Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 mai 2015, la société Bouygues Energies et Services, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 mars 2015 ;
2°) de condamner la communauté de communes Coeur d'Estuaire à lui verser la somme de 136 488,56 euros, assortie des intérêts moratoires à compter du 8 juillet 2011, en paiement du solde du marché ;
3°) de condamner la communauté de communes Coeur d'Estuaire à lui verser la somme de 2 734,62 euros correspondant aux intérêts moratoires dus sur l'acompte de 325 842,89 euros HT, du 17 mars 2011 au 8 juillet 2011 ;
4°) d'ordonner la capitalisation des intérêts ;
5°) de mettre à la charge de la communauté de communes Coeur d'Estuaire la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la contestation du décompté était recevable dés lors que le titulaire a contesté le montant des pénalités de retard infligées par un courrier du 20 novembre 2012, qui constitue un mémoire en réclamation au sens de l'article 13-44 du CCAG travaux, que ce courrier a été adressé au maître d'oeuvre et que ce sont les stipulations de l'article 50.22 du CCAG qui s'appliquent et non celles de son article 50.21 ;
- des pénalités lui ont été appliquées pour des retards dans l'exécution de son marché qui ne lui étaient pas imputables ;
- ces retards sont en effet dus au choix des fournitures, imposé en cours d'exécution du marché par le maître d'ouvrage, alors que celui-ci avait été informé des non conformités du matériel choisi ;
- le décompte du marché devait donc être arrêté à la somme de 2 465 240,51 euros et le solde à 136 488,56 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2015, la communauté de communes Coeur d'Estuaire conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Bouygues Energies et Services en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance était irrecevable faute pour la société Bouygues Energies et Services d'avoir respecté la procédure contractuelle de règlement des différends ;
- l'important retard affectant la réalisation des prestations du groupement titulaire du marché n'est pas imputable au seul retard de livraison des mâts et des bornes d'éclairage ;
- en tout état de cause, les retards liés à la non-conformité des mâts et candélabres fournis étaient de la seule responsabilité de la société Bouygues Energie et Services.
Par ordonnance du 3 novembre 2016, prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée avec effet immédiat.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- et les observations de Me Bardoul, avocat de la société Bouygues Energies et Services, et celles de Me Gourdain, avocat de la communauté de communes Estuaire et Sillon.
Une note en délibéré présentée pour Bouygues Energie et Services a été enregistrée le 17 mars 2017.
1. Considérant que, par un contrat signé le 6 janvier 2009, la communauté de communes Coeur d'Estuaire, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la communauté de communes Estuaire et Sillon, a confié à un groupement composé de la société ETDE, aux droits de laquelle vient la société Bouygues Energies et Services, et de la société Mainguy, le lot n° 2 " génie civil de télécommunications - éclairage public - sécurisation - eau potable " des travaux d'aménagement de la ZAC de la Folaine ; que la date d'effet de la réception des travaux, prononcée avec des réserves, qui ont ensuite été levées, a été fixée au 14 septembre 2011 ; que le 5 novembre 2012 le maître d'oeuvre des travaux, la société Sogreah Consultants, a adressé à la société Bouygues Energies et Services le décompte général du marché, lequel retenait une somme de 191 621,66 euros de pénalités de retard et fixait le solde du marché à la somme de 55 133,10 euros TTC au débit du titulaire ; que la société Bouygues Energies et Services relève appel du jugement du 25 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à ce que le décompte du marché soit arrêté à la somme de 2 465 240,51 euros et que la communauté de communes Coeur d'Estuaire soit condamnée à lui verser la somme de 136 488,56 euros, correspondant au solde lui restant dû de ce décompte, assorti des intérêts moratoires à compter du 8 juillet 2011, ainsi que la somme de 2 734,62 euros, correspondant aux intérêts moratoires, sur un acompte de 325 942,89 euros, du 17 mars 2011 au 8 juillet 2011;
