Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 décembre 2017 et 11 octobre 2018, l'association " Environnement et Paysage en Haute Bretagne ", l'Association " Dinard Côte d'Émeraude Environnement ", M. et Mme N...F..., M. D...B..., M. K...J..., Mme L...M...et M. E...H..., représentés par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 octobre 2017 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 18 décembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur requête est recevable ;
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il est entaché d'une omission à statuer s'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article NPb3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de Marcillé Raoul ;
- le dossier de demande de permis de construire est insuffisant s'agissant de l'insertion du projet dans son environnement ;
- les arrêtés attaqués ont été pris en méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- les arrêtés attaqués ont été pris en méconnaissance de l'article NPb3 du règlement du PLU de Marcillé Raoul ;
- les arrêtés attaqués ont été pris en méconnaissance du principe de précaution ;
- les arrêtés attaqués ont été pris en méconnaissance de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme ;
- les arrêtés attaqués ont été pris en méconnaissance de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme.
Par une lettre enregistrée le 19 avril 2018, Mme N...F...a été désignée par son mandataire, MeC..., en qualité de représentant unique, destinataire de la notification de la décision à venir.
Par un mémoire enregistré le 11 octobre 2018, M. E...H...déclare se désister de la présente instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2018, la société Boralex opérations et développement, anciennement Enel Green Power France, représentée par MeI..., demande à la cour de rejeter la requête et de mettre conjointement à la charge des requérants la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que la requête de première instance était irrecevable car les demandeurs n'avaient pas intérêt à agir et qu'en tout état de cause les moyens d'annulation soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2018, le ministre de la cohésion des territoires demande à la cour de rejeter la requête.
Il fait valoir qu'il s'en rapporte aux écritures du préfet d'Ille-et-Vilaine dans ses mémoires présentés devant le tribunal administratif de Rennes.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 25 octobre 2018.
Un mémoire, présenté pour la société Boralex opérations et développement, a été enregistré le 25 octobre 2018 et n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- la charte de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Picquet,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant M. et Mme F...et autres et de Me I...représentant la société Boralex.
Considérant ce qui suit :
1. Par six arrêtés du 18 décembre 2014, le préfet d'Ille-et-Vilaine a délivré six permis de construire à la société Enel Green Power France pour la réalisation de six éoliennes d'une hauteur maximum de 145 mètres créant une surface de plancher de 44 mètres carrés, dans les lieux-dits Lande de Marcillé et Etoube-Beuve, sur le territoire de la commune de Marcillé-Raoul. L'association " Environnement et Paysage en Haute Bretagne ", l'Association " Dinard Côte d'Émeraude Environnement ", M. et MmeF..., M. D... B..., M. K...J..., Mme L...M..., M. E...H..., et M. E... G...ont demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de ces six arrêtés, ainsi que des décisions du 9 mars 2015 portant rejet de leur recours gracieux. Par un jugement du 13 octobre 2017, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ces demandes. L'association " Environnement et Paysage en Haute Bretagne ", l'Association " Dinard Côte d'Émeraude Environnement ", M. et Mme N...F..., M. D...B..., M. K...J..., Mme L...M...et M. E... H...font appel de ce jugement.
Sur le désistement d'instance de M. E...H...:
2. Par un mémoire enregistré le 11 octobre 2018, M. E...H...déclare se désister de son instance. Le désistement de M. H...est pur et simple. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.
Sur la régularité du jugement :
3. Il ressort des écritures des requérants en 1ère instance, et en particulier de leur " mémoire récapitulatif et en réponse n° 3 ", rédigé par un avocat, que si l'article NPb3 du règlement du PLU a été cité dans son intégralité, ce n'était que dans le cadre d'une rubrique VIII intitulée " sur les conséquences dommageables pour l'environnement ", dans laquelle l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme était mentionné en préambule, et dans une sous-rubrique VIII.3 intitulée " les atteintes à la faune et la flore ". Il ressort de ces écritures que les requérants n'ont cité l'article NPb3 du règlement du PLU qu'afin de soutenir, non pas que cet article avait été méconnu, mais que le service instructeur était tenu de se prononcer sur la question des accès et que ces derniers étaient en l'espèce en partie sur des zones humides. Si les requérants ont soulevé, dans le cadre d'une rubrique VI, le moyen tiré de l'insuffisance des voies de desserte et les risques pour la sécurité publique, ils ne citent dans cette rubrique que l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Dès lors le moyen tiré de la méconnaissance de l'article NPb3 du règlement du PLU n'était pas soulevé en 1ère instance. Par suite, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'une irrégularité en ne répondant pas à ce moyen.
Sur le bien fondé du jugement :
4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".
5. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
6. Il est constant que le volet paysager de l'étude d'impact a été joint au dossier de demande de permis de construire. Ce volet paysager a recensé les différents monuments et sites protégés aux pages 25 et 26, seuls deux monuments historiques se trouvant dans l'aire d'étude rapprochée. De nombreux photomontages, présents à partir de la page 118, analysent l'impact du projet sur ces monuments. S'agissant en particulier du château de la Ballue, deux photomontages à la page 126 font état d'un écran végétal entre le château et le projet. Si les requérants produisent des photographies prises depuis le château sur lesquelles apparait le mât de mesure, la visibilité est faible et ne remet pas radicalement en cause les éléments mentionnés dans l'étude d'impact. En outre, le projet litigieux est situé à 30 km du Mont St-Michel, protégé au titre de l'UNESCO. Les photomontages figurant aux pages 130 et 141 établissent un impact nul à négligeable sur la baie du Mont St-Michel du fait du relief et de la distance. Ainsi, alors même que la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) de Bretagne a indiqué dans son avis du 24 février 2014 que le projet n'apporte pas d'informations suffisantes au regard des points de vue emblématiques du territoire et que la méthodologie préconisée par une étude de 2009 relative à la capacité du paysage à accueillir le grand éolien en Ille et Vilaine établie par la préfecture n'a pas été respectée, cette étude n'ayant au demeurant pas de valeur réglementaire, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande de permis de construire doit être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".
8. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'étude d'impact, que l'acheminement des aérogénérateurs et du matériel nécessaire à la construction des éoliennes ainsi qu'à leur futur démantèlement doit s'effectuer le plus possible par les voies de circulation existantes, en les élargissant par endroits afin qu'elles atteignent une largeur de 5 mètres. Un état des lieux préalable des routes et chemins est prévu. Par ailleurs, il ressort également de l'étude d'impact que l'acheminement des composants des éoliennes s'effectue par convois exceptionnels encadrés par la gendarmerie, de manière très ponctuelle, limitant ainsi les perturbations occasionnées, avec une information et une signalisation si nécessaire. Lors du chantier et lors de l'exploitation, un balisage de la zone de travail au sol et une signalisation sont prévus. Il n'est pas davantage établi par les pièces du dossier que la circulation engendrée par le projet sur les voies de desserte prévues à cet effet, lesquelles se situent dans des zones peu urbanisées non sujettes à un trafic important mais permettant le passage d'engins agricoles, créerait un risque pour la sécurité publique. Si le projet est situé, pour partie, en zone humide, l'étude d'impact prévoit notamment la réalisation d'une étude géotechnique avec la réalisation de sondages et il n'est pas établi qu'un risque d'inondation aurait été tel qu'il aurait justifié un refus de permis de construire.
9. D'autre part, il n'est pas établi qu'une habitation serait à moins de 500 mètres du parc litigieux. Si la page 295 de l'étude d'impact mentionne " On constate qu'il y a quelques dépassements d'émergence en phase diurne avec les turbines testées. Des émergences non conformes sont relevées sur certains points en période de nuit, pour des vitesses de vent comprises entre 5 m/s et 10 m/s (vitesse de référence à 10 m) ", elle indique également qu' " un programme de fonctionnement du parc permet alors, avec les modes de réduction de bruit et des arrêts machines, de respecter la réglementation en vigueur " et qu' " À la mise en service du parc éolien, une campagne de mesures sera réalisée afin d'actualiser les éléments techniques et réglementaires. Le plan de fonctionnement des turbines sera alors, au besoin, élaboré. ". De même, à la page 300, l'étude d'impact indique qu' " Étant donné la distance importante entre les éoliennes et les habitations, aucun impact notable lié aux sons basses fréquences n'est présent ", les études mentionnées par les requérants pour contredire ce point faisant débat en l'état des connaissances scientifiques et ne pouvant donc être regardées comme des référentiels opposables.
10. Par suite, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme précité en délivrant les permis contestés.
11. En troisième lieu, aux termes de l'article NPb 3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Marcillé Raoul intitulé " accès et voirie " : " 3.1 -Accès (...) 3.1.2. Dans tous tes cas, les caractéristiques des accès doivent répondre à l'importance et à la destination de l'immeuble ou ensemble d'immeubles à desservir. 3.1.3. L'autorisation d'utilisation du sol peut être subordonnée à la réalisation d'aménagements particuliers concernant les accès en tenant compte de l'intensité de la circulation et de la sécurité publique. 3.2 -Voirie 3.2.1. Les terrains devront être desservis par des voies publiques ou privées répondant à l'importance et à la destination des constructions qui doivent y être édifiées, notamment en ce qui concerne la commodité de la circulation, des accès et des moyens d'approche permettant une lutte efficace contre l'incendie. (...) ".
