Par un jugement n°s 1705493, 1705494 du 17 janvier 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 janvier 2020, Mme D... G..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 1705493, 1705494 du 17 janvier 2020 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de Saint-Médard-sur-Ille a retiré le permis de construire qui lui avait été délivré le 13 décembre 2012 en vue de l'édification d'une clôture et d'un abri de voiture sur un terrain situé au lieu-dit " Les Préaux " ;
3°) d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de Saint-Médard-sur-Ille a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de l'édification d'une clôture et d'un abri de voiture sur un terrain situé au lieu-dit " Les Préaux " ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Médard-sur-Ille la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 5 octobre 2017 portant retrait du permis de construire est intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration faute d'avoir été précédé d'une procédure contradictoire ; cette procédure contradictoire constitue une garantie ; l'irrégularité doit emporter l'annulation de la décision contestée ;
- l'administration n'est pas en situation de compétence liée pour retirer une autorisation en cas de constat d'une fraude ; la commune disposait d'un pouvoir d'appréciation lui permettant de décider de maintenir ou non l'autorisation d'urbanisme ;
- la décision du 5 octobre 2017 portant retrait du permis de construire est entachée d'erreur d'appréciation, dès lors que le permis de construire retiré n'a pas été obtenu par fraude ; les conditions permettant de caractériser la fraude ne sont pas réunies ;
- la décision du 5 octobre 2017 refusant le permis de construire est illégal ; le motif tiré de ce que les constructions projetées empiètent sur la parcelle voisine n'est pas opposable à la demande d'autorisation de construire, mais à son exécution ; lorsque le maire s'est prononcé, il ignorait que le projet empiétait sur la propriété d'un tiers.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2020, la commune de Saint-Médard-sur-Ille, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme G... le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune de Saint-Médard-sur-Ille.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 13 décembre 2012, le maire de la commune de Saint-Médard-sur-Ille a délivré à Mme G... un permis autorisant la construction d'un abri de voiture ainsi que l'édification d'une clôture, sur un terrain situé au lieu-dit " Les Préaux ". Par deux arrêtés du 25 septembre 2014, le maire de la commune a toutefois respectivement retiré le permis de construire du 13 décembre 2012 au motif de ce qu'il avait été obtenu par fraude et a statué à nouveau sur la demande de permis de construire pour en refuser la délivrance au motif que le plan de masse ne respectait pas le plan de bornage et que les constructions étaient implantées sur la propriété d'un tiers. Mme G... a formé un recours contre ces deux arrêtés et en a obtenu l'annulation par un jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 12 mai 2017 au motif du non-respect par le maire de Saint-Médard-sur-Ille de la procédure contradictoire préalable prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, dans sa rédaction alors applicable. Par deux arrêtés du 5 octobre 2017, le maire de Saint-Médard-sur-Ille a, d'une part, procédé au retrait du permis de construire délivré le 13 décembre 2012 et, d'autre part, refusé de délivrer le permis de construire sollicité. Mme G... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.
Sur la légalité de la décision du 5 octobre 2017 portant retrait du permis de construire délivré le 13 décembre 2012 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". La décision portant retrait d'un permis de construire est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle doit, par suite, être précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.
3. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'avant de retirer le permis de construire délivré à Mme G... le 13 décembre 2012, le maire de la commune de Saint-Médard-sur-Ille a invité le titulaire du permis de construire à présenter ses observations. Si la commune de Saint-Médard-sur-Ille justifie de l'envoi, le 12 juin 2017, d'une lettre informant Mme G... de l'intention du maire de procéder au retrait de l'arrêté de permis de construire du 13 décembre 2012, elle ne produit aucune pièce susceptible d'établir que le courrier aurait été effectivement réceptionné par l'intéressée, ou que celle-ci serait réputée en avoir eu connaissance par la délivrance d'un avis de passage, l'avisant de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste dont elle relève et retourné à l'expéditeur à l'expiration du délai de mise en instance prévu par la réglementation postale. Par suite, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de la commune ait été en situation de compétence liée pour retirer le permis de construire du 13 décembre 2012, l'arrêté contesté du 5 octobre 2017 est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.
4. Toutefois, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. Si le respect, par l'autorité administrative compétente, de la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration constitue une garantie pour le titulaire du permis de construire que le maire envisage de retirer, la décision de retrait prise par le maire n'est illégale que s'il ressort de l'ensemble des circonstances de l'espèce que le titulaire du permis a été effectivement privé de cette garantie.
