Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 février 2019 M. et Mme F..., représentés par Me A..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du président du tribunal administratif de Rennes du 21 février 2019 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet du Finistère du 28 janvier 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer leur situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard et, dans l'attente, de leur délivrer des autorisations provisoires de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à leur conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé et révèle un défaut d'examen de leur situation particulière ;
- il porte une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5° de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 ;
- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et les dispositions du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 ainsi que le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 septembre 2019 le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme F... ne sont pas fondés.
M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 février 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme F..., ressortissants algériens, sont entrés en France le 3 juillet 2017. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 mai 2018, confirmées le 28 novembre 2018 par la Cour nationale du droit d'asile. Par des arrêtés du 28 janvier 2019, le préfet du Finistère les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être renvoyés d'office. M. et Mme F... relèvent appel du jugement du 21 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...). "
3. Comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Rennes, la circonstance que le rejet de la demande d'asile formée par M. et Mme F... serait infondé est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité des arrêtés contestés.
4. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précitées ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. et Mme F... se prévalent notamment de la présence à leurs côtés de leurs quatre enfants mineurs, tous scolarisés, et de nombreux témoignages de soutien attestant de leur volonté de s'insérer dans la société française. Toutefois, ils résidaient en France depuis moins de deux ans à la date des arrêtés contestés et n'établissent pas être dans l'impossibilité de reformer leur cellule familiale avec leurs enfants mineurs en Algérie, où ils ont vécu l'essentiel de leur vie et où ils ne justifient pas être sans attaches privées et familiales. Dans ces conditions, les arrêtés contestés n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, contraire aux stipulations rappelées au point précédent.
6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux doits de l'enfant : " Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants de M. et Mme F... se trouveraient empêchés de rentrer en Algérie avec leurs parents et d'y être scolarisés. Par suite, les arrêtés contestés n'ont pas méconnu les stipulations précitées.
8. Pour le surplus, M. et Mme F... se bornent à reprendre devant le juge d'appel les mêmes moyens et les mêmes arguments que ceux invoqués en première instance, tirés de ce que les arrêtés contestés sont insuffisamment motivés, que le préfet n'a pas procédé à un examen de leur situation particulière, que M. F... avait l'intention de déposer un demande de titre de séjour en raison de son état de santé, que le préfet a méconnu les dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F... et Mme B... F... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre
- M. C..., premier conseiller,
- Mme Le Barbier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 novembre 2019.
Le rapporteur
E. C...Le président
I. Perrot
Le greffier
M. E...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT00776