Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 avril 2015 et le 26 mai 2016, M. B...D..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 27 novembre 2014 ;
2°) d'annuler la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Bretagne, Basse-Normandie et Pays de la Loire rejetant son recours préalable formé le 24 janvier 2014 contre la décision du 20 janvier 2014 du président de la commission de discipline du centre pénitentiaire d'Alençon-Condé-sur-Sarthe lui infligeant la sanction de sept jours de cellule disciplinaire ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le sens des conclusions du rapporteur public, mis en ligne la veille de l'audience, qui se bornait à mentionner le rejet de sa demande sans autre motivation, ne répond pas aux exigences de l'article R. 711-3 du code de justice administrative ; que cette circonstance qui méconnaît le droit à un procès équitable entache d'irrégularité le jugement attaqué ;
- le jugement attaqué est également entaché d'irrégularité aux motifs que le tribunal administratif a omis de statuer sur les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 57-7-13 du code de procédure pénale, du caractère incomplet du rapport d'enquête et du défaut de motivation de la sanction ;
- le compte-rendu d'incident, qui n'indique pas par quel agent il a été établi, ne permet pas de vérifier que son auteur est compétent au sens des dispositions de l'article R. 57-7-13 du code de procédure pénale ;
- la signature figurant sur le rapport d'enquête est illisible, en méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- le rapport d'enquête, qui ne comporte aucun élément recueilli auprès des services de l'établissement, ni des services de l'établissement, ni du service pénitentiaire d'insertion et de probation et ne fait référence à aucun élément de personnalité, est incomplet ;
- il n'a pas été en mesure de vérifier la composition de la commission de discipline avant qu'elle ne se tienne ; la commission de discipline était irrégulièrement composée ; aucune mention n'apparaît quant à la présence de deux assesseurs ainsi que le prévoit l'article R. 57-7-6 du code de procédure pénale ; il n'est pas démontré que l'auteur du compte-rendu d'incident ou du rapport d'enquête n'a pas siégé en tant qu'assesseur ; il n'est pas possible de vérifier si les assesseurs ont été désignés par le président de la commission de discipline ainsi que le prévoit l'article R. 57-7-8 du même code ; les désignations en qualité d'assesseur doivent être portées à la connaissance des détenus en application de l'article R. 57-7-12 du code de procédure pénale ;
- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'était pas applicable à la procédure discipline en établissement pénitentiaire ; la sanction revêt un caractère pénal au sens de la convention et la nature administrative de l'autorité disciplinaire, auteur de la sanction contestée, ne fait pas obstacle à l'application des stipulations de cet article de la convention ; la procédure disciplinaire méconnaît le droit à un procès équitable protégé par les stipulations des articles 6-1 de la convention internationale de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles 41 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- les dispositions de l'article R. 57-7-16 du code de procédure pénale ont été méconnues ; il n'a pas été mis en mesure de consulter son dossier au moins 24 heures avant sa comparution devant la commission de discipline ;
- la décision de sanction n'est pas suffisamment motivée ;
- le refus de se voir notifier une décision de placement à l'isolement ne saurait être qualifié de refus de se soumettre à une mesure de sécurité au sens de l'article R. 57-72-2 du code de procédure pénale ; cette disposition méconnaît l'objectif constitutionnel de clarté et d'intelligibilité de la norme et les stipulations de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; la sanction n'était pas expressément et clairement prévue par la loi pénale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2016, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. B...D...n'est fondé.
Par une ordonnance du 19 avril 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 19 mai 2016 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Par ordonnance du 19 mai 2016, la clôture d'instruction a été reportée au 30 juin 2016 à 12h00.
M. B...D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 mars 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de procédure pénale ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 désormais codifiée par le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lemoine,
- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.
