Par une requête, enregistrée le 24 août 2020, Mme A... E..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 mars 2020 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2017 par lequel la préfète de la région Pays de la Loire a désigné les membres du conseil économique social et environnemental régional (CESER) des Pays de la Loire, la décision ministérielle implicite portant rejet de son recours hiérarchique du 10 janvier 2018 dirigé contre l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2017 ainsi que le courrier du 17 janvier 2018 de la préfète de région rejetant sa candidature ;
3°) d'enjoindre au préfet de la région Pays de la Loire, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de procéder à un nouvel examen de sa candidature dans le délai d'un mois suivant la mise à disposition de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas respecté, alors qu'elle l'avait sollicité, l'ordre d'examen de ses moyens ; or le respect de cet ordre d'examen aurait permis à la juridiction d'envisager d'enjoindre un réexamen de sa situation en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;
- les décisions contestées sont irrégulières pour être intervenues en méconnaissance, dans l'ordre suivant des moyens de légalité interne, du principe de non-discrimination des candidats à la fonction faute d'examen complet et pertinent de sa demande, du principe d'égalité des candidats dès lors que sa demande n'a pas été instruite comme celle des autres postulants faute notamment d'avoir été reçue en entretien, du principe de parité pour les motifs retenus à bon droit par le jugement et du principe de représentativité ;
- les décisions contestées sont intervenues au terme d'une procédure irrégulière dès lors que seuls certains candidats ont été reçus en entretien ; la décision du 17 janvier 2018 rejetant sa candidature n'est pas motivée en droit et en fait.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2020, le préfet de la région Pays de la Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'irrégularité du jugement sera écarté dès lors que Mme E... n'a pas présenté de conclusions à fin d'injonction devant le tribunal administratif et sa requête devient alors sans objet dès lors que le jugement fait droit à sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2017 ;
- les autres moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés ;
- ses conclusions à fin d'injonction seront rejetées dès lors qu'un nouvel arrêté portant composition du conseil économique social et environnemental régional est intervenu le 30 juin 2020 en exécution du jugement attaqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant Mme E....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 29 décembre 2017, la préfète de la région Pays de la Loire a désigné les membres du conseil économique, social et environnemental régional (CESER) des Pays de la Loire à compter du 1er janvier 2018. Mme E..., dont la candidature au titre du quatrième collège de ce CESER n'a pas été retenue par la préfète, a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté, de la décision ministérielle implicite rejetant son recours hiérarchique du 12 janvier 2018 et du courrier du 17 janvier 2018 par lequel la préfète de la région Pays de la Loire a rejeté sa candidature à ce titre. Par un jugement du 18 mars 2020, dont Mme E... relève appel, le tribunal administratif a annulé partiellement l'arrêté du 29 décembre 2017 en tant qu'il désigne les membres du quatrième collège du CESER, avec effet au 1er juillet 2020, ainsi que la décision ministérielle implicite portant rejet du recours hiérarchique de Mme E... formé le 12 janvier 2018, a jugé que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de son jugement contre les actes pris sur son fondement, les effets produits par l'arrêté du 29 décembre 2017 antérieurement à son annulation sont regardés comme définitifs, et a rejeté le surplus des demandes de Mme E....
Sur la recevabilité des conclusions d'appel :
2. D'une part, les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs ne peuvent tendre qu'à l'annulation ou à la réformation du dispositif du jugement attaqué. Par suite, n'est pas recevable, quels que soient les motifs retenus par les premiers juges, l'appel dirigé contre un jugement qui, par son dispositif, fait intégralement droit aux conclusions de la demande qu'avait présentée l'appelant en première instance.
3. D'autre part, lorsque le juge de l'excès de pouvoir annule une décision administrative alors que plusieurs moyens sont de nature à justifier l'annulation, il lui revient, en principe, de choisir de fonder l'annulation sur le moyen qui lui paraît le mieux à même de régler le litige, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire. Mais, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions à fin d'annulation, des conclusions à fin d'injonction tendant à ce que le juge enjoigne à l'autorité administrative de prendre une décision dans un sens déterminé, il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'examiner prioritairement les moyens qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de l'injonction demandée. De même, lorsque le requérant choisit de hiérarchiser, avant l'expiration du délai de recours, les prétentions qu'il soumet au juge de l'excès de pouvoir en fonction de la cause juridique sur laquelle reposent, à titre principal, ses conclusions à fin d'annulation, il incombe au juge de l'excès de pouvoir de statuer en respectant cette hiérarchisation, c'est-à-dire en examinant prioritairement les moyens qui se rattachent à la cause juridique correspondant à la demande principale du requérant. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens assortissant la demande principale du requérant mais retient un moyen assortissant sa demande subsidiaire, le juge de l'excès de pouvoir n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler la décision attaquée : statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande principale. Si le jugement est susceptible d'appel, le requérant est recevable à relever appel en tant que le jugement n'a pas fait droit à sa demande principale. Il appartient alors au juge d'appel, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant lui, susceptibles de conduire à faire droit à la demande principale.
