Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 18 mars et 30 mai 2017 et le 18 septembre 2018 MmeD..., représentée par Me G...puis par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 19 janvier 2017 ;
2°) de condamner la commune de Marcilly-en-Gault à lui verser la somme totale de 40 000 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Marcilly-en-Gault la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la réalité des infiltrations d'eau affectant le sous-sol et les murs de sa maison depuis 2003 n'est pas contestée ; elle verse aux débats différentes attestations qui établissent que les infiltrations d'eau sont apparues après les travaux de réaménagement du centre bourg réalisés en 2003 ;
- l'hypothèse émise par l'expert judiciaire selon laquelle il s'agirait d'infiltrations d'eau de ruissellement et/ou de remontées par capillarité est peu convaincante dès lors qu'il est établi que la composition de l'eau est chimiquement identique à celle du réseau d'eau potable ; en outre l'expert n'apporte aucune élément technique permettant d'expliquer que les remontées de la nappe phréatique n'ont commencé qu'en 2003 pour s'accentuer largement après 2011 ; il n'a entrepris aucune démarche de vérification de l'état du réseau d'arrosage automatique installé en 2001 qui a pu être accidentellement endommagé en 2003 lors de l'arrachage de deux arbres pour créer des places de stationnement ;
- l'expert du cabinet Polyexpert estime que la circonstance relevée par l'expert judiciaire que le réseau d'arrosage était trop éloigné de la façade et situé à trop faible profondeur pour générer des infiltrations, ce qui expliquerait qu'il n'ait pas été contrôlé, ne suffit pas à " exonérer ledit réseau des troubles apportés à son habitation " ;
- une autre cause possible des désordres qu'elle subit, et qui tient aux travaux de reprise des réseaux publics réalisés par la société Veolia, n'a pas été envisagée par l'expert judiciaire ;
- l'expertise ayant été mal conduite, il convient d'ordonner une nouvelle expertise, concernant en particulier le réseau d'arrosage, pour lever les doutes existant sur le lien de causalité entre l'ouvrage public et les préjudices qu'elle subit ;
- le préjudice de jouissance subi par elle est établi.
Par des mémoires enregistrés les 13 juillet 2017 et 14 novembre 2018, la commune de Marcilly-en-Gault, représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme D...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coiffet,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- les observations de MeA..., substituant Me B...représentant MmeD..., et de MeF..., représentant la commune de Marcilly-en-Gault.
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., qui est propriétaire d'une maison d'habitation située aux nos 1 et 3 de la rue de l'Eglise à Marcilly-en-Gault (Loir-et-Cher) a constaté en 2011 l'existence dans la cave, au droit du mur de soubassement côté rue, d'infiltrations d'eau endommageant ce mur et les embellissements dans les pièces situées au-dessus de la cave. Estimant que ces infiltrations pouvaient avoir pour origine les travaux effectués entre 2003 et 2005 pour la commune par la société SOTRAP sur le réseau d'eau potable, d'assainissement et d'eaux pluviales, l'intéressée a sollicité du tribunal de grande instance de Blois la désignation d'un expert, qui a rendu son rapport le 19 mars 2014. Se fondant sur une autre expertise, réalisée en septembre 2014 par le cabinet Polyexpert à la demande de son assureur multirisque habitation, Mme D...a, par un courrier du 15 janvier 2016, demandé à la commune de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser les désordres et de l'indemniser de l'ensemble de ses préjudices. Le 21 janvier 2016, le maire de la commune a rejeté la réclamation de MmeD.... Cette dernière a alors saisi le tribunal administratif d'Orléans de conclusions indemnitaires dirigées contre la commune. Elle relève appel du jugement du 19 janvier 2017 par lequel cette juridiction a rejeté sa demande.
2. Le riverain d'un ouvrage public qui se plaint des dommages engendrés à raison de la présence et du fonctionnement de cet ouvrage n'est susceptible d'engager la responsabilité sans faute de la personne publique maître d'ouvrage qu'à la condition d'établir l'existence d'un préjudice anormal et spécial ainsi qu'un lien de causalité direct entre le dommage allégué et l'ouvrage. Le maître d'ouvrage ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent d'une faute de la victime ou d'un cas de force majeure.