Sans qu'il soit de besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4.3 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché litigieux : " Les pénalités encourue en cas de dépassement des délais contractuels sont celles définies à l'article 20.1 du CCAG-TX, à savoir 1/ 3 000ème du montant de l'ensemble du marché ou de la tranche considérée, par jour de retard. Ces pénalités interviendront de plein droit sur simple constatation du retard par le Maître d'oeuvre et sans qu'il soit besoin pour celui-ci d'adresser à l'Entreprise une mise en demeure préalable. (...) " ; qu'il résulte du décompte des pénalités que la communauté de communes a retenu 282 jours de retards imputables à la société ETDE s'agissant de la tranche ferme et 346 jours de retards pour chacune des tranches conditionnelles ;
3. Considérant que si la société requérante ne conteste plus en appel le calcul des pénalités, elle soutient que le retard ne lui serait pas imputable ; que le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché prévoyait, dans son article 3.2.6., des mâts d'éclairage pour luminaire de type I " exemples : Moshi de chez Aubrilam / Modèles similaires " et des bornes d'éclairages " exemples : Antalia de chez Aubrilam, / Modèles similaires " ; qu'il résulte de l'instruction, notamment des comptes rendus de chantier d'octobre et novembre 2009 et janvier 2010, que le maître d'ouvrage a refusé les modèles similaires proposés par la société ETDC et exprimé sa préférence pour les fournitures d'Aubrilam en demandant néanmoins que les spécifications techniques de ces produits soient vérifiées ; que, le 20 novembre 2009, la société ETDE a rédigé un courrier, dont l'existence n'est pas contestée, mais dont on ne sait pas s'il a été adressé au maître d'ouvrage ou au maître d'oeuvre, pour indiquer les exigences que devaient respecter les produits Aubrilam pour satisfaire aux normes C17200 et C17205, imposées par le CCTP ; que, cependant, ce courrier, qui se borne à lister les normes de sécurité imposées aux mâts et bornes d'éclairage, est antérieur au choix exprimé en dernier lieu par le maître d'ouvrage lors de la réunion de chantier du 13 janvier 2010, et aux vérifications alors demandées ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'après cette réunion, la société ETDE aurait alerté le maître d'oeuvre ou le maître d'ouvrage sur les non-conformités des produits Aubrilam et sur les difficultés de mise en oeuvre qui pouvaient en résulter ; que dans ces conditions, les retards qui ont ensuite résulté des difficultés liées à l'adaptation de ces produits ne peuvent être regardés comme imputables au maître d'ouvrage mais sont imputables à l'entreprise, qui était responsable, vis-à-vis du maître d'ouvrage, de l'exécution des travaux dans le respect des normes imposées par le marché et par les règles de l'art ;
4. Considérant, d'autre part, que la société requérante n'établit pas, par la seule production du décompte du mois de janvier 2011, d'un montant de 1 999 358,73 euros TTC, reçu par le maître d'oeuvre le 27 mai 2011 et transmis par lui le 31 mai 2011, qu'elle serait fondée à demander des intérêts moratoires sur la somme de 325 942,89 euros HT, du 17 mars 2011 au 8 juillet 2011 ;
5. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Bouygues Energies et Services n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 25 mars 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté de communes Coeur d'Estuaire à lui verser la somme de 136 488,56 euros, assortie des intérêts moratoires, correspondant au solde du marché signé le 6 janvier 2009, ainsi que la somme de 2 734,62 euros, correspondant à des intérêts moratoires sur un acompte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la communauté de communes Estuaire et Sillon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la société Bouygues Energies et Services la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la communauté de communes Estuaire et Sillon ;
DECIDE
Article 1er : La requête de la société Bouygues Energies et Services est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes Estuaire et Sillon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : le présent arrêt sera notifié à la société Bouygues Energies et Services et à la communauté de communes Estuaire et Sillon.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 mars 2017.
Le rapporteur,
S. RIMEULe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 15T001612