Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 juin 2020, et un mémoire, enregistré le 28 novembre 2020, Mme A..., représentée par Me Madrid, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 26 septembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le préfet du Loiret sur la demande de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " qu'elle lui a adressée le 7 septembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", voire la mention " salarié " sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter d'un délai de trente jours, ou, à défaut, de reprendre l'instruction de son dossier sous la même astreinte et dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la commission du titre de séjour n'avait pas été saisie ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;
- la filiation de son enfant est légalement établie ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît le 6 et le 7 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle n'a pas commis de fraude ;
- compte tenu de l'intensité de ses liens avec la France, une erreur manifeste d'appréciation a été commise ;
- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ont été violés.
Par un mémoire, enregistré le 2 novembre 2020, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 2 mars 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Lainé a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante angolaise, est entrée en France irrégulièrement le 24 septembre 2012. Sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 19 septembre 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 8 avril 2014. Le 2 juin 2014, elle a demandé la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en qualité de parent d'enfant français. Par un courrier daté du 7 septembre 2018, Mme A... a réitéré sa demande. Le 7 février 2019, elle a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer ce titre de séjour. Par un jugement du 26 septembre 2019, dont elle relève appel, cette demande a été rejetée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... séjournait, à la date de la décision contestée, depuis plus de six ans en France, pour partie sous couvert de récépissés de demandes de titres de séjour. Elle y a travaillé dans la mesure autorisée par sa situation administrative. Elle est la mère d'une enfant mineure née en France, le lendemain de son entrée sur le territoire. Quelles que soient les conditions dans lesquelles cette enfant a été reconnue par un ressortissant français, un mois après l'entrée sur le territoire de Mme A..., il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, l'enfant en cause était de nationalité française et n'a jamais séjourné qu'en France. Les deux autres enfants majeurs de la requérante résident également en France, sa fille aînée est ressortissante française, tandis que son fils cadet majeur, qui séjourne de manière régulière et continue sous couvert d'une carte de séjour temporaire, a fondé une famille et vit non loin de la requérante. Dans de telles circonstances, en refusant de délivrer une carte de séjour temporaire à Mme A..., le préfet du Loiret a commis une erreur manifeste d'appréciation. Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme A... est donc fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur l'injonction :
3. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".
4. Compte tenu de ce qui vient d'être mentionné, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Loiret de délivrer à la requérante, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
5. Mme A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle, la contribution de l'Etat ayant été fixée à 25 %. Il n'est pas contesté qu'elle a versé à son avocate un honoraire complémentaire librement négocié, conformément à l'article 35 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Il y a dès lors lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative d'une somme de 1 000 euros.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1900465 du 26 septembre 2019 du tribunal administratif d'Orléans et la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le préfet du Loiret sur la demande de délivrance d'un titre de séjour adressée le 7 septembre 2018 par Mme A... sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Loiret de délivrer à Mme A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., à Me Madrid et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 5 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Béria-Guillaumie, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 janvier 2021.
Le président de chambre,
rapporteur,
L. Lainé
L'assesseur le plus ancien
dans le grade le plus élevé,
C. Rivas
Le greffier,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT01587
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