2°) d'enjoindre à la commune de Lanvallay de lui délivrer le permis de construire sollicité ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son projet est compatible avec le schéma de cohérence territoriale du " Pays de Dinan " ; du fait de la saturation de l'appareil commercial existant, le risque d'évasion commerciale au détriment de Lanvallay est important ;
- l'avis défavorable de la Commission nationale d'aménagement commercial est insuffisamment motivé, notamment en ce qui concerne le premier motif de refus ;
- il est entaché d'illégalité ; il n'existe pas de vacance commerciale à Dinan-Lehon, ni dans la zone de chalandise ; le projet est localisé dans une ZACOM propre à Lanvallay ; le risque de dévitalisation du commerce à Dinan n'est pas établi ; la circonstance que la commune de Dinan ait été lauréate de l'appel à projet régional " Dynamisme des bourgs ruraux et des villes de Bretagne " en 2019 est sans incidence ; le projet favorisera le rééquilibrage entre les deux rives de la Rance, qui sépare Dinan et Lanvallay ;
- le motif lié au stationnement est inopérant dès lors que le projet est prévu dans le cadre de l'extension d'un ensemble commercial existant, sans création d'aires de stationnement supplémentaires ni consommation d'espaces naturels ou agricoles ; le bâtiment sera modernisé pour devenir producteur d'énergies renouvelables ;
- le projet permet de réduire l'évasion commerciale et les déplacements vers Dinan, Rennes et Saint-Malo ;
- son projet satisfait aux critères d'évaluation de l'article L. 752-6 du code de commerce.
Un mémoire en production de pièces, enregistré le 20 novembre 2020, a été présenté par la Commission nationale d'aménagement commercial.
Par une intervention enregistrée le 27 novembre 2020, la commune de Lanvallay, représentée par Me Coudray, demande que la cour fasse droit aux conclusions de la requête de la société Expan Lanvallay tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2020, qu'il soit enjoint à la Commission nationale d'aménagement commercial de procéder à un nouvel examen de la demande d'autorisation d'exploitation commerciale déposée par la société Expan Lanvallay dans un délai de deux mois et que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial du 10 juin 2020 est entaché d'illégalité.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Buffet,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- et les observations de Me Cazin, pour la société Expan Lanvallay et de Me Hauuy, pour la commune de Lanvallay.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 27 juillet 2020, le maire de Lanvallay a refusé de délivrer à la société Expan Lanvallay le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale qu'elle sollicitait en vue de l'extension de 2 450 à 4 000 m2 d'un ensemble commercial existant à l'enseigne " Super U " et de l'extension de 223 m² à 314 m2 du " drive ", sur le territoire de la commune. La société Expan Lanvallay et la commune de Lanvallay demandent l'annulation de cet arrêté.
Sur l'intervention de la commune :
2. La commune de Lanvallay, sur le territoire de laquelle se situe l'extension de l'ensemble commercial projetée et qui est favorable au projet de la société Expan Lanvallay, justifie d'un intérêt suffisant à l'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite, son intervention à l'appui de la requête formée par la société Expan Lanvallay est recevable.
Sur les conclusions de la société Expan Lanvallay :
En ce qui concerne le cadre juridique :
3. Aux termes du troisième alinéa de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat : " (...) Les pouvoirs publics veillent à ce que l'essor du commerce et de l'artisanat permette l'expansion de toutes les formes d'entreprises, indépendantes, groupées ou intégrées, en évitant qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux et ne soit préjudiciable à l'emploi ".
4. Aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés. ".
5. Enfin, aux termes de l'article L. 752-6 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " I. L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; / f) Les coûts indirects supportés par la collectivité en matière notamment d'infrastructures et de transports ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; (...) / III. La commission se prononce au vu d'une analyse d'impact du projet, produite par le demandeur à l'appui de sa demande d'autorisation. Réalisée par un organisme indépendant habilité par le représentant de l'Etat dans le département, cette analyse évalue les effets du projet sur l'animation et le développement économique du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre, ainsi que sur l'emploi, en s'appuyant notamment sur l'évolution démographique, le taux de vacance commerciale et l'offre de mètres carrés commerciaux déjà existants dans la zone de chalandise pertinente, en tenant compte des échanges pendulaires journaliers et, le cas échéant, saisonniers, entre les territoires....) ".
6. Il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.
En ce qui concerne la légalité du permis de construire en litige :
7. A l'appui de sa requête, la société Expan Lanvallay soutient que le refus du maire est illégal du fait de l'illégalité de l'avis défavorable émis le 10 juin 2020 par la Commission nationale d'aménagement commercial.
