Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 janvier 2017 et régularisée le 25 janvier 2017, Mme B..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 8 novembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 février 2015 par lequel le maire de la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle l'a licenciée ;
3°) de condamner la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle à lui verser la somme de 40 000 euros assortie des intérêts au taux légal en réparation de ses préjudices ;
4°) d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle de la réintégrer dans ses fonctions dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et est entaché de plusieurs vices de procédure ;
- c'est à tort que le maire s'est cru lié par les avis des comités médicaux ;
- elle n'est pas physiquement inapte à occuper son emploi ;
- son licenciement est une sanction déguisée qui révèle un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 avril 2018, la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°85-1054 du 30 septembre 1985 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Berthon,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., a été professeure contractuelle d'enseignement artistique et de chant lyrique au conservatoire de Saint-Jean-de-la-Ruelle (45) entre 1989 et 2005, date à laquelle elle a été titularisée. Le 13 juin 2013, le comité médical du Loiret a émis un avis d'inaptitude définitive à l'exercice de ses fonctions qui a été confirmé le 1er avril 2014 par le comité médical supérieur. Sur la base de ces avis, le maire de la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle a, par un arrêté du 18 février 2015, prononcé son licenciement pour inaptitude physique. Mme B...relève appel du jugement du 8 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant notamment à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, conformément au principe général des droits de la défense, le licenciement pour inaptitude physique d'un agent public ne peut légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de demander la communication de l'ensemble de son dossier individuel, et non de son seul dossier médical. Il ressort des pièces versées au dossier par la commune devant la cour que Mme B...a été invitée, par un courrier du 8 décembre 2014 notifié par lettre recommandée le 13 décembre 2014, à consulter son " dossier individuel dans son intégralité ". Le moyen tiré de ce que cette obligation n'aurait pas été respectée manque ainsi en fait et doit donc être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. ". L'article 2 du décret du 30 septembre 1985 prévoit que : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale ou le président du centre national de la fonction publique territoriale ou le président du centre de gestion, après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadres d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ". En vertu de ces dispositions, une autorité territoriale ne peut licencier un agent pour inaptitude physique sans l'avoir préalablement invité à présenter, s'il le souhaite, une demande de reclassement dans un autre emploi de la collectivité ou, à défaut, d'une autre collectivité.
4. Il résulte en outre d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il incombe à l'employeur public, avant de pouvoir prononcer son licenciement, de chercher à reclasser l'intéressé dans un autre emploi. La mise en oeuvre de ce principe implique que, sauf si l'agent manifeste expressément sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle, l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi si l'intéressé l'accepte. Ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions ou soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, qu'il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, son licenciement.
5. Il ressort des pièces du dossier que, préalablement à son licenciement pour inaptitude physique, Mme B...a été invitée par des courriers du 10 juillet 2013 et du 6 octobre 2014 à formuler une demande de reclassement. En réponse, elle a clairement fait savoir à son employeur, notamment par des courriers du 25 juillet 2013, 21 octobre 2014 et 19 décembre 2014, qu'elle ne souhaitait plus travailler au sein de la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle. Si elle a exprimé le souhait d'être accompagnée dans une recherche de poste en région parisienne, c'est pour occuper l'emploi de professeure d'enseignement artistique pour lequel elle avait été jugé physiquement inapte par les comités médicaux compétents. Dans ces conditions, Mme B...doit être regardée comme ayant refusé toute offre de reclassement dans un autre emploi de sa collectivité ou dans une autre collectivité. Par suite, son employeur ne peut, en tout état de cause, être regardé comme ayant méconnu son obligation de recherche de reclassement.
6. Il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des quelques certificats médicaux peu circonstanciés produits par la requérante, que le maire de la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle aurait commis une erreur d'appréciation en estimant, à la suite des avis concordant du comité médical du Loiret et du comité médical supérieur, que l'état de santé de Mme B...la rendait définitivement inapte à l'exercice de son emploi.
7. Pour le surplus, Mme B...se borne à reprendre devant le juge d'appel les mêmes moyens que ceux invoqués en première instance. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges, tirés de ce que l'arrêté contesté est suffisamment motivé, n'est pas entaché de détournement de pouvoir et que le maire de la commune qui ne s'est pas estimé lié par les différents avis médicaux a ainsi exercé effectivement sa compétence.
8. Il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par Mme B...tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 février 2015 du maire de Saint-Jean-de-la-Ruelle prononçant son licenciement pour inaptitude physique doivent être écartées ainsi que, par voie de conséquence, sa demande indemnitaire et ses conclusions à fin d'injonction.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les frais de l'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse à Mme B... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...la somme demandée au même titre par la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B...et à la commune de Saint-Jean-de-la-Ruelle.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président,
- M. Berthon, premier conseiller,
- Mme Le Bris, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 novembre 2018.
Le rapporteur,
E. BerthonLe président,
O. Coiffet
Le greffier,
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00187