Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 mai 2019 Mme A..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 4 avril 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté de la préfète d'Indre-et-Loire du 11 décembre 2018 ;
3°) d'enjoindre à la préfète d'Indre-et-Loire de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors notamment qu'elle justifie d'une relation avec une compatriote en situation régulière qu'elle ne pourrait poursuivre en Algérie, pays où l'homosexualité est réprimée ;
- elle a déposé en janvier 2019 une demande d'asile qui est en cours d'examen ;
- la décision fixant l'Algérie comme pays de destination est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée à la préfète d'Indre-et-Loire qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juillet 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante algérienne née le 9 septembre 1995, est entrée en France le 21 août 2017 sous couvert d'un visa de long séjour " étudiant ". Elle a demandé, le 31 octobre 2018, le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 11 décembre 2018, la préfète d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays à destination duquel elle pourra être renvoyée d'office. Mme A... relève appel du jugement du 4 avril 2019 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. La circonstance que Mme A... a déposé une demande d'asile postérieurement à l'arrêté contesté est sans influence sur la légalité de ce dernier.
3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. Mme A..., qui est entrée en 2017 en France pour suivre des études et, selon ses dires, pour fuir son pays en raison de son homosexualité, se prévaut de sa relation de couple avec une compatriote en situation régulière. Toutefois, cette relation était très récente à la date de l'arrêté contesté puisque, selon les propres déclarations de sa compagne, la vie commune n'avait débuté que le 3 septembre 2018. En outre, il est constant que Mme A... n'a pas d'autres attaches familiales en France et que ses parents et sa soeur vivent en Algérie. Dans ces conditions, l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, contraire aux stipulations rappelées au point précédent.
5. Selon l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.".
6. Mme A... fait valoir qu'elle risque d'être maltraitée par son père en Algérie en raison de son orientation sexuelle. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'elle est volontairement retournée en Algérie en mai 2018 pour rendre visite à sa famille et qu'elle a dans ce pays une soeur et un beau-frère qui lui apportent un soutien. Par ailleurs, la circonstance que le code pénal algérien réprime l'homosexualité et que des actes homophobes sont commis en Algérie ne permet pas d'établir la réalité des risques auxquels Mme A... serait personnellement exposée en cas de retour dans ce pays. Par suite, l'arrêté contesté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme F..., présidente-assesseure,
- M. B..., premier conseiller,
- Mme Le Barbier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2019.
Le rapporteur
E. B...La présidente
N. F...
Le greffier
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT01711