Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er octobre 2020, M. B..., représenté par Me Thoumine, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 juin 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 mai 2020 du préfet de Maine-et-Loire décidant son transfert aux autorités belges ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté de transfert est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- l'arrêté procède d'une application manifestement erronée de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 qui permet de déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Rivas a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant guinéen né le 19 septembre 1984, déclarant être entré irrégulièrement en France le 7 décembre 2019, a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de Maine-et-Loire le 5 février 2020. Les recherches effectuées sur le fichier Visabio ont fait apparaître qu'il était en possession d'un visa délivré par les autorités belges, périmé depuis moins de six mois au moment de sa demande d'asile. Les autorités belges ont alors été saisies le 6 février 2020 sur le fondement du 4 de l'article 12 du règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil n° 604/2013 du 26 juin 2013 d'une demande de prise en charge de l'intéressé. Ces mêmes autorités ont expressément accédé à cette demande par une décision du 18 février 2020. Le préfet de Maine-et-Loire a alors pris, le 26 mai 2020, des décisions de transfert et d'assignation à résidence de M. B.... Par un jugement du 19 juin 2020, dont M. B... relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de ces arrêtés. M. B... ayant pris la fuite, le délai d'exécution de son éventuel transfert a été regardé comme expirant le 19 décembre 2021.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. (...) ".
3. Il ressort des mentions figurant sur le résumé signé par M. B... qu'il a bénéficié le 5 février 2020, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Cet entretien s'est tenu en langue soussou, que l'intéressé a déclaré comprendre, avec le concours d'un interprète. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'entretien aurait été conduit par une personne, en l'espèce le chef du bureau de l'asile de la préfecture, qui ne serait pas qualifiée. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article 17, du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ".
5. Les pièces présentes au dossier n'établissent pas que l'intéressé présenterait une situation de vulnérabilité exceptionnelle justifiant l'examen de sa demande d'asile en France nonobstant le souhait de M. B.... Par ailleurs, les conditions matérielles de son transfert, assuré par la France, sont sans incidence sur la légalité de la décision contestée au regard de la disposition citée. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché la décision de transfert en Belgique d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement précité.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mai 2020 du préfet de Maine-et-Loire. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Thoumine et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 28 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Béria-Guillaumie, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 octobre 2021.
Le rapporteur,
C. Rivas
Le président,
L. Lainé
La greffière,
S. Levant
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT03136