3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou à titre subsidiaire de procéder à un nouvel examen de sa demande et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de deux mille euros à verser à son avocat au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat, ou subsidiairement à son profit s'il ne bénéficie pas de l'aide juridictionnelle, tant pour la première instance que l'appel.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ; le jugement répond de manière stéréotypé au moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français, au regard notamment des articles L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
. en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- il ressort de la motivation de la décision que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il risque des représailles des autorités guinéennes en raison des opinions politiques qu'on lui impute ; son état de santé nécessite un suivi ophtalmologique régulier pour traiter son hypertonie intra-oculaire ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il a noué des relations avec la compatriote qui l'héberge et l'accompagne ;
. en ce qui concerne le pays d'éloignement :
- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juillet 2020, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 21 janvier 2020.
Par une ordonnance du 24 août 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A..., ressortissant guinéen né en mai 1998, est entré en France en juin 2017. Il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 30 avril 2018. Son recours dirigé contre cette décision a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 4 avril 2019. Par un arrêté du 20 mai 2019, le préfet de la Sarthe lui a notifié une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation. M. A... relève appel du jugement du 22 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 20 mai 2019.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Si M. A... soutient que le premier juge aurait répondu de manière insuffisante et stéréotypée à un " moyen du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français notamment au regard des articles L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles 3 et 8 de la CESDH ", il ressort des pièces du dossier, notamment de la lecture de la requête présentée pour le compte de M. A... devant le tribunal administratif de Nantes, qu'il avait invoqué, à l'encontre d'un refus de séjour, des moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales mais n'avait invoqué à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français qu'un unique moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de séjour. Or, ainsi qu'il a été rappelé au point 1 du présent arrêt, l'arrêté du 20 mai 2019, pris par le préfet de la Sarthe à la suite de la décision de la CNDA rejetant définitivement sa demande d'asile, ne comportait aucun refus de séjour. Par ailleurs, et alors que le tribunal administratif qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments soulevés par M. A..., a, d'une part, indiqué que la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvait être utilement soulevée à l'encontre d'une obligation de quitter le territoire français, et d'autre part, a répondu, après les avoir considérés comme dirigés contre cette dernière décision, aux moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement n'est pas fondé et doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
4. L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ".
5. En premier lieu, la décision du 20 mai 2019 portant, à l'encontre de M. A..., obligation de quitter le territoire français comporte l'exposé des considérations de droit qui la fondent. En outre, elle rappelle la date et les conditions de l'entrée en France de M. A..., la démarche qu'il a effectuée en vue de se voir reconnaitre le statut de réfugié, les décisions de l'OFPRA et de la CNDA ainsi que le fait que M. A... a, en septembre 2018, sollicité l'admission au séjour en raison de son état de santé et le motif du refus qui avait alors été opposé à sa demande de titre de séjour en janvier 2019. Par ailleurs, la décision rappelle la situation familiale de l'intéressé et le fait qu'il peut être éloigné sans méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il suit de là que l'obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée et ne méconnait pas les dispositions de l'avant-dernier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni, en tout état de cause, les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
6. En deuxième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'obligation de quitter le territoire français contestée qui, ainsi qu'il a été rappelé au point précédent du présent arrêt, rappelle l'ensemble de la situation de M. A... depuis son entrée en France, ni des autres pièces du dossier que le préfet de la Sarthe n'aurait pas procédé à un examen de la situation particulière de l'intéressé avant de décider de l'obliger à quitter le territoire français.
7. En troisième lieu, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ". M. A... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14, lesquelles ont trait à la délivrance de titres de séjour, par la décision portant obligation de quitter le territoire français.
8. En quatrième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'ayant pas pour objet de fixer le pays de destination, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être utilement invoqué.
9. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".
10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France en juin 2017 à l'âge de dix-neuf ans après avoir vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine. Il n'a résidé en France qu'en qualité de demandeur d'asile et cette demande a été définitivement rejetée par la CNDA en avril 2019. Par ailleurs, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il est constant que résident sa compagne et leurs deux enfants. Enfin, il n'apporte aucun élément de nature à préciser la relation qu'il invoque avec sa compatriote qui lui assure un logement. Dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de M. A..., le préfet de la Sarthe n'a pas porté une atteinte excessive à son droit à une vie privée et familiale normale en l'obligeant à quitter le territoire français et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. En premier lieu, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, M. A... ne peut s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
12. En deuxième lieu, la décision fixant le pays de destination comporte les éléments de fait et de droit qui en constituent le fondement et est par suite suffisamment motivée.
13. En dernier lieu, l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Par ailleurs, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
14. Si M. A... soutient qu'en cas de retour dans son pays d'origine il serait exposé à des risques de peines ou traitements inhumains en raison des opinions politiques que les autorités guinéennes lui imputent, il n'apporte aucune preuve à l'appui de ses allégations, alors même que les instances spécialisées ayant statué sur sa demande d'asile ont rejeté celle-ci. Par ailleurs, s'il est établi par les documents médicaux produits au dossier que M. A... souffre d'une hypertonie intra-oculaire qui doit faire l'objet d'un suivi médical, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'état de santé de M. A... ne pourrait faire l'objet d'un suivi adéquat dans son pays d'origine ou que l'absence de prise en charge de ses problèmes oculaires aurait des conséquences assimilables à des traitements inhumains ou dégradants. Dans ces conditions le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé et doit être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande contre les décisions du 20 mai 2019. Doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée pour information au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 5 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 janvier 2021.
La rapporteure,
M. D...Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT00676