3. MmeD..., qui recherche la responsabilité sans faute de la commune, soutient que les infiltrations qui affectent sa maison d'habitation trouvent leur origine dans les travaux de réaménagement du centre bourg réalisés en 2003 et 2005 et qui concernaient les voies, les réseaux divers et les aménagements de surface de la place de l'Eglise. Toutefois il résulte du rapport d'expertise judiciaire déposé au greffe du tribunal administratif le 19 mars 2014 que les réseaux d'eau potable et d'eaux usées de la commune ne fuient pas, que le réseau d'eaux pluviales ne présente pas d'anomalie et que le réseau d'arrosage automatique est trop éloigné de la maison de Mme D...et situé à trop faible profondeur pour être à l'origine du sinistre. L'expert en conclut que la cause des " arrivées d'eau sporadiques à des périodes non hivernales notamment " est due à des phénomènes naturels liés aux variations de niveau de la nappe phréatique. Il précise, à l'issue de son expertise dont il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce qui est avancé par la requérante, qu'elle aurait été mal conduite et insuffisamment étayée techniquement, que "dans ce secteur très humide de la Sologne, la présence de nombreux petits lacs et de fossés exploités par leur propriétaire est de nature à faire varier sensiblement le niveau des nappes situées à plusieurs centaines de mètres ". Cette analyse rejoint d'ailleurs les constatations faites dès juillet 2011 lors de l'expertise contradictoire effectuée à la demande de l'assureur de l'intéressée selon lesquelles " aucune fuite n'a été détectée sur les réseaux publics, le dommage résultant d'infiltrations d'eau de ruissellement et/ou de remontées par capillarité ".
4. Par ailleurs, les différentes attestations de son entourage versées par Mme D...aux débats, qui relèvent la présence d'infiltrations affectant le sous-sol et le mur de sa maison depuis 2003, ne permettent pas, davantage, à la requérante, qui n'a au demeurant signalé le sinistre à son assureur qu'en 2011, d'établir le lien de causalité entre la réalisation de l'opération litigieuse de réaménagement du centre bourg de la commune et les infiltrations en cause.
5. Si Mme D...se prévaut également du rapport non contradictoire établi en septembre 2014 par le cabinet Polyexpert mandaté par son assureur multirisque et qui, dans des termes assez généraux, met en cause le réseau d'arrosage municipal lequel, n'ayant pas été contrôlé, " pourrait être la cause des infiltrations ", aucun élément d'ordre technique n'est versé aux débats permettant de remettre en cause l'analyse de l'expert judiciaire qui a estimé, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, que ce réseau était trop éloigné de l'habitation de la requérante et situé à trop faible profondeur pour être à l'origine du sinistre.
6. Mme D...se réfère enfin, pour infirmer les conclusions de l'expert judiciaire, au rapport établi non contradictoirement en août 2015 par le cabinet Hydrogéologues Conseil selon lequel il ressortirait de l'examen des caractéristiques physico-chimiques des prélèvements effectués dans sa cave et de ceux des eaux du robinet " une composition correspondant à celle des eaux communales ". Toutefois, il résulte de l'instruction et ainsi que le fait valoir la commune, que la prise en compte de l'ensemble des paramètres utilisés par le cabinet Hydrogéologues Conseil ne permet pas d'établir une convergence absolue des caractéristiques physico-chimiques entre les eaux du robinet et de la cave de l'intéressée. L'autre " cause possible des désordres " évoquée, selon la requérante, par un salarié de ce cabinet et qui tiendrait aux travaux de reprise des réseaux publics communaux constitue une hypothèse qui n'est étayée par aucun élément d'ordre technique permettant de la regarder comme une cause éventuelle des remontées d'eau litigieuses.
7. Dans ces conditions, et compte tenu de l'ensemble de ce qui a été dit plus haut, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que Mme D...n'apportait pas la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre les travaux et les ouvrages publics incriminés et les préjudices subis.
8. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur les frais de l'instance :
9. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Marcilly-en-Gault, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme D...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D... la somme que la commune de Marcilly-en-Gault demande au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...C...veuve D...et à la commune de Marcilly-en-Gault.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Berthon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 décembre 2018.
Le rapporteur,
O. CoiffetLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. H...
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00946