Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 février 2014 et 18 novembre 2015, la commune de La Roche-sur-Yon, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 décembre 2013 ;
2°) de condamner solidairement la société Egis Aménagement, la société B+M Architecture, la société Lepine TP, la société Sedep, la société Agilis et la société Bureau Veritas, ou l'une à défaut de l'autre, à lui verser la somme de 586 767,17 euros TTC, assortie des intérêts à compter du 28 juillet 2011 et de leur capitalisation à compter du 28 juillet 2012, en réparation des désordres affectant le passage souterrain litigieux ;
3°) de condamner solidairement la société Egis Aménagement, la société B+M Architecture, la société Lepine TP, la société Sedep, la société Agilis et la société Bureau Veritas, ou l'une à défaut de l'autre, à lui rembourser les frais d'expertise, taxés à la somme de 7001,21 euros ;
4°) de mettre à la charge solidaire de la société Egis Aménagement, de la société B+M Architecture, de la société Lepine TP, de la société Sedep, de la société Agilis et de la société Bureau Veritas, ou de l'une à défaut de l'autre, le versement de la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, elle ne peut être regardée comme ayant eu connaissance lors de la réception des travaux des désordres de fissuration des plaques Chromoroc ;
- dés lors que les plaques Chromoroc devaient, en vertu du cahier des charges, résister aux actes de vandalisme, c'est à tort que le tribunal a retenu que la rupture de ces plaques était uniquement imputable au comportement de tiers ;
- la fragilité excessive des plaques de parement phonique est de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination et donc à engager la responsabilité décennale des constructeurs ;
- il appartenait au seul maître d'oeuvre, chargé de la conception, avant de choisir les matériaux et les procédés de construction, de définir les exigences à satisfaire, de sorte que c'est à tort que l'expert a pu retenir qu'une partie des désordres lui était imputable ;
- le montant total des travaux de réparation a été évalué à la somme de 586 767,17 euros TTC ;
- le maire, habilité à agir en justice par le conseil municipal, a le pouvoir de charger un avocat d'accomplir les actes de procédures.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 9 avril 2014 et le 8 décembre 2015, la société B+M Architecture conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, d'une part à la condamnation de la société SEDEP, de la société Lepine, de la société Agilis, du bureau de contrôle Véritas et de la commune de la Roche-sur-Yon à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, d'autre part à un partage de responsabilité avec l'autre maître d'oeuvre, la société Egis, et enfin au rejet des appels en garantie formés à son encontre ; elle demande également que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de La Roche-sur-Yon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que la condamnation de celle-ci aux dépens.
Elle soutient que :
- comme l'a jugé le tribunal, les travaux ayant été réceptionnés et les réserves levées, la responsabilité contractuelle ne peut plus être invoquée ;
- le désordre résultant de la fissuration des plaques dans les angles était apparent lors de la réception, de sorte que la garantie décennale ne peut pas être engagée ;
- les fissurations verticales des plaques sont dues à des actes de vandalisme et donc à une cause étrangère exonératoire de la responsabilité décennale ;
- en tout état de cause, elle n'était que maître d'oeuvre de conception, de sorte que les désordres ne sont pas dus à une faute contractuelle de sa part et ne lui sont pas imputables sur le terrain de la garantie décennale ;
- à titre subsidiaire, elle devrait être garantie par les autres intervenants, à qui les désordres sont imputables ;
- le montant du préjudice ne peut excéder 81 708 euros et un coefficient de vétusté de 20% devrait être appliqué ;
- la demande reconventionnelle de la société Agilis, sous traitante de la société Lepine, est irrecevable.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 17 juillet 2014 et le 8 août 2014, la société Egis France conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à la condamnation de la société Agilis, de la société B+M Architecture et de la commune de la Roche-sur-Yon à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ; elle demande également que la somme de 10 000 euros soit mis à la charge de la commune de La Roche-sur-Yon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les désordres étaient apparents et le maître d'ouvrage, dûment averti, avait accepté les risques ;
- en tout état de cause, elle n'est pas responsable des désordres ;
- si la maîtrise d'oeuvre de conception était regardée comme responsable, elle sollicite la garantie de la commune de La Roche-sur-Yon, maître d'ouvrage et maître d'oeuvre d'exécution, de la société Agilis et de la société B+M Architecture ;
- le préjudice de la commune ne peut pas dépasser 137 256,47 euros TTC.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2014, le bureau Véritas conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, il demande, d'une part, la condamnation de la société Egis France, de la société B+M Architecture, de la société Lepine, de la société SEDEP, de la société Agilis et de la commune de la Roche-sur-Yon à le garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, et d'autre part, le rejet de l'appel en garantie formé à son encontre ; il demande également que la somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la commune de La Roche-sur-Yon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que la condamnation de celle-ci aux dépens.
