Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...'hirondel,
- les conclusions de Mme Piltant, rapporteur public
- et les observations de MeD..., substituant MeC..., représentant la SA Laboratoire de contactologie appliquée (LCA)
1. Considérant que la SA Laboratoire de contactologie appliquée (LCA), qui est spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation de dispositifs médicaux pour l'ophtalmologie, la dermatologie et la rhumatologie, a saisi, le 24 juillet 2012, l'inspection du travail d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique de M. B...exerçant le mandat de délégué du personnel titulaire ; que, par décision du 21 septembre 2012, l'inspecteur du travail a autorisé ce licenciement ; que le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, saisi par M. B...d'un recours hiérarchique reçu le 22 novembre 2012, a, tout d'abord, rejeté implicitement ce recours puis, par une décision explicite du 2 mai 2013 a retiré cette décision implicite, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et a, enfin, refusé l'autorisation de licencier M. B...; que la SA Laboratoire de contactologie appliquée relève appel du jugement du 5 février 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 mai 2013 du ministre chargé du travail et de l'emploi ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que le laboratoire de contactologie appliquée renouvelle en appel, sans apporter de précisions supplémentaires, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations concernant le respect du contradictoire et de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L.1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. / Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants, résultant de l'une des causes énoncées au premier alinéa. " ; que, pour l'application de ces dispositions, est au nombre des causes sérieuses de licenciement économique la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ;
4. Considérant, par ailleurs, qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis des fonctions de délégué du personnel et de représentant syndical au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
5. Considérant que, par lettres des 7 février 2012 et 14 février 2012, le laboratoire de contactologie appliquée (LCA) a informé M. B...de son intention de modifier son contrat de travail en suspendant la prospection des départements d'outre-mer de Guadeloupe et de la Martinique " compte tenu de la pression concurrentielle intervenue depuis 6 mois sur tous les secteurs de la France métropolitaine, en particulier sur les secteurs géographiques du Sud de la France " ; qu'à la suite du refus de M.B..., la société LCA a demandé l'autorisation de procéder à son licenciement pour motif économique ;
6. Considérant que la société LCA allègue, alors qu'elle a été pionnière dans le secteur du traitement de l'arthrose par injection intra-articulaire d'hyaluronate de sodium grâce à un produit qu'elle a développé dès 1998 dénommé " Arthrum ", subir une concurrence accrue du fait de la mise sur le marché de douze autres produits concurrents ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que cette concurrence se limite à onze produits, un ayant été compté deux fois et radié, en 2010, avec deux autres, de la liste des produits et prestations remboursables par la sécurité sociale ; qu'en outre, cette concurrence ne peut être regardée comme nouvelle dès lors que huit de ces produits ont bénéficié d'un avis favorable de la Haute autorité de santé entre 2002 et 2005, et les quatre autres d'un avis émis en 2006, 2007, 2008 et 2010 ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, que, s'agissant du secteur du sud-est de la France dont M. B... avait la charge au cours des six mois précédant les lettres de février 2012, la société requérante a connu une progression constante de son chiffre d'affaires alors que sa part de marché n'a pas connu de baisse significative ; qu'enfin, il n'est pas contesté qu'elle a procédé en janvier 2013, quelques jours après le terme de la relation contractuelle la liant à M.B..., à l'embauche d'un responsable commercial des ventes dans le secteur des Antilles ( Guadeloupe et Martinique) pour remplacer ce dernier ; qu'il suit de là que le licenciement de M. B...n'était pas justifié par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société LCA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande à ce titre le laboratoire de contactologie appliquée ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du laboratoire de contactologie appliquée le versement à M. B...d'une somme de 1 500 euros au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA Laboratoire de contactologie appliquée est rejetée.
Article 2 : La SA Laboratoire de contactologie appliquée versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Laboratoire de contactologie appliquée, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à M.B....
Délibéré après l'audience du 13 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. A...'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 décembre 2016.
Le rapporteur,
M. E...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT01303