Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 juin 2018, le ministre de l'intérieur demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Nantes.
Il soutient qu'il n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que le postulant n'avait pas fixé en France le centre de ses attaches familiales.
M. B...D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bougrine,
- et les observations de MmeC..., représentant le ministre de l'intérieur.
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., ressortissant algérien né le 16 janvier 1936, a présenté une demande de réintégration dans la nationalité française qui a été déclarée irrecevable par une décision du préfet de la Mayenne du 30 mars 2015. Le ministre de l'intérieur a, par une décision du 22 janvier 2016, rejeté le recours formé contre la décision préfectorale et maintenu la déclaration d'irrecevabilité. Il relève appel du jugement du 5 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, à la demande de M.D..., annulé sa décision du 22 janvier 2016.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 24-1 du code civil : " La réintégration par décret peut être obtenue à tout âge et sans condition de stage. Elle est soumise, pour le surplus, aux conditions et aux règles de naturalisation. ". L'article 21-16 du même code dispose : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation. ". Il résulte de ces dispositions que la demande de réintégration n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière durable le centre de ses intérêts familiaux et matériels à la date à laquelle il est statué sur sa demande. Pour apprécier si cette dernière condition est remplie, l'administration peut notamment se fonder, sous le contrôle du juge, sur la situation familiale du demandeur, sa durée de présence en France et le caractère suffisant et durable de ses ressources.
3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision litigieuse l'épouse et six des neuf enfants de M. D...résidaient en Algérie. Il n'est ni démontré ni allégué qu'une demande de regroupement familial aurait été formée au profit de son épouse avec laquelle il a maintenu une communauté de vie ainsi qu'en témoignent les visites régulières de celle-ci en France. Dans ces conditions, alors même que M.D..., résidant en France depuis 2003, a servi dans l'armée française entre 1955 et 1959 puis a été employé à la préfecture d'Oran entre 1959 et 1962 et que l'intégralité de ses ressources proviendrait des pensions de retraite civile et militaire qu'il perçoit en France, le ministre de l'intérieur n'a pas, en estimant que l'intéressé ne remplissait pas la condition de résidence prévue à l'article 21-16 du code civil, entaché sa décision d'erreur d'appréciation. Ainsi, c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision du 22 janvier 2016.
4. Aucun autre moyen, dont la cour se trouverait saisie par l'effet dévolutif, n'a été invoqué par M. D...devant le tribunal ou devant la cour.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 22 janvier 2016 et lui a enjoint de réexaminer la demande de réintégration dans la nationalité française formée par M.D....
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 juin 2018 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...D....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Mayenne.
Délibéré après l'audience du 2 avril 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M.A...'hirondel, premier conseiller,
- Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 avril 2019.
Le rapporteur,
K. BougrineLe président,
A. Pérez
Le greffier,
A. Brisset
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1
N° 18NT02382 2
1