Il soutient que :
- la demande de la commune est irrecevable faute pour celle-ci de justifier du mandat donné à la Selarl Cornet-Vincent-Segurel pour la représenter en justice ;
- la commune a accepté les risques, de sorte que la garantie décennale des constructeurs ne peut être engagée ;
- la réception des ouvrages étant intervenue, sa responsabilité contractuelle ne peut être engagée ;
- en tout état de cause, eu égard à sa mission, sa responsabilité ne peut être engagée ;
- si sa responsabilité devait être retenue, il devrait être garanti par les autres constructeurs.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2014, la société SEDEP conclut, à titre principal au rejet de la requête, et à titre subsidiaire, elle demande la condamnation de la société Egis France, de la société B+M Architecture, de la société Lepine, de la société Agilis, du bureau Véritas et de la commune de la Roche-sur-Yon à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ; elle demande également que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de La Roche-sur-Yon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que la condamnation de celle-ci aux dépens.
Elle soutient que :
- ainsi que l'a jugé le tribunal, la garantie décennale ne peut être engagée dés lors que les désordres étaient apparents et qu'ils ne sont pas imputables aux constructeurs ;
- la réception étant intervenue, sa responsabilité contractuelle ne peut pas être engagée ;
- en tout état de cause, les travaux qu'elle a réalisés n'ont aucun lien avec les désordres affectant l'ouvrage ;
- à titre subsidiaire, les autres constructeurs devront la garantir entièrement ;
- à titre infiniment subsidiaire, sa responsabilité sera limitée à 2% de la part de 10% proposée par l'expert ;
- le coût des travaux de reprise sera limité à 364 433,16 euros TTC.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 octobre 2014 et 27 novembre 2015, la société Lepine conclut, à titre principal, au rejet de la requête, et à titre subsidiaire, elle demande la condamnation de la société Egis France, de la société B+M Architecture, de la société SEDEP, de la société Agilis et du bureau Véritas à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ; elle demande également que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de La Roche-sur-Yon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- ainsi que l'a jugé le tribunal, la garantie décennale ne peut être engagée dés lors que les désordres de fissuration des plaques étaient apparents lors de la réception et les désordres de rupture des plaques sont imputables à des tiers et non aux constructeurs ;
- en tout état de cause, les désordres ne lui sont pas imputables ;
- à titre subsidiaire, les autres constructeurs devront la garantir entièrement ;
- le coût des travaux de reprise sera limité à 364 433,16 euros TTC.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2015, la société Agilis conclut, à titre principal, au rejet de la requête, et à titre subsidiaire, d'une part, elle demande la condamnation de la société Egis France, de la société B+M Architecture, de la société Lepine, de la société SEDEP, du bureau Véritas et de la commune de la Roche-sur-Yon à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, et d'autre part, elle conclut à l'incompétence de la juridiction administrative pour se prononcer sur l'appel en garantie formé contre elle par la société Lepine et au rejet des autres appels en garantie formés à son encontre.
Elle demande également que le jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 décembre 2013 soit annulé en tant qu'il rejette sa demande reconventionnelle et que les parties déclarées responsables des désordres affectant les plaques soient condamnées à lui verser la somme de 26 027,90 euros TTC.
Elle demande enfin que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des parties perdantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que la condamnation de celles-ci aux dépens.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître des demandes formées à son encontre par la société Lepine ;
- la responsabilité contractuelle ne peut plus être invoquée après la réception des travaux ;
- les désordres étaient apparents, de sorte que la garantie décennale ne peut pas être engagée ;
- sa responsabilité ne peut pas être engagée dés lors, d'une part, qu'elle n'est intervenue qu'en qualité de " tâcheron " de la société Lepine, que d'autre part, à supposer même qu'elle soit intervenue comme sous-traitante, la commune ne démontre pas qu'elle aurait commis une faute à l'origine des désordres, et enfin que la rupture des plaques est due à l'intervention de tiers ;
- à titre subsidiaire, les autres constructeurs devront la garantir entièrement ;
- la faute imputable à la commune doit conduire à exonérer les constructeurs de la part de responsabilité qui lui est imputable, fixée à 5% par l'expert ;
- le coût des travaux de reprise sera limité à 304 710 euros HT ;
- elle a engagé des dépenses pour tenter de remédier aux désordres, à hauteur de 19 430 euros HT, auxquels il faut ajouter 12% de frais généraux.
