Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 février 2020 Mme D..., représentée par
Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 26 novembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 19 juin 2018 du préfet des Côtes-d'Armor ;
3°) d'enjoindre au préfet des Côtes-d'Armor de lui délivrer une carte de résident dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Elle soutient que :
- la décision contestée est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;
- cette décision est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article L. 314-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 314-8 du même code, dès lors qu'elle justifie de ressources suffisantes.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 mai 2020 le préfet des Côtes-d'Armor conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante russe, relève appel du jugement du 26 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 juin 2018 du préfet des Côtes-d'Armor lui refusant la délivrance d'une carte de résident.
2. La décision contestée refusant la délivrance d'une carte de résident à
Mme D... comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est ainsi suffisamment motivée. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Côtes-d'Armor, qui a notamment pris en compte les revenus de l'intéressée tant sur la période des cinq années précédant sa demande que sur la période contemporaine de sa décision, n'aurait pas procédé, préalablement à l'édiction de sa décision, à un examen particulier de la situation de la requérante.
3. Pour refuser de délivrer à Mme D... la carte de résident qu'elle avait sollicitée, le préfet des Côtes-d'Armor s'est fondé sur la seule insuffisance de ses ressources. Dès lors, l'intéressée ne saurait utilement se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 314-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient une saisine préalable du maire de la commune dans laquelle réside l'étranger pour avis sur son intégration républicaine dans la société française. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que le moyen manque en fait.
4. Aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " est délivrée de plein droit à l'étranger qui justifie : (...) / 2° De ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur, indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles ainsi qu'aux articles L. 5423-1, L. 5423-2 et L. 5423-3 du code du travail. La condition prévue au présent 2° n'est pas applicable lorsque la personne qui demande la carte de résident est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code (...) ". Aux termes de l'article R. 314-1-1 du même code : " L'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " doit justifier qu'il remplit les conditions prévues aux articles L. 314-8, L. 314-8-1 ou L. 314-8-2 en présentant, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 314-1, les pièces suivantes : (...) / 2° La justification qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations et des allocations mentionnées au 2° de l'article L. 314-8, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande, par référence au montant du salaire minimum de croissance ; lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes ou ne sont pas stables et régulières pour la période des cinq années précédant la demande, une décision favorable peut être prise, soit si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit, soit en tenant compte de l'évolution favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme D..., qui ne justifie que de quelques formations rémunérées au cours de la période de cinq ans précédant sa demande, ne dispose pas de ressources propres stables et régulières au moins égales au salaire minimum de croissance et qu'ainsi elle ne remplit pas la condition de ressources pour pouvoir bénéficier de plein droit de la délivrance d'une carte de résident en application des dispositions précitées de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si l'intéressée fait valoir qu'elle a travaillé quelques jours au mois de juin 2018 et que son époux occupe notamment, depuis le mois de mai 2013, un emploi à temps plein lui procurant une rémunération brute mensuelle d'environ 1 500 euros, il ressort toutefois des pièces du dossier, alors que les justificatifs produits ne couvrent pas l'intégralité de la période considérée en ce qui concerne la rémunération de son époux, que ce dernier a été admis au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à la suite de la perte de son emploi en juin 2017. Dans ces conditions, alors même que l'intéressée justifie avoir obtenu en juin 2013 le diplôme d'études en langue française de niveau 2, le préfet des Côtes-d'Armor a pu, sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, refuser de délivrer à Mme D... une carte de résident.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E..., épouse D..., et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Côtes-d'Armor.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président,
- Mme C..., président-assesseur,
- Mme Le Barbier, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 novembre 2020
Le rapporteur
C. C...
Le président
I. Perrot
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20NT004242