Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 3 mai et 12 septembre 2016, le préfet du Loiret demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 2 février 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M.C....
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour, qui est suffisamment motivée, est régulière tant sur la forme que sur le fond ;
- les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été méconnues ;
- l'arrêté du 24 décembre 2015 n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision portant refus de titre de séjour, n'est pas illégale.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 août 2016, M. B... C..., représenté par MeA..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à l'annulation de l'arrêté contesté ;
3°) à ce qu'il soit enjoint au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder à un réexamen de sa situation, dans le même délai de deux mois et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- cet arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet s'est estimé en situation de compétence liée pour refuser un titre de séjour en qualité de salarié et a entaché l'arrêté contesté d'une erreur de droit et d'une erreur de fait ;
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant refus de titre de séjour étant illégale, la décision portant obligation de quitter le territoire français est par voie de conséquence illégale;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Gauthier a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. C..., de nationalité marocaine, est entré en France le 9 novembre 2006 muni d'un visa de long séjour, portant la mention " saisonnier " ; qu'il a bénéficié de neuf récépissés de demande de titre de séjour, délivrés par le préfet de Haute-Corse et renouvelés jusqu'au 28 février 2011 ; que par un arrêté du 24 mai 2011, ce préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que le 2 mars 2012, M. C... a demandé au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " en produisant une attestation d'embauche pour un poste d'ouvrier agricole dans une exploitation agricole située en Corse ; que par un arrêté du 7 juin 2012 le préfet du Loiret lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé de quitter le territoire français ; que le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande formée contre cet arrêté, par un jugement du 2 octobre 2012, confirmé par un arrêt du 30 janvier 2014 de la cour ; que M. C... a sollicité, le 28 mai 2015, la régularisation de sa situation administrative afin de lui permettre de travailler ; que par un arrêté du 24 décembre 2015, le préfet du Loiret lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé de quitter le territoire français ; que le préfet du Loiret relève appel du jugement du 19 avril 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer à M. C...un titre de séjour l'autorisant à travailler ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté, que M. C... réside en France de manière habituelle depuis fin 2006, soit depuis neuf ans à la date de l'arrêté contesté ; qu'il a travaillé, depuis son arrivée en France jusqu'en 2014, en Corse, en qualité d'ouvrier agricole, d'abord de manière régulière lorsqu'il a été muni de récépissés, jusqu'en 2011, puis de manière irrégulière, comme en attestent les remises de chèque versées aux débats ; qu'à l'appui de sa demande de titre de séjour, il a produit une promesse d'embauche pour un emploi de manoeuvre ; que de nombreux membres de sa famille résident en France, en particulier son père, ses trois frères et une soeur, tous en situation régulière ; qu'il justifie, par ailleurs, d'une vie commune avec MmeE..., de nationalité française, depuis septembre 2015 ; que, dans ces conditions, eu égard notamment à la durée de sa présence en France et à son intégration professionnelle, l'arrêté du 24 décembre 2015 du préfet du Loiret est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Loiret n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté contesté ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
4. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit le tribunal administratif d'Orléans a enjoint au préfet du Loiret de délivrer à M. C...un titre de séjour autorisant celui-ci à travailler ; qu'ainsi, le présent arrêt qui rejette la requête du préfet n'implique d'ordonner aucune nouvelle mesure d'exécution ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet du Loiret est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. C...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. C...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président,
- M. Gauthier, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 avril 2017.
Le rapporteur,
E. GauthierLe président,
O. Coiffet
Le greffier,
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT01422