Par ordonnance du 22 décembre 2015, prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée au 22 décembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de Me Vautier, avocat de la Commune de La Roche sur Yon, celles de Me Esquelisse, avocat de la société Egis Aménagement et celles de Me Guyard, avocat de la société Lepine TP.
1. Considérant que, dans le cadre de travaux de suppression du passage à niveau des Forges et d'aménagements de giratoires et de voies nouvelles sur son territoire, la commune de La Roche-sur-Yon a confié, par un contrat signé le 10 juillet 2002, une mission de maîtrise d'oeuvre de conception à un groupement solidaire composé des sociétés Ouest Infra, devenue Egis France, et Grégoire Bignier Architectes associés, devenue B+M Architecture ; que, par un contrat signé le 20 décembre 2004, le lot n° 1 " voirie-assainissement " a été attribué à un groupement solidaire composé des sociétés SEDEP, Lépine TP, Agilis et Atlanroute ; que le contrôle technique des travaux a été confié à la société Bureau Véritas ; que la commune de La Roche-sur-Yon a conservé la maîtrise d'oeuvre d'exécution et la conduite d'opération ; que la réception des travaux est intervenue en deux temps, d'une part la voie nouvelle rue Brunet, hors piste cyclable et parements phoniques côté piste cyclable, dont la réception a été prononcée, après levée de réserves, avec effet au 30 janvier 2006, et d'autre part les parements phoniques, côté voie piétonne, dont la réception a été prononcée, également après levée de réverses, avec effet au 23 janvier 2007 ; que l'apparition de fissures sur des plaques d'isolation phonique posées dans le passage souterrain a conduit la commune de La Roche-sur-Yon à solliciter une expertise du juge des référés du tribunal administratif de Nantes ; que le rapport d'expertise a été déposé au greffe du tribunal administratif de Nantes le 7 avril 2010 et a ensuite été complété par deux notes des 27 septembre 2010 et 4 février 2011 ; que la commune de La Roche-sur-Yon, en se fondant sur la garantie décennale des constructeurs, relève appel du jugement du 11 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire des sociétés Egis France, B+M Architecture, Lepine TP, SEDEP, Agilis, et Bureau Véritas à lui verser la somme de 586 767,17 euros en réparation des désordres affectant les parements phoniques du passage souterrain sous la voie de chemin de fer au niveau de l'ancien passage à niveau des Forges ; que la société Agilis demande la réformation du jugement du 11 décembre 2013 en tant qu'il rejette ses conclusions reconventionnelles, ainsi que la condamnation des parties déclarées responsables des désordres dénoncés par la commune de La Roche-sur-Yon à lui verser la somme de 26 027,90 euros ;
Sur la fin de non recevoir soulevée par la société Bureau Véritas :
2. Considérant que la compétence d'exécution conférée au maire par l'article L. 2132-2 du code général des collectivités territoriales comporte, alors même que la délibération du conseil municipal décidant d'intenter une action en justice ne le prévoit pas expressément, le pouvoir de charger un avocat ou un autre mandataire légalement habilité à cette fin d'accomplir, au nom de la commune, les actes de la procédure ; que par suite, le maire de la commune de La Roche-sur-Yon, habilité à agir en justice au nom de la commune par une délibération du conseil municipal du 20 avril 2011, pouvait, sans nouvelle habilitation du conseil municipal, charger la SELARL Cornet-Vincent-Segurel d'accomplir, au nom de la commune, les actes de la présente procédure ; qu'il suit de là que la fin de non recevoir soulevée par la société Bureau Véritas doit être écartée ;
Sur la responsabilité décennale des constructeurs :
3. Considérant que, lorsque des désordres de nature à compromettre la solidité d'un ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination survenus dans le délai de dix ans à compter de la réception sont imputables, même partiellement, à un constructeur, celui-ci en est responsable de plein droit envers le maître d'ouvrage, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans, sauf pour le constructeur à s'exonérer de sa responsabilité ou à en atténuer la portée en établissant que les désordres résultent d'une faute du maître d'ouvrage ou d'un cas de force majeure ;
4. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que les fissurations des plaques d'isolation phonique bordant les murs du souterrain créent des risques de chute de certaines de ces plaques, qui rendent dangereuse l'utilisation de ce souterrain, notamment pour les piétons ; que les désordres sont par suite de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ;