12. Il est constant que le projet nécessitera l'aménagement des voies d'accès et des aires de levage et en particulier le renforcement d'une voie communale pour l'acheminement, le montage des éléments des machines. Toutefois, d'une part, ces dispositions ne sont pas opposables aux voies de desserte des éoliennes, internes au terrain d'assiette du projet. D'autre part, elles ne sont pas davantage opposables aux conditions dans lesquelles est réalisé un chantier de construction, seules invoquées par les requérants. Ainsi, alors même que le dossier ne contenait pas l'accord de la commune propriétaire de la voie à renforcer, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article NPb3 du règlement du PLU de la commune de Marcillé Raoul doit être écarté.
13. En quatrième lieu, il est énoncé à l'article 5 de la charte de l'environnement à laquelle le préambule de la Constitution fait référence en vertu de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 que : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ". Ces dernières dispositions qui n'appellent pas de dispositions législatives ou réglementaires en précisant les modalités de mise en oeuvre s'imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs domaines de compétence respectifs.
14. Pour les raisons mentionnées au point 9 et dès lors que les éléments cités par les requérants, en particulier s'agissant des ondes émises par les éoliennes, ne suffisent pas à regarder l'existence d'un risque pour la santé comme une hypothèse suffisamment plausible en l'état des connaissances scientifiques, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de précaution ne peut qu'être écarté en l'espèce.
15. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. ". Cet article ne permet pas à l'autorité administrative de refuser un permis de construire, mais seulement de l'accorder sous réserve du respect de prescriptions spéciales relevant de la police de l'urbanisme, telles que celles relatives à l'implantation ou aux caractéristiques des bâtiments et de leurs abords, si le projet de construction est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. A ce titre, s'il n'appartient pas à cette autorité d'assortir le permis de construire délivré pour une installation classée de prescriptions relatives à son exploitation et aux nuisances qu'elle est susceptible d'occasionner, il lui incombe, en revanche, le cas échéant, de tenir compte des prescriptions édictées au titre de la police des installations classées ou susceptibles de l'être.
16. D'une part, il ressort de l'étude d'impact que le niveau d'intérêt que représente l'étang du Boulet, classé site Natura 2000 et inclus en zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique, et floristique (ZNIEFF) de type 1, est de 0/55 pour les chiroptères, aucune espèce n'ayant été recensée en ce lieu. Le dépliant informatif dont se prévalent les requérants ne saurait contredire ces éléments au vu de sa nature et dès lors qu'il porte sur tous les étangs du Canal d'Ille et Rance. Il ressort également de l'étude d'impact que le niveau d'intérêt que représente l'étang du Boulet est de 3/5 pour les oiseaux, cette zone constituant un étang attractif pour les oiseaux de passage (canards et limicoles) et hivernants mais que " la zone d'étude ne semble pas particulièrement accueillante pour l'avifaune hivernante. Nous noterons que de nombreux anatidés étaient présents sur l'étang du Boulet, mais aucun vol de canard n'a été observé sur la zone d'étude ". Si plusieurs espèces d'oiseaux ont été observées en forêt du Bourgouët, pour chacune d'entre elles, les impacts potentiels des éoliennes seront inexistants, leur sensibilité étant faible ou nulle sur le site d'implantation du projet et compte tenu de la distance séparant les éoliennes de la forêt de Bourgouët, comme cela ressort des pages 150 et 151 de l'étude d'impact. Enfin, pour la forêt de Villecartier, située à 10 km de la zone d'étude, il s'agit d'un site de reproduction de certaines espèces citées dans l'étude d'impact, à la page 84 mais l'impact est minime à modéré du fait de la faible présence des espèces en cause dans cette forêt ou de leur abondance en Bretagne. Le marais du Sougéal est quant à lui situé à plus de 15 km du site du projet et aucune incidence n'est établie. En outre, il ressort de l'étude d'impact que plusieurs mesures d'évitement, réduction et compensation sont prévues et notamment la mise en place d'un plan de régulation des éoliennes afin de prévenir les risques de mortalité avec les Pipistrelles et le suivi environnemental du chantier. Ainsi, le moyen tiré des atteintes portées à la faune et à la flore doit être écarté en sa première branche.
17. D'autre part, il ressort des pièces du dossier et notamment d'un avis de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) du 18 septembre 2014, que l'accès à l'éolienne E2 et l'accès aux éoliennes E3, E4 et E5 traversent une zone humide caractérisée à l'inventaire des zones humides de la commune, sur une emprise totale d'environ 600 m2. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que la zone humide impactée, sur une surface peu importante, est banale et ne concerne aucune espèce patrimoniale. Ainsi, la seconde branche de ce moyen tirée de l'atteinte portée à une zone humide doit être écartée.
