Procédure devant la cour :
Par une requête et des productions enregistrées les 17 janvier, 4 juin, 17 décembre et
29 décembre 2020 M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 janvier 2020 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 octobre 2019 du préfet du Finistère ;
2°) d'annuler cet arrêté du 8 octobre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;
- cet arrêté méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 et celles de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet n'a pas précisé le pays de destination ;
- il n'a pas procédé à un examen de sa situation avant de prendre une décision fixant le pays de renvoi.
Par des mémoires en défense enregistrés les 28 mai et 8 juin 2020 le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... sont infondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant ivoirien déclarant être né le 29 décembre 2000, est entré en France le 18 janvier 2016, et a été confié provisoirement aux services de l'aide sociale à l'enfance par un jugement du tribunal de grande instance de Quimper du 19 janvier 2016. Cette prise en charge a été renouvelée jusqu'à la majorité de l'intéressé par un jugement du tribunal des enfants du 1er février 2016. Le 8 janvier 2019, M. D... a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale sur le fondement des dispositions du 2 bis et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou celle d'un titre de séjour portant la mention salarié ou travailleur temporaire sur le fondement de l'article L. 313-10 du même code. Par un arrêté du 8 octobre 2019 le préfet du Finistère a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Rennes, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de M. D... dirigées contre la décision implicite par laquelle le préfet du Finistère a rejeté sa demande de titre de séjour, a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 octobre 2019.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Rennes a répondu de façon suffisante aux différents moyens contenus dans les écritures de M. D.... Contrairement à ce qu'il soutient, l'intéressé n'a pas soulevé en première instance le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce jugement satisfait ainsi aux exigences de motivation posées par l'article L. 9 du code de justice administrative. Dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une insuffisance de motivation entachant sa régularité doit être écarté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. En premier lieu, si M. D... invoque en appel la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est constant qu'il n'a pas demandé un titre de séjour sur ce fondement et que le préfet ne s'est pas fondé sur cet article pour rejeter sa demande de titre de séjour. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, dès lors, être écarté comme inopérant.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) / 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée ; ".
5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification des actes d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. (...). ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ".
6. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger et rédigé dans les formes usitées dans le pays concerné peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact et notamment par les données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé Visabio, qui sont présumées exactes. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.
7. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de sa demande de titre de séjour, M. D... a présenté un extrait d'acte de naissance et un passeport au vu desquels il serait né le 29 décembre 2000 à Bouaké. La consultation du fichier Visabio, prévue à l'article L. 611-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a, toutefois, permis au préfet du Finistère de constater, en se fondant sur la correspondance des empreintes digitales, que l'intéressé avait présenté le 17 octobre 2013 auprès du consulat de France à Abidjan une demande de visa, à l'occasion de laquelle il avait déclaré être né le 23 avril 1992, et avait produit un passeport auprès de ces autorités. En application de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de l'article 47 du code civil auquel il renvoie, le préfet, qui produit la fiche d'identification émise par le système Visabio qui comporte la photographie de l'intéressé, en a déduit que les documents produits par M. D... à l'appui de sa demande de titre de séjour étaient entachés de fraude, et ne pouvaient par suite être regardés comme faisant foi.
8. Si le requérant produit un certificat de nationalité ivoirienne, ce document, au demeurant dépourvu de photographie, n'est pas, en l'espèce, de nature à justifier de son identité dès lors qu'établi en 2016, il l'a été par référence à une carte nationale d'identité délivrée le 23 juin 2009 dont la copie n'est pas produite. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'extrait d'acte de naissance produit par M. D... lors de sa demande de titre de séjour a été examiné par les services de la direction zonale de la police aux frontières qui ont relevé que ce document ne comportait pas toutes les mentions exigées par le code civil ivoirien et ne respectait pas les formes prévues par ce code. En outre, si M. D... produit un nouvel acte de naissance établi le 23 décembre 2020 par l'officier d'état civil de Bouaké sur le fondement d'un jugement rendu le 14 décembre 2020 par le tribunal de cette ville, ce nouvel acte de naissance ne remédie qu'incomplètement aux anomalies relevées par la police aux frontières. Dans ces conditions, le préfet du Finistère n'a pas commis d'erreur d'appréciation en qualifiant de frauduleux les documents présentés par l'intéressé.
9. En troisième lieu, si M. D... a, le 11 mai 2020, reconnu par anticipation, l'enfant à naître de Mme B... C..., il ressort des pièces du dossier que les intéressés n'ont jamais vécu ensemble et que les attestations de tiers, peu circonstanciées, ne sont pas de nature à établir l'intensité des liens unissant le requérant et sa compagne. Alors même que cette reconnaissance n'aurait pas été souscrite dans le seul but de faciliter l'obtention par l'intéressé d'un titre de séjour, la production de ce document ne saurait suffire à remettre en cause les éléments retenus par les premiers juges au point 8 du jugement pour écarter les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Enfin, le requérant se borne à reprendre en appel sans autre précision les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'absence de mention du pays de destination dans l'arrêté contesté et de l'absence d'examen de sa situation avant l'édiction de la décision fixant le pays de destination. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
11. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme E..., rapporteur
- M. Berthon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 janvier 2021.
Le rapporteur
C E...
Le président
I. Perrot
Le greffier,
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No 20NT001642