Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 décembre 2018 et deux mémoires du 15 mars 2019, M.F..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 12 octobre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Grandchamp-des-Fontaines du 7 février 2017 ;
3°) de rejeter les conclusions présentées par la SCCV AP 42 en application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Grandchamp-des-Fontaines la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le permis de construire méconnaît l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme ;
- l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme ne respecte pas les dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme ;
- les conclusions indemnitaires de la SCCV AP 42 sont infondées.
Par des mémoires en défense enregistrés le 15 février et le 22 mars 2019, la SCCV AP 42, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête, à la condamnation de M. F...à lui verser la somme de 279 048 euros hors taxe, en réparation de son préjudice matériel et financier et de 30 000 euros en réparation de son préjudice moral et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. F...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- en l'absence de preuve de notification du recours, la requête est irrecevable ;
- le requérant ne justifie pas de son intérêt à agir ;
- les autres moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés ;
- en présentant un recours excédant la défense de ses intérêts légitimes, M. F...lui a causé un préjudice excessif.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 février 2019, la commune de Grandchamp-des-Fontaines, agissant par son maire et représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. F..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Giraud,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- les observations de MeD..., substituant Me B...représentant M.F..., de MeE..., substituant Me A...représentant la commune de Grandchamp-des-Fontaines.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 7 février 2017, le maire de Grandchamp-des-Fontaines a délivré à la SCCV AP 42 un permis de construire deux bâtiments de logements collectifs sur une parcelle sise rue de Curette. M. G... F...relève appel du jugement du 12 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins-de-non recevoir opposées par la SCCV AP 42 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le règlement peut comprendre tout ou partie des règles suivantes : / (...) / 6° L'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques ; / (...) / Les règles édictées dans le présent article peuvent être différentes, dans une même zone, selon que les constructions sont destinées à l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à l'exploitation agricole ou forestière ou à la fonction d'entrepôt. En outre, des règles particulières peuvent être applicables aux constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif. / Les règles mentionnées aux 6° et 7° relatives à l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques et par rapport aux limites séparatives, qui ne sont pas fixées dans le règlement, doivent figurer dans les documents graphiques. / (...) ".
3. Eu égard à l'objet de ces dispositions, le règlement du plan local d'urbanisme doit fixer des règles précises d'implantation par rapport aux voies et emprises publiques et aux limites séparatives. Lorsque le règlement contient des dispositions permettant de faire exception aux règles générales d'implantation qu'il fixe, ces règles d'exception doivent être suffisamment encadrées, eu égard à leur portée, sans préjudice de la possibilité d'autoriser des adaptations mineures.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Grandchamp-des-Fontaines après avoir fixé en son premier alinéa les règles d'implantation des constructions par rapport aux voies publiques en imposant le respect de distances minimales de retrait, dispose ensuite que " La règle d'implantation ne s'applique pas : / - aux constructions à usage scolaire, sanitaire, hospitalier, / - aux constructions destinées à accueillir des services publics, / - aux constructions de logements locatifs sociaux, / - aux constructions de collectifs à usage d'habitat, / - aux constructions de locaux commerciaux et de services de plus de 100 m² SP. ". Compte tenu de la liste limitativement énoncée de ces exceptions, cette règle doit être regardée comme suffisamment encadrée, eu égard à sa portée. Dès lors le moyen tiré de l'insuffisante précision des exceptions prévues à l'article UA 6 doit être écarté.
5. En second lieu, si le permis de construire ne peut être délivré que pour un projet qui respecte la réglementation d'urbanisme en vigueur, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation. Par suite, un requérant demandant l'annulation d'un permis de construire ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut. La déclaration d'illégalité d'un document d'urbanisme a, au même titre que son annulation pour excès de pouvoir, pour effet de remettre en vigueur le document d'urbanisme immédiatement antérieur. Dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge qu'un permis de construire a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l'article L. 600-1 du même code -, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.
6. S'il est loisible aux auteurs des plans locaux d'urbanisme de préciser, pour des motifs d'urbanisme et sous le contrôle du juge, le contenu des catégories énumérées à l'article R. 123-9, les dispositions de cet article ne leur permettent, toutefois, ni de créer de nouvelles catégories de destination pour lesquelles seraient prévues des règles spécifiques, ni de soumettre certains des locaux relevant de l'une des catégories qu'il énumère aux règles applicables à une autre catégorie.
7. En distinguant au sein de l'article UA 6 du plan local d'urbanisme, parmi les habitations, les habitations à usage collectif qui seules pourront bénéficier de l'exception qu'il prévoit quant à l'alignement, la commune de Grandchamp-des-Fontaines a créé une catégorie nouvelle au sens de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme précité. Il suit de là que l'article UA 6 du règlement de ce plan méconnaît ce même article R. 123-9 qui fixe de manière limitative les catégories de destinations pouvant être soumises à des règles différentes au sein d'une même zone. Toutefois, M. F...se borne ensuite à alléguer, sans aucune autre précision, que l'arrêté contesté ne serait pas conforme aux dispositions antérieurement applicables de cet article. Dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté.
Sur les conclusions tendant à l'allocation de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :
8. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. / (...) ".
9. Il ne résulte pas de l'instruction que le recours pour excès de pouvoir de M. F... aurait été mis en oeuvre dans des conditions excédant la défense de ses intérêts légitimes. La société pétitionnaire ne saurait, dès lors, prétendre à l'allocation de dommages-intérêts au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
10. Il résulte de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. La SCCV AP 42 n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que par le même jugement, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions présentées au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Grandchamp-des-Fontaines qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. F... demande au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. F... les sommes que demandent les parties défenderesses au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société civile de construction-vente AP 42 présentées sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Grandchamp-des-Fontaines tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F..., à la commune de Grandchamp-des-Fontaines et à la société civile de construction-vente AP 42.
Délibéré après l'audience du 11 juin 2019, où siégeaient :
- M. Perez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. Giraud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 juillet 2019.
Le rapporteur,
T. GIRAUDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT04317