5. Considérant, d'autre part, que si, avant la réception des travaux, la fissuration dans les angles de certaines plaques avaient déjà donné lieu au remplacement de 487 de ces plaques, il résulte de l'instruction, d'une part que les plaques remplacées ont été fixées au moyen de vis dont les percements avaient été élargis de 4,5 à 6 mm de manière à permettre la dilatation des plaques, d'autre part qu'au moment de la réception, aucune fissure n'était apparente, et qu'enfin, les fissurations dans les angles de certaines plaques observées après la réception sont dues, non seulement au système de fixation des plaques, mais également à la technique de pose utilisée et à une défectuosité des plaques elles-mêmes, de sorte que des fissures sont réapparues, après la réception, sur des plaques ayant été remplacées avant la réception ; que dans ces conditions, les désordres de fissurations de certaines plaques dans les angles, ne sont pas identiques à ceux signalés avant la réception et ne peuvent donc être regardés comme apparents au moment de celle-ci ; que ces désordres sont imputables à des défauts de conception, d'exécution et de contrôle ; que si le maître d'ouvrage était responsable de la maîtrise d'oeuvre d'exécution des travaux, cette circonstance n'est pas de nature à exonérer de leur responsabilité décennale les sociétés B+M Architecture et Egis France, chargées de la conception de l'ouvrage, les sociétés SEDEP, Lepine et Agilis, membres du groupement qui a exécuté les travaux, et le bureau de contrôle Véritas, chargé du contrôle technique de ces travaux ;
6. Considérant, enfin, que si les fissurations verticales de certaines plaques sont dues à des actes de vandalisme, il résulte de l'instruction que les plaques posées dans le souterrain, notamment les trois premières rangées du côté de la circulation des piétons, auraient du résister aux actes de vandalisme de type coup de talon ou d'épaule, qui sont à l'origine des fissures ; que d'ailleurs, si le cahier des clauses administratives particulières du marché exigeait des plaques de type " chromoroc ", c'est notamment parce qu'elles étaient supposées résister à ce type de dommages ; que dans ces conditions, si les fissurations verticales résultent de faits des tiers assimilables à une faute du maître de l'ouvrage, elles trouvent également leur cause, comme les fissurations en angle, dans une conception, une exécution et un contrôle technique défectueux des travaux, imputables aux constructeurs qui en étaient chargés ;
7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard au rôle du maître d'ouvrage dans la maîtrise d'oeuvre d'exécution des travaux et à sa faute liée aux actes de vandalisme pour ce qui est des fissurations verticales, les constructeurs doivent être exonérés de leur responsabilité décennale à hauteur de 35 % des préjudices subis par la commune de La Roche-sur-Yon ; qu'il suit de là que la part des désordres affectant les plaques d'isolation phonique du passage souterrain imputable aux sociétés B+M Architecture et Egis France du groupement chargé de la maîtrise d'oeuvre de conception des travaux, aux sociétés SEDEP, Lepine et Agilis, membres du groupement qui a exécuté les travaux, ainsi qu'à la société Bureau Véritas chargé du contrôle technique de ces travaux, doit être évaluée à 65% ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de La Roche-sur-Yon est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 11 décembre 2013, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation des sociétés B+M Architecture, Egis France, SEDEP, Lepine, Agilis et Bureau Véritas sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs ;
Sur l'évaluation du préjudice :
9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, la commune de La Roche-sur-Yon a exposé des frais de remplacement des plaques dangereuses par du contre plaqué pour une somme de 7 705 euros TTC ; que, d'autre part, la remise en état de l'ouvrage, qui consiste à enlever l'ensemble des plaques du souterrain pour les remplacer par de nouvelles plaques répondant aux exigences d'isolation phonique et de résistance aux chocs nécessaires pour ce type d'ouvrage, peut être évaluée à la somme de 380 000 euros TTC ; que cependant, cette remise en l'état de l'ouvrage, qui implique l'utilisation de meilleurs matériaux et procédés que ceux initialement prévus au marché, représente pour le maître d'ouvrage une plus-value, qui doit être estimée à 50% ; qu'il suit de là que le montant du préjudice subi par la commune de La Roche-sur-Yon s'élève à la somme de 197 705 euros TTC ;
10. Considérant qu'eu égard à la part de responsabilité de 35% de la commune de La Roche sur Yon fixée au point 7 ci-dessus, les sociétés B+M Architecture, Egis France, SEDEP, Lepine, Agilis et Bureau Véritas doivent être condamnées solidairement à verser à la commune de La Roche-sur-Yon la somme de 128 508,25 euros TTC ;