1. Considérant que M. B...D..., incarcéré depuis le 7 mars 2003 et détenu, entre le 12 juin 2013 et le 25 février 2014, au centre pénitentiaire d'Alençon-Condé-sur-Sarthe, a fait l'objet d'un compte-rendu d'incident le 17 janvier 2014 indiquant qu'il a refusé d'être reçu en audience par l'officier chef de bâtiment afin de se voir notifier son placement à l'isolement, a refusé d'obtempérer et de se rendre au quartier d'isolement à la demande du surveillant qui s'est présenté dans sa cellule ; qu'à la suite d'un rapport d'enquête rédigé le jour même, la commission de discipline s'est réunie le 20 janvier 2014 et a prononcé à son encontre, ce même jour, une sanction de sept jours de cellule disciplinaire ; que M. B...D...a présenté un recours préalable auprès du directeur interrégional des services pénitentiaires de Bretagne, Basse-Normandie et Pays de la Loire qui a implicitement confirmé la sanction disciplinaire initiale ; que l'intéressé relève appel du jugement du 27 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort du relevé de l'application Sagace que, préalablement à l'audience qui s'est tenue le 13 novembre 2014, le sens des conclusions du rapporteur public a été porté à la connaissance des parties avec la mention " rejet au fond " ; que le rapporteur public n'était pas tenu, à peine d'irrégularité du jugement, d'indiquer les motifs qui le conduisaient à proposer cette solution de rejet ; que, par suite, M. B...D...n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article R. 711-3 du code de justice administrative et que le droit à un procès équitable auraient été méconnus ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que si M. B...D...soutient que le tribunal administratif a " eu une lecture, à tout le moins, partielle des pièces fournies " dans le cadre de l'examen des moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 57-7-13 du code de procédure pénale et du caractère incomplet du rapport d'enquête, cette argumentation est relative au bien-fondé du jugement attaqué et non pas à sa régularité ; qu'il en va de même du moyen tiré de l'erreur de droit commise selon lui par les premiers juges ; que le moyen tiré de la dénaturation des faits ne relève pas de l'office du juge d'appel mais de celui du juge de cassation ;
4. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. B...D..., les premiers juges ont répondu au point 12 du jugement attaqué au moyen, au demeurant inopérant, tiré de l'insuffisance de motivation de la décision prise le 20 janvier 2014 par le président de la commission de discipline ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'une omission à statuer ;
Sur la légalité externe de la décision contestée du directeur interrégional des services pénitentiaires de Bretagne, Basse-Normandie et Pays de la Loire :
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-13 du code de procédure pénale : " En cas de manquement à la discipline de nature à justifier une sanction disciplinaire, un compte rendu est établi dans les plus brefs délais par l'agent présent lors de l'incident ou informé de ce dernier. L'auteur de ce compte rendu ne peut siéger en commission de discipline. " ; qu'aux termes de l'article R. 57-6-9 du code de procédure pénale : " (...) L'autorité compétente peut décider de ne pas communiquer à la personne détenue, à son avocat ou au mandataire agréé les informations ou documents en sa possession qui contiennent des éléments pouvant porter atteinte à la sécurité des personnes ou des établissements pénitentiaires " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le compte-rendu d'incident dressé le 17 janvier 2014, dans sa version non expurgée, produite en première instance par le garde des Sceaux, ministre de la justice, mentionne l'identité de son rédacteur, lequel n'a pas siégé à la commission de discipline ; que l'établissement pénitentiaire pouvait régulièrement, au cours de la procédure disciplinaire, décider de rendre anonyme ce document afin de protéger la sécurité de son auteur ; que M. B...D..., présent lors de la commission de discipline, a été en mesure de constater que l'auteur de ce compte-rendu d'incident, nécessairement présent lors des faits en cause, n'était pas présent lors de la séance de la commission de discipline réunie le 20 janvier 2014 ; que, dans ces conditions, M. B...D...n'est pas fondé à soutenir que la procédure disciplinaire serait irrégulière au motif que le nom du surveillant rédacteur du compte-rendu d'incident a été occulté dans le document qui lui a été remis au cours de cette procédure ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-14 du code de procédure pénale, " A la suite de ce compte rendu d'incident, un rapport est établi par un membre du personnel de commandement du personnel de surveillance, un major pénitentiaire ou un premier surveillant et adressé au chef d'établissement. Ce rapport comporte tout élément d'information utile sur les circonstances des faits reprochés à la personne détenue et sur la personnalité de celle-ci. L'auteur de ce rapport ne peut siéger en commission de discipline. " ;
