Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 janvier 2015 M. C...D..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 novembre 2014 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations impositions et contributions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure d'imposition suivie par le service vérificateur, qui a estimé qu'il devait avec son épouse faire l'objet d'une imposition commune du 1er janvier au 19 décembre 2008 puis séparée jusqu'au 31 décembre 2008, est irrégulière ; le service vérificateur n'invoque aucune circonstance de nature à justifier une imposition séparée des deux conjoints à compter du 19 décembre 2008 alors qu'ils avaient souscrit une déclaration commune pour toute l'année 2008 ;
- c'est à tort que l'administration lui a demandé ainsi qu'à son épouse des justifications et des éclaircissements au titre de l'année 2007 sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales dès lors que les crédits inscrits à ses comptes bancaires étaient inférieurs au double des revenus déclarés ; l'administration aurait dû intégrer au second terme de comparaison le montant brut des recettes réévaluées de la société Loire Atlantique Sécurité Service s'élevant à 49 776 euros TTC et non les seuls bénéfices qu'il avait déclarés d'un montant de 2 423 euros ;
- l'administration ne pouvait taxer dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée que les montants de 9 329 euros et 7 245 euros au titre des années 2007 et 2008 ;
- c'est à tort que les pénalités pour manquement délibéré leur ont été appliquées.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 avril 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 mars 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coiffet,
- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
1. Considérant que la Sarl Loire-Atlantique Sécurité Service, dont M. D...était le gérant et l'unique associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 12 novembre 2007, date de sa création, au 31 décembre 2008, date de clôture de son exercice comptable, à la suite de laquelle l'administration a évalué d'office, sur le fondement de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, le bénéfice industriel de la société à 6 164 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007 et à 52 864 euros au titre de l'exercice clos en 2008 ; que, parallèlement, M. et Mme D...ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, à l'issue duquel l'administration a taxé d'office, au titre des revenus d'origine indéterminée, les crédits figurant sur leurs comptes bancaires et demeurés injustifiés d'un montant de 44 030 euros en 2007 et de 35 445 euros en 2008 ; que, par un jugement du 6 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de décharge présentée par les épouxD... ; que M. D...relève appel de ce jugement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille (...). / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, d'une part, la différence de revenus, dont l'importance doit justifier la mise en oeuvre de la procédure de demande de justifications, s'entend de celle que l'administration constate avant tout examen critique des crédits qu'elle a recensés préalablement à cette mise en oeuvre, quelles que soient les justifications que le contribuable a pu spontanément apporter postérieurement à l'engagement de l'examen de situation fiscale personnelle et qui pourraient être de nature à réduire le montant des crédits sur lesquels il sera effectivement interrogé ; que, d'autre part, lorsque l'administration retient, pour démontrer l'existence d'indices sérieux de dissimulation de revenus, comme premier terme de comparaison, les crédits figurant sur des comptes bancaires mixtes retraçant indistinctement des mouvements de fonds liés à l'activité professionnelle du contribuable et des opérations étrangères à cette activité, elle doit retenir, comme deuxième terme de comparaison, non le revenu net déclaré, mais le montant brut des recettes professionnelles de l'intéressé ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le total des crédits portés sur les comptes bancaires de M. et Mme D...au titre des années 2007 et 2008 s'élevait aux sommes respectives de 44029,86 euros et 35445,14 euros alors que le montant de leurs revenus déclarés s'élevait respectivement à 15 583 euros et 156 euros ; qu'il est constant que, dans le cadre de la vérification de comptabilité de la Sarl Loire Atlantique Sécurité Service, aucune comptabilité n'a été présentée du fait de l'opposition à contrôle fiscal constatée par un procès-verbal du 18 octobre 2010 et que la société disposait de comptes bancaires professionnels distincts des comptes personnels de son associé unique M.D... ; qu'aucun élément ne permettait au service d'estimer que les comptes bancaires des époux D...sur lesquels il a effectué sa vérification auraient revêtu un caractère mixte retraçant indistinctement des mouvements de fonds liés à l'activité professionnelle du contribuable et des opérations étrangères à cette activité ; que M. D...n'apporte d'ailleurs aucun élément de preuve en ce sens ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration, pour apprécier la proportion entre les crédits constatés sur les comptes bancaires du foyer et les revenus déclarés, n'a pas retenu le montant brut de 49 776 euros des recettes professionnelles de la société Loire Atlantique Sécurité Service qu'elle avait évaluées d'office mais n'a tenu compte que du montant de 2 423 euros correspondant au bénéfice effectivement déclaré par cette société ; que l'écart ainsi constaté entre les sommes portées au crédit des comptes bancaires personnels ouverts au nom des contribuables et les revenus bruts par eux déclarés autorisait l'administration, contrairement à ce que soutient M.D..., à user de la procédure de demande de justifications prévue par l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien fondé de l'imposition :
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :
4.Considérant que si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue ; qu'il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ; que, dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ;
5. Considérant que si, pour justifier une partie des crédits bancaires mentionnés au point 3, M. D...soutient que les montants de 34 700 euros pour l'année 2007 et de 28 200 euros pour l'année 2008 correspondent à des sommes créditées sur les comptes du foyer pour rémunérer des intervenants de la société Loire Atlantique Sécurité Service, il n'apporte, en se bornant à produire deux tableaux indiquant seulement les montants et les noms des bénéficiaires, aucun élément de nature à établir l'origine des sommes ainsi créditées et l'affectation professionnelle qui en aurait été faite ; que, par suite, M. D...n'apportant pas la preuve qui lui incombe de l'exagération des impositions mises à sa charge, c'est à bon droit que l'administration a imposé les crédits en litige dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ;
En ce qui concerne l'imposition commune des époux :
6. Considérant, par ailleurs, que si M. D...soutient que c'est à tort que son épouse et lui ont fait l'objet d'une imposition distincte à compter du 20 décembre 2008, un tel moyen est inopérant à l'appui de la contestation d'une imposition supplémentaire à l'impôt sur le revenu que ne porte que sur la période allant du 1er janvier au 19 décembre 2008 au titre de laquelle M. et Mme D...ont fait l'objet d'une imposition commune ;
Sur les pénalités :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ; qu'eu égard aux circonstances rappelées ci-dessus et à l'importance des sommes encaissées par M. et Mme D...sur leurs comptes bancaires personnels au cours de deux années successives, dont ils n'ont pu expliquer ni la nature ni l'origine et dont ils ne pouvaient ignorer le versement, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que l'administration devait être regardée comme apportant la preuve lui incombant du manquement délibéré des contribuables à leurs obligations fiscales et comme ayant à bon droit appliqué aux impositions litigieuses les pénalités prévues à l'article 1729 du code général des impôts ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. D...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D..., à Mme F...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Specht, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 février 2016.
Le rapporteur,
O. COIFFETLe président,
I. PERROT
Le greffier,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00028