établissement familial. Les autorités consulaires ont refusé de délivrer ce visa par une décision du 5 juin 2017. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté, par une décision du 21 septembre 2017, le recours préalable formé le 21 juillet 2017 à l'encontre de cette décision consulaire. Mme B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 novembre 2019 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours.
Sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ".
3. Par une décision du 11 juin 2020, postérieure à l'introduction de la requête, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme B... l'aide juridictionnelle totale. Par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'elle soit admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. Aux termes de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une commission placée auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'immigration est chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. La saisine de cette commission est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier ". Aux termes de l'article D. 211-7 du même code : " Le président de la commission est choisi parmi les personnes ayant exercé des fonctions de chef de poste diplomatique ou consulaire. / La commission comprend, en outre : / 1° Un membre, en activité ou honoraire, de la juridiction administrative ; / 2° Un représentant du ministre des affaires étrangères ; / 3° Un représentant du ministre chargé de l'immigration ; / 4° Un représentant du ministre de l'intérieur. / Le président et les membres de la commission sont nommés par décret du Premier ministre pour une durée de trois ans. Pour chacun d'eux, un premier et un second suppléant sont nommés dans les mêmes conditions. ". L'article 1er de l'arrêté du 4 décembre 2009 relatif aux modalités de fonctionnement de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prévoit que cette commission " délibère valablement lorsque le président ou son suppléant et deux de ses membres au moins, ou leurs suppléants respectifs sont réunis. ".
5. Mme B... soutient, pour la première fois en appel, que la décision de refus de délivrance de visa en litige a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, eu égard à l'absence de justification de la composition régulière de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France. Le ministre de l'intérieur, à qui la requête a été communiquée et qui, en application des dispositions de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, a été mis en demeure de produire des conclusions en réponse à la requête de Mme B..., n'a pas produit de mémoire en défense. Dans ces conditions, il ne rapporte pas la preuve dont la charge lui incombe de la régularité de la composition de cette commission telle qu'elle est fixée par les dispositions précitées de l'article 1er de l'arrêté du 4 décembre 2009. Il suit de là que la décision attaquée doit être regardée comme ayant été prise par une commission irrégulièrement composée.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :
7. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt n'implique pas qu'il soit prescrit, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, au ministre de l'intérieur de délivrer le visa de long séjour demandé. En revanche, il implique que l'administration statue de nouveau sur la demande de M. I... D.... Il y a lieu par suite, en application de l'article L. 911-2 de ce code, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de se prononcer sur cette demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement, par application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à l'avocat de Mme B... de la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'admission de Mme B... à l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 novembre 2019 et la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 20 septembre 2017 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de réexaminer la demande de visa de long séjour de M. C... I... D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... B..., à M. C... H... D... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président,
- Mme Douet, présidente-assesseur,
- M. A...'hirondel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2021.
Le rapporteur,
M. F...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1
2
N° 20NT00229