18. En sixième et dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".
19. Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé dans le second temps du raisonnement, pour apprécier la légalité des permis de construire délivrés, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux visés à l'article R. 111-21 cité ci-dessus.
20. Le site d'implantation ne présente pas de sensibilité justifiant une protection particulière, compte tenu de la nature agricole du site constitué pour l'essentiel de bocage, de la présence de nombreux filtres visuels végétaux, de la présence d'autres éléments de nature industrielle avec des routes départementales et le parc éolien de Tréméheuc, plus au nord. Si plusieurs éléments patrimoniaux sont présents, ils sont pour la plupart éloignés du site, entre 10 et 15 km.
21. Le service territorial de l'architecture et du patrimoine (STAP) a émis un avis défavorable au projet, le 24 février 2014, au motif que le dossier présenté n'apporte pas d'informations paysagères suffisantes pour garantir la bonne intégration du parc éolien de Marcillé-Raoul dans le grand paysage montré depuis plusieurs points. Toutefois, comme il a été indiqué au point 6, le dossier était suffisant pour pouvoir apprécier l'intégration du projet dans son environnement.
22. S'agissant de l'impact du projet sur la baie du Mont Saint-Michel, classée au patrimoine mondial de l'UNESCO, elle est éloignée de 30 km du projet et ce dernier est en dehors de l'aire d'influence paysagère du Mont Saint-Michel définie par les DDTM. Les photomontages, non utilement remis en cause par les fiches de calcul et documents graphiques imprécis des requérants, indiquent qu'il n'existe pas de visibilité ni de covisibilité avec le projet. Concernant le château de la Ballue, situé à 10 km du projet, il ressort de l'étude d'impact qu'un écran végétal permet de protéger le château. Si la photographie produite par les requérants prise depuis le château et faisant figurer un mât de mesure fait apparaître une visibilité, cette dernière n'est pas prégnante. Il ressort des pièces du dossier que la covisibilité avec l'église de Saint-Léger-des-Prés n'est que " ponctuelle et lointaine ", depuis une portion de la route départementale RD 87. L'impact sur le château de Combourg est particulièrement faible compte tenu de la configuration des lieux et de la distance le séparant du projet litigieux, à 9 km. Le projet est visible depuis une portion des remparts du château de Combourg accessibles lors des visites guidées. Le projet ne sera en revanche pas visible depuis le parc du château. La covisibilité est également minime à l'égard de la porte romane du cimetière de Marcillé-Raoul, dès lors que le projet est masqué en grande partie par le bâti et la végétation et que la porte romane ne constitue pas un point d'appel prégnant dans le paysage.
23. S'agissant du mitage qu'engendrerait l'implantation du projet de Marcillé-Raoul à proximité du parc éolien de Bazouges-la-Pérouse, au demeurant non autorisé à la date des arrêtés attaqués, il ressort des photomontages que l'impact sera minime depuis ce lieu, n'entraînant pas de saturation visuelle. Il ressort également des pièces du dossier que les éventuels phénomènes de covisibilité avec le parc de Tréméheuc sont très faibles, du fait de la distance d'une dizaine de kilomètres entre les deux parcs, de leur implantation sur deux reliefs différents et du fait du contexte bocager. Si le parc éolien se situe à proximité des projets de parcs Abowind et EDF Energies nouvelles, qui prévoient chacun l'implantation de nombreuses éoliennes de grande hauteur, il est constant que ces parcs n'ont pas été autorisés. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les caractéristiques du projet refusé en 2008 ne sont pas les mêmes, le nombre d'aérogénérateurs ayant été réduit à six et l'implantation n'étant pas identique.
24. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme précité en délivrant les permis contestés doit être écarté.
25. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir soulevée en défense, que Mme F...et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
26. L'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, il n'y a pas lieu de mettre à sa charge le versement de la somme demandée par les requérants au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme demandée par la société Boralex opérations et développement à ce titre.
DÉCIDE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement d'instance de M. E...H....
Article 2 : La requête de l'association " Environnement et Paysage en Haute Bretagne ", l'Association " Dinard Côte d'Émeraude Environnement ", M. et Mme N...F..., M. D...B..., M. K...J..., Mme L...M...est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société Boralex opérations et développement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme N...F..., représentant unique désigné par MeC..., à la société Boralex opérations et développement, et au ministre de la cohésion des territoires.
Copie en sera adressée, pour information, à M. E...H...et au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 15 février 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président de chambre,
- M. Degommier, président assesseur,
- Mme Picquet, premier conseiller.
Lu en audience publique le 8 mars 2019.
Le rapporteur,
P. PICQUET
Le président,
J-P. DUSSUET
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT03803