Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 février 2020 M. C..., représenté par
Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 17 septembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Loiret du 26 mars 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale " ou, subsidiairement " étudiant " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Il soutient que :
- le préfet du Loiret était tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- c'est à tort que le préfet du Loiret a, d'une part, estimé que le métier de préparateur de commande n'était pas en tension et, d'autre part, écarté l'expérience professionnelle qu'il a acquise dans la spécialité recherchée durant sa période de formation universitaire ; les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du 1° de l'article R. 5221-20 du code du travail ont donc été méconnues ;
- c'est également à tort que le préfet a estimé qu'il ne justifiait pas du caractère réel et sérieux de ses études et ne pouvait donc pas prétendre au renouvellement de son titre de séjour " étudiant ", dès lors qu'il justifie de circonstances particulières ayant fait obstacle à sa réussite aux examens ;
- au regard de la présence en France d'une partie de sa famille, de sa très bonne insertion dans la société française et des risques personnels qu'il encoure en cas de retour en République centrafricaine, le préfet du Loiret a également méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour qui lui a été opposé.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 août 2020 le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 janvier 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant centrafricain né le 13 février 1981, est entré en France le 26 septembre 2015 sous couvert d'un visa de long séjour " étudiant ". Il a demandé, le
6 novembre 2018 un titre de séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 26 mars 2019, le préfet du Loiret a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. M. C... relève appel du jugement du 17 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté son recours tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. L'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable dispose : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". (...) / L'étranger se voit délivrer l'une des cartes prévues aux 1° ou 2° du présent article sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement de l'article L. 5221-2 du code du travail lorsque sa demande concerne un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives (...) ". Aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " (...)le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; Lorsque la demande concerne un étudiant ayant achevé son cursus sur le territoire français cet élément s'apprécie au regard des seules études suivies et seuls diplômes obtenus en France ; (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que le 1° de l'article R. 5221-20 du code du travail n'est pas opposable à un étranger ayant sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " lorsque le métier que celui-ci envisage d'exercer figure sur la liste des métiers dits " en tension " établie par l'autorité administrative compétente. Il s'en déduit également que la circonstance que le métier auquel l'étranger postule n'est pas en tension ne suffit pas à rejeter sa demande.
4. A l'expiration de son titre de séjour en qualité d'étudiant, M. C... a demandé la délivrance d'une carte de séjour en qualité de salarié sur le fondement des dispositions du
1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en se prévalant d'un contrat à durée indéterminée signé le 1er octobre 2018 avec la société Movianto France pour occuper un poste de préparateur de commandes. Le préfet du Loiret a rejeté sa demande au motif que ce métier n'était pas un métier en tension et que les activités salariées " exercées à titre accessoire " par le requérant pendant ses études et sans lien avec celles-ci ne pouvaient être prises en compte au titre de l'adéquation entre son expérience professionnelle et les caractéristiques du métier de préparateur de commandes.
5. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 3, le préfet du Loiret ne pouvait refuser à M. C... la carte de séjour temporaire qu'il sollicitait au motif que le métier qu'il souhaitait exercer n'était pas en tension. Toutefois, dans ses écritures de première instance, le préfet a demandé la substitution de ce motif par celui tiré de ce que l'employeur de M. C... n'avait fait aucune démarche auprès du service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail. Il ressort en effet des pièces du dossier que la société Movianto France, qui avait déjà employé M. C... dans le cadre de missions d'intérim et souhaitait le recruter, n'a engagé aucune démarche pour s'assurer de l'existence ou non d'un autre candidat déjà présent sur le marché du travail. Par ailleurs, M. C... n'établit pas, comme il le soutient, que la croissance continue de l'activité de son employeur aurait fait obstacle à l'engagement d'une démarche de recrutement externe. Le nouveau motif avancé par le préfet du Loiret est donc fondé et peut être substitué au motif erroné, dès lors que cette substitution n'a pas pour effet de priver le requérant d'une garantie et que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était initialement fondée sur le motif substitué.
6. En deuxième lieu, il résulte des dispositions du 2° de l'article R. 5221-20 du code du travail que lorsque la demande d'autorisation de travail émane d'un étranger ayant achevé ses études en France, l'adéquation entre les caractéristiques de l'emploi auquel il postule et son expérience professionnelle s'apprécie au regard des seules études suivies et seuls diplômes obtenus en France. Par suite, et dès lors que l'emploi de préparateur de commandes pour lequel M. C... a postulé est sans lien avec ses études en France dans le domaine de l'informatique et des langues étrangères, c'est à bon droit que le préfet du Loiret a refusé de tenir compte de l'expérience professionnelle du requérant dans ce secteur d'activité.
7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6 que le préfet du Loiret n'a pas fait une inexacte application des dispositions citées au point 2 en refusant de délivrer à M. C... l'autorisation de travail qu'il sollicitait.
8. Pour le surplus, M. C... se borne à reprendre devant le juge d'appel les mêmes moyens et les mêmes arguments que ceux invoqués en première instance, tirés de ce que l'arrêté contesté serait entaché d'une erreur d'appréciation du caractère réel et sérieux de ses études en France, aurait méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et du vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges et, par voie de conséquence, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement serait privée de base légale.
9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre
- M. A..., premier conseiller,
- Mme Le Barbier, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 décembre 2020.
Le rapporteur
E. A...Le président
I. Perrot
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT00688