Sur les intérêts et leur capitalisation :
11. Considérant, d'une part, que la somme de 128 508,25 euros , mentionnée au point 10 ci-dessus, doit être augmentée, ainsi que le demande la commune de la Roche-sur-Yon, des intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2011, date d'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif de Nantes ;
12. Considérant, d'autre part, que pour l'application des dispositions de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que les intérêts dus à la commune de la Roche-sur-Yon seront capitalisés, ainsi qu'elle en a fait la demande, au 28 juillet 2012 et à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure ;
Sur les frais d'expertise :
13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de partager les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 7 001,21 euros TTC par ordonnance du président du tribunal administratif de Nantes du 9 avril 2010, entre la commune de la Roche-sur-Yon à hauteur de 35% d'une part, et les sociétés B+M Architectures, Egis France, SEDEP, Lepine, Agilis et Bureau Véritas, à hauteur de 65% d'autre part ; que, par suite, la somme de 2 450,42 euros est mise à charge de la commune de La Roche-sur-Yon et celle de 4 550,79 euros est mise à la charge solidaire des sociétés B+M Architectures, Egis France, SEDEP, Lepine, Agilis et Bureau Véritas ;
Sur les appels en garantie :
14. Considérant, en premier lieu, que la part de responsabilité imputable à la commune de La Roche-sur-Yon en raison de sa mission de maître d'oeuvre de l'exécution des travaux et de conduite d'opération a été prise en compte pour atténuer la responsabilité des constructeurs, dans les conditions précisées au point 7 ci-dessus ; que dans ces conditions, les appels en garantie formés contre la commune de La Roche-sur-Yon doivent être rejetés ;
15. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que les maîtres d'oeuvre chargés de la conception du projet ont imposé dans le cahier des clauses administratives particulières les plaques de type " Chromoroc ", qui se sont révélées défectueuses ; que s'ils ont été trompés par la notice sommaire du produit quant à la résistance de celui-ci aux chocs prévisibles, il leur appartenait, d'une part, de spécifier dans la définition des besoins que le produit devait résister au vandalisme et, d'autre part, de s'assurer que les plaques préconisées satisfaisaient aux exigences nécessaires pour l'ouvrage à réaliser ; que, d'autre part, les sociétés chargées de l'exécution des travaux sont responsables de la pose d'un produit qui s'est révélé défectueux et dont la notice sommaire était trompeuse quand à la résistance aux chocs ; qu'enfin, le bureau de contrôle technique, s'il a exigé une notice plus complète du produit, n'a pas appelé l'attention du maître d'ouvrage sur la nécessité de s'assurer de sa résistance aux chocs ; que dans ces conditions, la part de responsabilité des sociétés du groupement de maîtrise d'oeuvre doit être fixée à 40%, celle des sociétés du groupement chargé de l'exécution à 50% et celle du contrôleur technique à 10% ;
16. Considérant que, par suite, il y a lieu, d'une part, de condamner solidairement les sociétés B+M Architecture, Egis France, SEDEP, Lepine et Agilis à garantir la société Bureau Véritas à hauteur de 90% des condamnations prononcées à son encontre, d'autre part, de condamner solidairement les sociétés SEDEP, Lepine, Agilis et Bureau Véritas à garantir les sociétés B+M Architecture et Egis France à hauteur de 60% des condamnations prononcées à leur encontre, et enfin, de condamner solidairement les sociétés B+M Architecture, Egis France et Bureau Véritas à garantir les sociétés SEDEP, Lepine et Agilis à hauteur de 50% des condamnations prononcées à leur encontre ;
17. Considérant en troisième lieu, d'une part, que si est annexé à l'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre, un tableau de répartition des honoraires entre les sociétés B+M Architecture et Egis France, ce tableau indique que les deux sociétés étaient chargées des études d'avant projet (AVP) sans préciser les rôles de chacune dans cette mission ; que si la société Egis France soutient que la société B+M Architecture est seule à l'origine du choix des plaques de type Chromoroc, aucune convention ou autre document établi entre les deux cotraitants ne confie à la société B+M, au sein du groupement, le choix des matériaux ou la conception des travaux relatifs aux parements phoniques ; que dans ces conditions, dés lors qu'aucun document ne précise les missions de chacun des deux cabinets d'architectes chargés de la conception du projet, les conclusions des sociétés B+M Architecture et Egis France tendant à être garanties l'une par l'autre des condamnations prononcées à leur encontre, doivent être rejetées ;