5. En l'espèce, par une requête enregistrée le 26 novembre 2014 au greffe du tribunal administratif de Rennes sous le n° 1405137, Mme G... a demandé l'annulation de l'arrêté en date du 25 septembre 2014 par lequel le maire de Saint-Médard-sur-Ille a procédé au retrait du permis de construire délivré le 13 décembre 2012 en vue de l'édification d'une clôture et d'un abri de voiture, au motif de ce qu'il a été obtenu par fraude. Au cours de cette instance, Mme G... a pu faire valoir ses observations et contester l'appréciation de l'administration. Si par un jugement du 12 mai 2017, devenu définitif, le tribunal administratif a considéré que le motif de la décision portant retrait du permis de construire n'était pas entaché d'illégalité, il a toutefois annulé ladite décision au motif de ce qu'elle était intervenue au terme d'une procédure irrégulière. Dans ces conditions, Mme G... ne pouvait ignorer que le maire de Saint-Médard-sur-Ille était susceptible de procéder une nouvelle fois au retrait du permis de construire du 13 décembre 2012, au motif de ce qu'il a été obtenu par fraude. Mme G... doit ainsi être regardée, en raison de sa connaissance des motifs de fait et de droit susceptible de fonder la décision de retrait du maire, comme ayant été mise en mesure de présenter ses observations. Par suite, et dans le contexte particulier de l'espèce, la circonstance que Mme G... n'aurait pas reçu la lettre du maire, l'informant de son intention de retirer le permis de construire, n'a pas effectivement privé l'intéressée d'une garantie et ne peut être regardée comme ayant été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision finalement prise. Dès lors, Mme G... n'est pas fondée à invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration pour demander l'annulation de la décision contestée.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire ". Toutefois, une autorisation obtenue par fraude ne pouvant acquérir de caractère définitif et créer des droits au profit de son bénéficiaire, elle peut être abrogée ou retirée par l'autorité compétente, alors même que le délai qui lui est normalement imparti à cette fin serait expiré. Un permis de construire est entaché de fraude lorsque l'auteur de la demande s'est livré à des manoeuvres de nature à fausser l'appréciation portée par l'administration sur la conformité de la construction projetée à la réglementation d'urbanisme ou a fourni volontairement des indications erronées et des faux renseignements de nature à induire en erreur l'administration. La fraude ne se présume pas et doit être distinguée de simples renseignements inexacts fournis de bonne foi.
7. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté du 5 octobre 2017 par lequel le maire de Saint-Médard-sur-Ille a procédé au retrait du permis de construire délivré à Mme G... le 13 décembre 2012, est fondé sur le motif tiré de ce que ce permis de construire a été obtenu par fraude, en ce qu'il a été accordé sur le fondement d'un plan de masse erroné, produit par la requérante en toute connaissance de cause à l'appui de sa demande, de nature à induire en erreur l'administration en vue d'obtenir une décision favorable.
8. En l'espèce, avant de déposer sa demande de permis de construire, le 22 octobre 2012, Mme G... ne pouvait ignorer qu'elle n'était pas propriétaire d'une partie des terrains d'assiette accueillant les constructions projetées, dès lors qu'un arrêt de la cour d'appel de Rennes du 2 octobre 2012, rendu à sa demande, a confirmé que le procès-verbal de bornage du 12 décembre 2007 fixait définitivement les limites séparatives des propriétés respectives de Mme G... et de ses voisins. Or, il est constant que le plan masse produit dans son dossier de demande de permis de construire, déposé peu après que Mme G... a eu connaissance du prononcé de l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, n'est pas conforme à ce plan de bornage du 12 décembre 2007. Par suite, en attestant qu'elle avait qualité pour présenter cette demande, certifiant ainsi au maire de Saint-Médard-sur-Ille qu'elle était en droit de faire réaliser les travaux à l'emplacement indiqué sur le plan fourni, alors qu'elle ne pouvait ignorer que cette attestation était inexacte, Mme G... a volontairement induit en erreur l'administration en vue d'obtenir une décision favorable. Dans ces conditions, le permis de construire délivré le 13 décembre 2012 doit être regardé comme ayant été obtenu frauduleusement. Il en résulte que le permis de construire du 13 décembre 2012 n'a pu acquérir un caractère définitif et créer des droits au profit de la requérante, et pouvait dès lors être retiré par le maire de la commune de Saint-Médard-sur-Ille à tout moment. Par suite, Mme G... n'est pas fondée à soutenir qu'en retirant le permis de construire litigieux, le maire de la commune a commis une erreur de droit ou a porté une inexacte appréciation des faits.
9. En troisième lieu, si Mme G... soutient que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, elle n'assortit cependant son moyen d'aucune argumentation tendant à démontrer que le retrait prononcé porte aux intérêts publics et privés en présence une atteinte disproportionnée justifiant le maintien de l'acte litigieux.
Sur la légalité de l'arrêté du 5 décembre 2017 portant refus de délivrance du permis de construire sollicité par Mme G... :
10. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, sont accordées sous réserve du droit des tiers. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Il en est notamment ainsi lorsque l'autorité saisie de la demande de permis de construire est informée de ce que le juge judiciaire a remis en cause le droit de propriété sur le fondement duquel le pétitionnaire avait présenté sa demande.
11. En l'espèce, saisi de nouveau de la demande de permis de construire de Mme G... du fait du retrait du permis de construire du 13 décembre 2012, le maire de Saint-Médard-sur-Ille a été informé de l'existence de l'arrêt de la cour d'appel de Rennes du 2 octobre 2012, mentionné au point 8, et du caractère définitif du plan de bornage établi le 12 décembre 2007. Or, il ressort des pièces du dossier, et notamment des plans joints au dossier de demande de permis de construire, qu'une partie des constructions projetées doivent s'implanter sur la parcelle cadastrée à la section D n° 220, laquelle n'est pas mentionnée dans la demande de permis comme faisant partie du terrain d'assiette du projet et dont Mme G... n'est pas propriétaire. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le maire de Saint-Médard-sur-Ille a commis une erreur de droit et une erreur de fait en se fondant, pour rejeter la demande d'autorisation des constructions projetées, sur la circonstance que Mme G... ne disposait d'aucun droit pour déposer cette demande.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Médard-sur-Ille, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme G... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 1 500 euros à la commune de Saint-Médard-sur-Ille au titre des mêmes frais.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.
Article 2 : Mme G... versera à la commune de Saint-Médard-sur-Ille la somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... G... et à la commune de Saint-Médard-sur-Ille.
Délibéré après l'audience du 5 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme E..., présidente-assesseur,
- M. B..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mars 2021.
Le rapporteur,
A. B...Le président,
T. CELERIER
Le greffier,
C. POPSE
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT00333