4. Par la requête visée ci-dessus Mme E... demande l'annulation du jugement du 18 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes, statuant sur ses conclusions, a notamment partiellement annulé l'arrêté de la préfète de la région Pays de la Loire du 29 décembre 2017, en tant qu'il désigne les membres du quatrième collège du CESER, et la décision ministérielle implicite portant rejet de son recours hiérarchique formé le 12 janvier 2018. Ce jugement a ainsi fait droit à certaines des demandes de Mme E... en retenant que l'arrêté du 29 décembre 2017 en tant qu'il portait composition du 4ème collège du CESER, auquel la requérante postulait, et la décision rejetant son recours hiérarchique étaient irréguliers en ce qu'ils méconnaissaient le principe de parité hommes / femmes prévu par le dernier alinéa de l'article L. 4134-2 du code général des collectivités territoriales.
5. A l'appui de ses conclusions d'appel, Mme E... soutient que si les premiers juges avaient procédé à un examen de sa demande dans l'ordre de présentation de ses moyens, ainsi qu'elle l'avait demandé, ils auraient été susceptibles d'enjoindre à l'administration de réexaminer sa situation sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative.
6. Cependant, dans son mémoire enregistré le 18 avril 2019 au tribunal administratif de Nantes, dont elle se prévaut, Mme E... n'a pas procédé à une hiérarchisation de ses prétentions en fonction de leur cause juridique dès lors qu'elle a scindé son écrit en trois parties, comprenant chacune des moyens, pour certains identiques, se rattachant à différentes causes juridiques, et présente devant la cour ces moyens prioritaires comme se rattachant à la seule légalité interne. Il en résulte que la requérante n'a, ainsi, pas hiérarchisé des causes juridiques distinctes mais seulement des moyens au sein d'une cause juridique. Il est par ailleurs constant qu'en première instance Mme E... n'a pas présenté de conclusions à fin d'injonction. Dans ces conditions, les premiers juges n'étaient pas tenus, pour faire droit aux conclusions à fin d'annulation dont ils étaient saisis, de se prononcer sur d'autres moyens que celui qu'ils ont retenu explicitement comme étant fondé. Ainsi, le jugement attaqué en ses articles 2 et 3 a fait droit aux conclusions de Mme E... dont le tribunal était saisi à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2017, en tant que celui-ci désignait les membres du quatrième collège du CESER et, dans la même mesure, de la décision ministérielle implicite rejetant son recours hiérarchique. Dès lors, les conclusions de la requête d'appel, en tant qu'elles sont dirigées contre les articles 2 et 3 du jugement attaqué, ne sont pas recevables.
Sur la régularité du jugement attaqué :
7. Mme E... conclut à l'annulation de l'intégralité de l'arrêté du 29 décembre 2017 par lequel la préfète de la région Pays de la Loire a désigné les membres du CESER, alors que le tribunal administratif n'a procédé qu'à une annulation partielle. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 4134-2 du code général des collectivités territoriales les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux comprennent notamment " (...) des personnalités qualifiées, choisies en raison de leur compétence en matière d'environnement et de développement durable. " et le paragraphe III de l'article R. 4134-4 du même code dispose que ces personnalités, composant le quatrième collège prévu par le 4° de l'article R. 4134-1, " sont nommées par arrêté du préfet de région. ". Au regard des règles particulières qui régissent ainsi la composition et les modalités de désignation des membres du quatrième collège du CESER, la requérante, en l'absence de toute précision sur ce point dans son argumentation, n'établit pas en quoi l'illégalité retenue par le jugement attaqué, mentionnée au point 4 ci-dessus, devait entraîner l'annulation totale de l'arrêté préfectoral contesté. Ses conclusions ne peuvent donc qu'être rejetées également sur ce point.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
8. Mme E... a également demandé au tribunal administratif de Nantes, dans la même instance, l'annulation du courrier du 17 janvier 2018 par lequel la préfète de la région Pays de la Loire l'informe du rejet de sa candidature aux fonctions de membre du CESER dans le quatrième collège dit des " personnalités qualifiées ". Le jugement attaqué, par son article 6, rejette les conclusions de Mme E... dirigées contre ce courrier, pour irrecevabilité au motif qu'une telle lettre ne constitue pas une décision faisant grief. En appel, Mme E... se borne à soutenir que ce courrier est entaché de vices de forme, de procédure et de violation de diverses réglementations et de principes, selon un ordre d'examen qu'elle fixe. Dès lors qu'il n'appartient pas à la cour, devant laquelle l'appelante ne conteste pas la fin de non-recevoir opposée à cette demande d'annulation par le juge de premier ressort, de rechercher d'office si cette fin de non-recevoir a été soulevée à bon droit, en se bornant à invoquer ces moyens Mme E... ne conteste pas utilement l'irrecevabilité de sa demande tendant à l'annulation de la lettre de la préfète du 17 janvier 2018 et ses conclusions sur ce point en appel ne peuvent qu'être rejetées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué et pour les motifs qu'il a retenus, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 29 décembre 2017 en tant qu'il désigne les membres du quatrième collège du CESER des Pays de la Loire avec effet au 1er juillet 2020, ainsi que la décision ministérielle implicite portant rejet de son recours hiérarchique formé le 12 janvier 2018, a jugé que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de son jugement contre les actes pris sur son fondement, les effets produits par l'arrêté du 29 décembre 2017 antérieurement à son annulation sont regardés comme définitifs et a rejeté le surplus des demandes de Mme E.... Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E... et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Une copie en sera adressée pour information au préfet de la région Pays de la Loire.
Délibéré après l'audience du 20 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. B..., président assesseur,
- Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mai 2021.
Le rapporteur,
C. B...
Le président,
L. Lainé
La greffière,
S. Levant
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT02637