Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 février 2019, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 17 janvier 2019 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 11 janvier 2019 du préfet de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale et de lui délivrer un récépissé de demande d'asile dans un délai de quarante-huit heures à compter de l'arrêt à intervenir et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quarante-huit heures à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier : il n'est pas établi que le jugement aurait été signé par le magistrat et le greffier ; un moyen soulevé n'a pas été visé et il n'y a pas été répondu ;
- l'arrêté de transfert n'a pas été signé par une autorité compétente ;
- l'arrêté de transfert est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance des dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- l'arrêté de transfert est intervenu en violation de l'article 23 du même règlement faute d'établir la date à laquelle l'Etat a adressé une demande de reprise en charge aux autorités italiennes ;
- l'arrêté de transfert procède d'une application manifestement erronée de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 qui permet de déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2019, le préfet de la Loire-Atlantique conclut à titre principal au non-lieu à statuer et subsidiairement au rejet de la requête.
Il soutient que la France est devenue responsable de l'examen de sa demande d'asile et, subsidiairement, que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 févier 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant guinéen né le 15 janvier 1996, a sollicité l'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique. Suite au relevé de ses empreintes digitales, il a été constaté qu'il avait sollicité l'asile auprès des autorités italiennes le 23 septembre 2016. Consécutivement à leur saisine par le préfet de la Loire-Atlantique, ces autorités ont implicitement accepté de le reprendre en charge. Par deux arrêtés du 11 janvier 2019, le préfet de la Loire-Atlantique a décidé de transférer M. B... à ces autorités et l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours. Par un jugement du 17 janvier 2019, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation desdits arrêtés.
Sur l'étendue du litige :
En ce qui concerne la décision de transfert :
2. D'une part, aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. /2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".
3. D'autre part, l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle est notifié à l'administration le jugement par lequel le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel, ni d'ailleurs le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
4. Le délai initial de six mois dont disposait le préfet pour procéder à l'exécution de la décision de transfert du requérant vers l'Italie a été interrompu par la saisine du tribunal administratif de Nantes. Ce délai a recommencé à courir intégralement à compter de la notification à l'administration, le 18 janvier 2019, du jugement attaqué. Il ressort des pièces du dossier que ce délai n'a pas fait l'objet d'une prolongation et que cet arrêté n'a pas non plus reçu exécution pendant sa période de validité. Par suite, l'arrêté en cause est caduc à la date du présent arrêt. La France est donc devenue responsable de la demande d'asile de l'intéressé, sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013. Le litige ayant perdu son objet, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du requérant relatives à l'annulation de l'arrêté prononçant son transfert vers l'Italie.
En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :
5. L'arrêté portant assignation à résidence de l'intéressé ayant été exécuté et ayant produit des effets, il y a lieu de statuer sur les conclusions tendant à son annulation.
Sur la régularité du jugement attaqué :
6. En premier lieu, le moyen tiré de ce que, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, la minute du jugement ne serait pas signée manque en fait.
7. En second lieu, M. B... soutient que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes n'a pas répondu au moyen tiré de ce que l'arrêté du 11 janvier 2019 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a décidé son transfert en Italie, est intervenu en méconnaissance des dispositions des articles L. 111-7 et L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Un tel moyen est cependant sans incidence sur la régularité du jugement en ce qu'il statue sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision portant assignation à résidence, seule décision restant en litige. Par suite ce moyen ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
8. Si M. B..., dans ses conclusions, demande à la cour d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2019 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique l'a assigné à résidence pour une durée maximale de 45 jours, il ne présente en appel aucun moyen tenant au bien-fondé du jugement attaqué en tant qu'il statue sur la décision d'assignation à résidence. Par suite, ses conclusions ne peuvent être que rejetées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 11 janvier 2019 portant assignation à résidence. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juillet 2019 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a décidé son transfert aux autorités italiennes.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. A..., président assesseur,
- M. Jouno, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 septembre 2020.
Le rapporteur,
C. A...
Le président,
L. Lainé
La greffière,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT00539