18. Considérant en revanche, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction, notamment de la convention de groupement momentané d'entreprises solidaires, dont la société Sedep était le mandataire, que les travaux relatifs aux parements phoniques étaient entièrement confiés à la société Lépine ; que la société Lépine a cependant confié la réalisation de ces travaux à un autre membre du groupement, la société Agilis, et le décompte du marché du groupement indique que, les sommes dues pour ces travaux ont été perçues, par la société Lépine à hauteur de 10 766,25 euros et par la société Agilis à hauteur de 109 560,55 euros ; que, dans ces conditions, la société SEDEP, qui n'a pas participé aux travaux liés aux parements phoniques, doit être exclue de la répartition finale de la charge de la réparation des désordres, et d'autre part, les sociétés Lépine et Agilis doivent se partager les condamnations solidaires prononcées à l'encontre du groupement titulaire du lot n°1, à hauteur de 50% pour la société Lépine, qui s'est engagée initialement à poser ces parements phoniques et a perçu une fraction des sommes dues à ce titre, et à hauteur de 50% pour la société Agilis, qui a finalement réalisé les travaux qui lui étaient demandés par la société Lépine ;
Sur les conclusions présentées par la société Agilis :
19. Considérant, qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Nantes, les conclusions de la société Agilis tendant à ce que la partie déclarée responsable des désordres soit condamnée à lui verser la somme de 26 027,90 euros ne peuvent s'interpréter que comme des conclusions tendant au règlement de sommes dues en exécution de son marché ; que, par suite, ces conclusions se rattachent à un litige distinct de celui introduit par la commune de La Roche-sur-Yon tendant à la condamnation solidaire des constructeurs, sur le fondement de la garantie décennale, à réparer les désordres affectant les parements phoniques du passage souterrain ; que ces conclusions sont, par suite, irrecevables et la société Agilis n'est pas fondée à se plaindre de ce que le jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 décembre 2013 a rejeté sa demande reconventionnelle ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
20. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 décembre 2013 est annulé.
Article 2 : Les sociétés B+M Architecture, Egis France, SEDEP, Lepine, Agilis et Bureau Véritas sont condamnées solidairement à verser à la commune de La Roche-sur-Yon la somme de 128 508,25 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2011. Les intérêts échus seront capitalisés au 28 juillet 2012 et à chaque échéance annuelle ultérieure.
Article 3 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 7 001,21 euros, sont mis à la charge de la commune de La Roche-sur-Yon à hauteur de 2 450,42 euros et à la charge solidaire des sociétés B+M Architecture, Egis France, SEDEP, Lepine, Agilis et Bureau Véritas à hauteur de 4 550,79 euros.
Article 4 : Les sociétés B+M Architecture, Egis France, SEDEP, Lepine et Agilis sont condamnées solidairement à garantir la société Bureau Véritas à hauteur de 90% des condamnations prononcées à son encontre par le présent arrêt.
Article 5 : Les société B+M Architecture, Egis France et Bureau Véritas sont condamnées solidairement à garantir les sociétés, SEDEP, Lepine et Agilis à hauteur de 50% des condamnations prononcées à leur encontre par le présent arrêt.
Article 6 : Les sociétés Bureau Véritas, SEDEP, Lepine et Agilis sont condamnées solidairement à garantir les sociétés B+M Architecture et Egis France à hauteur de 60% des condamnations prononcées à leur encontre par le présent arrêt.
Article 7 : Les sommes que les sociétés SEDEP, Lepine et Agilis sont solidairement condamnées à payer par le présent arrêt sont partagées entre elles à hauteur de 0% pour la société SEDEP, 50% pour la société Lepine et 50% pour la société Agilis.
Article 8 : Les conclusions de la société Agilis tendant à ce que la partie déclarée responsable des désordres soit condamnée à lui verser la somme de 26 027,90 euros ainsi que les appels en garantie formés contre la commune de La Roche-sur-Yon et ceux formés entre les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre sont rejetés.
Article 9 : Les conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 10 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Roche-sur-Yon et aux sociétés Bureau Véritas, B+M Architecture, Egis France, SEDEP, Lepine et Agilis.
Délibéré après l'audience du 1er mars 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 22 mars 2016.
Le rapporteur,
S. RIMEU Le président,
L. LAINE
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au préfet de la Vendée en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
2
14NT00297