Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2015, M. A... D..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 12 décembre 2014 ;
2°) d'annuler la décision de l'OFPRA du 18 janvier 2013 ;
3°) d'enjoindre à l'OFPRA de lui accorder le statut d'apatride dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard;
4°) de mettre à la charge de l 'Etat la somme de 2 300 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, moyennant la renonciation de ce dernier à percevoir la contribution de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irégulier car entaché d'une insuffisance de motivation ;
- les premiers juges, en admettant comme le soutient le directeur général de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides, qu'il peut se prévaloir de la nationalité russe alors qu'aucun élément n'établit qu'il aurait vécu pendant toutes ces années en Russie et qu'il justifie ne pas pouvoir obtenir la nationalité russe, a commis une erreur de fait, une erreur de droit, et une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2015, le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de M. A... D...une somme de 500 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. A... D...n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention de New-York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides publiée par le décret n° 60-1066 du 4 octobre 1960 ;
- la loi n° 1948-1 du 28 novembre 1991 relative à la nationalité de la Fédération de Russie, ensemble la loi n°62-FZ du 31 mai 2002 ;
- la loi arménienne sur la nationalité du 24 novembre 1995 modifiée en dernier lieu le 8 décembre 2011 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
1. Considérant que M. A...D..., qui déclare être né le 30 août 1971 en Azerbaïdjan de parents arméniens, a rejoint la France en décembre 2004 afin d'y solliciter l'asile auprès de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides (OFPRA); que, par la décision du 26 avril 2005, cette même autorité a rejeté sa demande et sa décision a été confirmée par la Commission de recours des réfugiés le 14 octobre 2005 ; que sa nouvelle demande en vue d'obtenir le statut de réfugié a fait l'objet d'un nouveau refus de l'OFPRA le 27 mai 2008, confirmé par la cour nationale du droit d'asile le 16 juillet 2010 ; que M. D...a alors saisi l'OFPRA d'une demande de reconnaissance de son apatridie, qui a fait l'objet d'un rejet par décision du directeur général de l'OFPRA du 18 janvier 2013 ; que par la présente requête, l'intéressé relève appel du jugement du 12 décembre 2014 par lequel le Tribunal de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides : " (...) Le terme apatride désigne une personne qu'aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation (...) " ; qu'il incombe à toute personne se prévalant de cette qualité d'apporter la preuve qu'en dépit de démarches répétées et assidues, l'Etat de la nationalité duquel elle se prévaut a refusé de donner suite à ses démarches ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi la loi n° 1948-1 du 28 novembre 1991 relative à la nationalité de la Fédération de Russie, modifiée par la loi n°62-FZ du 31 mai 2002 : " sont reconnus citoyens de la Fédération de Russie tous les citoyens de l'ex-URSS résidant en permanence sur le territoire de la Fédération de Russie au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi si, dans l'année qui suit, ils ne déclinent pas cette nationalité " ; qu'en vertu de ces dispositions, sont reconnus comme citoyens de cette Fédération tous les anciens soviétiques qui résidaient en permanence sur le territoire de la Fédération de Russie à la date de l'entrée en vigueur de cette loi, soit le 6 février 1992, sauf si, dans un délai d'un an à compter de cette date, ils ont expressément décliné cette nationalité ; que par une décision n°5-VO2-250/249 du 31 octobre 2002, la Cour suprême de Russie a estimé que cette reconnaissance de la nationalité russe ne requiert ni démarche des particuliers ni décision de la part des autorités publiques ;
4. Considérant que dès lors qu'il ressort des déclarations mêmes de l'intéressé à l'OFPRA lors de ses demandes d'admission au statut de réfugié qu'il a déclaré être né le 30 août 1971 en Azerbaïdjan (ex-URSS) et avoir résidé en Russie de 1988 à 2003, où il aurait servi dans les rangs de l'armée russe à Stavropol, avant de rejoindre la France en décembre 2004 après avoir transité par l'Arménie et la Biélorussie, M.D..., qui n'allègue pas avoir décliné la nationalité russe, doit être regardé comme un ressortissant russe par application des dispositions précitées ; que contrairement à ce qu'il soutient, M. D...ne justifie pas n'avoir pas été en mesure d'obtenir la nationalité russe ;
5. Considérant que, par ailleurs, en tout état de cause, si M. D...se prévaut de ses origines arméniennes il ne justifie d'aucune démarche suivie de sa part auprès des autorités compétentes visant à se voir reconnaître la nationalité arménienne sur le fondement des dispositions du paragraphe 3 de l'article 13 de la loi arménienne sur la nationalité du 24 novembre 1995 modifiée en dernier lieu le 8 décembre 2011 ; que, dans ces conditions, M. D... n'établit pas entrer dans le champ d'application des stipulations précitées de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954 ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé et régulier, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M.D..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce que soit enjoint, sous astreinte, à l'OFPRA de lui accorder le statut d'apatride, doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'OFPRA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. D...demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de l'OFPRA tendant à ce que soient mis à la charge de M. D...les frais qu'il a exposés à ce même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Délibéré après l'audience du 9 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er mars 2016.
Le rapporteur,
C. LOIRATLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00331