8. Il ressort des pièces du dossier que pour émettre son avis défavorable la commission nationale a considéré que le projet, situé à 2,6 km à pied et 4,9 km en voiture du centre-ville de Dinan, principale commune de la zone de chalandise viendra, compte tenu de son envergure, renforcer ce pôle éloigné du centre-ville, alors que la ville de Dinan a été lauréate de l'appel à projet régional " dynamisme des bourgs ruraux et des villes en Bretagne " en 2019, qu'il " apparaît peu vertueux en matière de développement durable " et qu'au regard de la fréquence de passage des bus, toute les 45 minutes, il " reviendra à renforcer un pôle de périphérie de la commune de Dinan, entrainant ainsi une hausse des déplacements carbonés avec 90 % des déplacements annoncés en voiture sans fournir de mode alternatif de transport ".
9. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport du service instructeur de la Commission nationale d'aménagement commercial, que l'ensemble commercial exploité par la société Expan Lanvallay se situe, à Lanvallay, en entrée de ville, dans un secteur classé par le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du " Pays de Dinan " dans la zone d'aménagement commercial (ZACOM) " Charles de Gaulle " au sein d'une centralité commerciale, dont le périmètre couvre 13 hectares. En outre le projet d'aménagement et de développement durables du SCOT précise que " la commune de Lanvallay devra affirmer son rôle structurant de centralité tant au niveau du " Pays de Dinan " en relation avec l'environnement départemental et régional au travers des équipements, services et commerces ". Il ressort également des pièces du dossier que la commune de Lanvallay connait une évolution démographique dynamique, que le taux de vacance commerciale est faible tant dans cette commune (3,85 %) que dans celle de Dinan (1,21% taux net pour un taux de 3,3% brut), et qu'entre 2014 et 2017, seuls 3 commerces sur 264 ont fermé à Dinan, fermetures au demeurant compensées par la création d'un commerce à Lanvallay. Il n'est pas contesté que le projet est de nature à favoriser le rééquilibrage de l'offre commerciale au profit des communes de la rive droite, faiblement équipées, de la Rance. Enfin, compte tenu de la localisation de cet équipement commercial et de ce que son accès depuis la commune de Dinan s'effectue par le viaduc de Dinan, il n'est pas établi que l'extension projetée dans cette zone commerciale préexistante aurait pour effet de fragiliser les commerces et le centre-ville de cette commune, alors même que Dinan a été lauréate de l'appel à projet régional " dynamisme des bourgs ruraux et des villes en Bretagne " en 2019.
10. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que le nombre de places de stationnement restera identique, l'extension se faisant dans le prolongement de la construction existante, sans consommation d'espaces naturels ou agricoles, et que le traitement paysager de cet équipement comprend la plantation plus de 80 arbres de haute tige. Ainsi, le projet privilégie la densification, sans artificialisation, de la zone commerciale existante. Le bâtiment sera également modernisé pour devenir producteur d'énergies renouvelables, 285 panneaux photovoltaïques étant installés sur la toiture de l'extension. Enfin, compte tenu de ce que l'extension projetée se situe dans une vaste zone commerciale existante et de ce que, selon les énonciations mêmes du rapport des services instructeurs de la commission nationale, la fréquentation de cette zone " résulte de personnes qui utilisent ces axes de circulation pour le travail, les écoles, les loisirs ", il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet entrainera une augmentation significative des déplacements automobiles.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la Commission nationale d'aménagement commercial en estimant, par les motifs qu'elle a retenus, que le projet serait de nature à compromettre les objectifs fixés à l'article L. 752-6 du code de commerce, a entaché d'illégalité son avis. Par suite, la société Expan Lanvallay est fondée à soutenir que le refus opposé à sa demande de permis de construire valant autorisation commerciale par le maire de Lanvallay, lequel a intégralement repris les motifs retenus par la commission, est illégal du fait de l'illégalité de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, la société requérante est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2020 du maire de Lanvallay.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Le présent arrêt implique nécessairement que la Commission nationale d'aménagement commercial procède à un nouvel examen de la demande de la société Expan Lanvallay dont elle se trouve à nouveau saisie. Il y a lieu d'enjoindre à la commission nationale un tel réexamen dans un délai de quatre mois à compter de la notification de présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
13. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, agissant en qualité de personne morale support de la Commission nationale d'aménagement commercial, le versement à la société Expan Lanvallay d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La commune de Lanvallay, qui a la qualité d'intervenante et non de partie à l'instance, ne peut en revanche prétendre au bénéfice de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : L'intervention de la commune de Lanvallay est admise.
Article 2 : L'arrêté du 27 juillet 2020 par lequel le maire de Lanvallay a refusé de délivrer à la société Expan Lanvallay le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale qu'elle sollicitait est annulé.
Article 3 : Il est enjoint à la Commission nationale d'aménagement commercial de réexaminer la demande de la société Expan Lanvallay dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la société Expan Lanvallay une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la commune de Lanvallay sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Expan Lanvallay, à la commune de Lanvallay et au ministre de l'économie, des finances et de la relance (Commission nationale d'aménagement commercial).
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- Mme Buffet, présidente-assesseure,
- M. Frank, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le du 1er février 2022.
La rapporteure,
C. BUFFETLe président,
J. FRANCFORT
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT02899