8. Considérant que si M. B...D...soutient que la signature figurant dans le rapport d'enquête établi par le premier surveillant Bonnefon est illisible, ce rapport ne constitue pas une décision au sens de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 alors applicable et aujourd'hui codifié à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ; qu'au demeurant, ce document comporte des mentions permettent d'identifier clairement son auteur et sa qualité ; que, par ailleurs, le rapport d'enquête précise les faits reprochés à l'intéressé, rapporte ses déclarations, mentionne les antécédents disciplinaires et comporte des éléments d'appréciation sur son comportement général en détention ; que son contenu satisfait ainsi aux exigences de l'article R. 57-7-14 du code de procédure pénale quand bien même certaines rubriques du formulaire n'auraient pas été renseignées ; que c'est, par suite, à juste titre que les premiers juges ont rejeté le moyen tiré de la " nullité du rapport d'enquête ", sans qu'il puisse leur être reproché d'avoir fait référence, au demeurant à une seule reprise, au " compte-rendu d'incident ", mention qui relève d'une simple erreur matérielle ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-6 du code de procédure pénale : " La commission de discipline comprend, outre le chef d'établissement ou son délégataire, président, deux membres assesseurs. " ; qu'aux termes de l'article R. 57-7-7 du même code : " Les sanctions disciplinaires sont prononcées, en commission, par le président de la commission de discipline. Les membres assesseurs ont voix consultative. " ; que l'article R. 57-7-8 du même code dispose enfin que : " Le président de la commission de discipline désigne les membres assesseurs. / Le premier assesseur est choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement. / Le second assesseur est choisi parmi des personnes extérieures à l'administration pénitentiaire qui manifestent un intérêt pour les questions relatives au fonctionnement des établissements pénitentiaires, habilitées à cette fin par le président du tribunal de grande instance territorialement compétent. La liste de ces personnes est tenue au greffe du tribunal de grande instance. " ;
10. Considérant qu'il résulte des mentions inscrites au registre de tenue de la commission de discipline, devant laquelle M. B...D...a comparu, que le 20 janvier 2014 à 14h30 ont siégé la directrice adjointe de l'établissement, qui disposait d'une délégation du 24 mai 2013 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Orne du 27 mai 2013, un surveillant et un assesseur extérieur habilité à cet effet par ordonnance du président du tribunal de grande instance d'Alençon du 18 février 2014 ; que, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 57-7-14 du code de procédure pénale, aucun de ces membres n'est l'auteur du compte-rendu d'incident ou du rapport d'enquête ; qu'aucune disposition législative ou règlementaire, et notamment pas les dispositions précitées de l'article R. 57-7-12 du code de procédure pénale invoquées par M. B...D..., n'impose que la désignation des assesseurs fasse l'objet d'une mesure de publicité préalable auprès du détenu afin que celui-ci puisse notamment en contester la composition ;
11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Droit à un procès équitable. 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) " ; qu'aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : / le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ; qu'aux termes de l'article 47 de la même charte : " Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l'Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article. / Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter. / Une aide juridictionnelle est accordée à ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, dans la mesure où cette aide serait nécessaire pour assurer l'effectivité de l'accès à la justice " ; qu'aux termes de l'article 51 de la même charte : " Champ d'application 1. Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions et organes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union (...) " ;
12. Considérant, d'une part, que M. B...D...ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations des articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce, en application des stipulations précitées de l'article 51 de la même charte, l'administration pénitentiaire ne mettant pas en oeuvre, en la matière, le droit de l'Union européenne ;
13. Considérant, d'autre part, que les sanctions disciplinaires pouvant être infligées aux détenus ne constituent pas des accusations en matière pénale au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elles sont des mesures de sûreté et non des peines relevant d'incriminations pénales d'interprétation stricte ; que, si elles peuvent être regardées comme portant sur des contestations sur des droits à caractère civil au sens des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6, la nature administrative de l'autorité prononçant les sanctions disciplinaires fait obstacle à ce que les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de même que celles de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, soient applicables à la procédure disciplinaire dans les établissements pénitentiaires ;
14. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-16 du code de procédure pénale : " En cas d'engagement des poursuites disciplinaires, les faits reprochés ainsi que leur qualification juridique sont portés à la connaissance de la personne détenue. Le dossier de la procédure disciplinaire est mis à sa disposition. / La personne détenue est informée de la date et de l'heure de sa comparution devant la commission de discipline ainsi que du délai dont elle dispose pour préparer sa défense. Ce délai ne peut être inférieur à vingt-quatre heures. / Elle dispose de la faculté de se faire assister par un avocat de son choix ou par un avocat désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats et peut bénéficier à cet effet de l'aide juridique. (...) " ;
15. Considérant que M. B...D...n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause la mention portée sur le bordereau de remise de pièces de la procédure disciplinaire attestant qu'il a pu consulter son dossier disciplinaire le 18 janvier 2014 à 19 heures, soit en temps utile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration pénitentiaire aurait fait obstacle à ce que l'intéressé contacte l'avocat de son choix et puisse s'entretenir avec lui avant la réunion de la commission de discipline ; que, par suite, le principe du contradictoire n'a pas été méconnu ;
16. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale : " La personne détenue qui entend contester la sanction prononcée à son encontre par la commission de discipline doit, dans le délai de quinze jours à compter du jour de la notification de la décision, la déférer au directeur interrégional des services pénitentiaires préalablement à tout recours contentieux. Le directeur interrégional dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception du recours pour répondre par décision motivée. L'absence de réponse dans ce délai vaut décision de rejet " ; qu'il résulte de ces dispositions que la décision, même implicite, du directeur interrégional des services pénitentiaires, arrête définitivement la position de l'administration, avec les mêmes garanties procédurales pour le destinataire, et se substitue ainsi à la sanction initiale prononcée par le chef d'établissement ou son délégataire ; que M. B...D..., qui n'allègue pas même avoir sollicité la communication des motifs de la décision implicite ou que cette communication lui aurait été refusée, ne peut dès lors utilement invoquer le moyen tiré du défaut de motivation de la décision en date du 20 janvier 2014 prononcée par le président de la commission de discipline du centre pénitentiaire d'Alençon-Condé-sur-Sarthe, qui, en tout état de cause, est propre à cette dernière et a nécessairement disparu avec elle ;
Sur la légalité interne de la décision contestée du directeur interrégional des services pénitentiaires de Bretagne, Basse-Normandie et Pays de la Loire :
17. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-2 du code de procédure pénale : " Constitue une faute disciplinaire du deuxième degré le fait, pour une personne détenue : (...) 5° De refuser de se soumettre à une mesure de sécurité définie par une disposition législative ou réglementaire, par le règlement intérieur de l'établissement pénitentiaire ou par toute autre instruction de service " ; que, contrairement à ce qui est soutenu, la rédaction de cette disposition suffisamment claire, ne méconnaît pas l'objectif de valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la norme ; que ces dispositions, relatives à une sanction administrative, ne constituant pas une peine au sens de la loi pénale, M. B...D...n'est pas fondé à soutenir que le refus de signer une décision de placement à l'isolement d'office n'entrerait pas dans le champ du 5° de l'article R. 57-7-2 précité du fait du principe d'interprétation stricte de la loi pénale et que la décision en litige serait entachée d'une erreur de droit ; que le moyen tiré de ce que cette disposition méconnaîtrait les stipulations de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, doit, en tout état de cause, être écarté ;
18. Considérant, en second lieu, que M. B...D...soutient qu'il a uniquement refusé de se voir notifier son placement à l'isolement et non d'exécuter une telle mesure de sorte que les faits en cause ne pouvaient être qualifiés de refus de se soumettre à une mesure de sécurité ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le 17 janvier 2014, à 10h00, l'intéressé a refusé de se déplacer dans le bureau du lieutenant pénitentiaire afin de se voir notifier une décision de placement à l'isolement par mesure de sécurité et, lorsque l'agent s'est déplacé dans sa cellule, a également refusé de déférer à l'ordre de se rendre au quartier d'isolement ; que, contrairement à ce qu'il soutient, ce comportement constitue bien un refus de se soumettre à une mesure de sécurité au sens des dispositions précitées du 5° de l'article R. 57-7-2 du code de procédure pénale ; que le moyen tiré de l'erreur de droit doit, par suite, être écarté ;
19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :
20. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. B...D...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...D...et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Gauthier, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique le 31 mars 2017.
Le rapporteur,
F. Lemoine
Le président,
O. Coiffet
Le greffier,
M. E...
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT01369