Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 22 juillet 2014 et le 13 novembre 2014, Mme G..., représentée par MeI..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 février 2014 ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités dans un délai de 15 jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve de ce que Me I...renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- la décision de rejet de la commission de recours n'est pas motivée ;
- les actes qu'elle a produit établissent la réalité du lien de filiation qui l'attache aux enfants sollicitant les visas au titre du regroupement de la famille d'un réfugié statutaire ;
- ces actes sont conformes au droit malien ;
- les dysfonctionnements de l'état civil malien doivent être pris en compte ;
- elle peut également se prévaloir de la possession d'état notamment du fait de sa participation financière à l'entretien de ses 3 enfants et des preuves des liens qu'elle entretient avec eux ;
- la décision de la commission est entachée d'erreur manifeste ;
- il y a lieu de prendre en compte l'intérêt supérieur de ses enfants ;
- la décision en cause méconnait le droit de la requérante à mener une vie familiale normale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2014, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Le ministre soutient que les moyens soulevés par Mme G... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 26 octobre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 12 novembre 2015.
Un mémoire présenté pour Mme G...a été enregistré le 12 novembre 2015.
Mme G... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 25 juin 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lenoir,
- et les observations de MeB..., substituant MeI..., représentant MmeG....
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeG..., ressortissante malienne née en 1961, est entrée en France en 2004 et a obtenu le bénéfice du statut de réfugié par une décision du directeur de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides en date du 15 septembre 2008 ; qu'elle a sollicité, le 5 novembre 2008, auprès du ministre des affaires étrangères, la délivrance de visas long séjour au profit des mineurs H...E..., D...E...et F...E...qu'elle présentait comme étant ses enfants ; que cette demande a été rejetée par une décision du 5 juillet 2011 des autorités consulaires françaises de Bamako (Mali) ; que Mme G...relève appel du jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 19 février 2014 rejetant sa demande d'annulation de la décision du 16 septembre 2011 de la commission de recours contre les refus de visas qui rejetait elle-même le recours dont elle l'avait saisie à l'encontre de cette décision de refus des autorités consulaires ;
2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée comporte l'énoncé suffisamment précis des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré du défaut de motivation manque ainsi en fait et doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil " ; qu'aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité " ; que cet article pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère ; qu'il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question ;
4. Considérant, par ailleurs, que la circonstance qu'une demande de visa de long séjour ait pour objet le rapprochement familial de membres de la famille d'une personne admise à la qualité de réfugié ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative refuse la délivrance des visas sollicités en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur un motif d'ordre public ; que figure au nombre de ces motifs l'absence de caractère probant des actes d'état civil produits ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les documents que Mme G...présente comme étant des jugements supplétifs d'acte de naissance qui auraient été rendus par le tribunal de première instance de la commune IV du district de Bamako ne sont ni des actes de reconnaissance ni des jugements statuant sur une action en recherche, revendication ou reconnaissance de paternité qui auraient été dirigés à l'égard de la requérante ; que ces documents, qui ne précisent pas à la requête de quelle personne ils auraient été rendus, qui se présentent comme des " extraits conformes " dépourvus de motivation et qui n'indiquent pas l'identité du ou des juges qui les auraient rendus, ne peuvent être regardés comme étant revêtus d'un caractère authentique ; qu'en conséquence, les documents présentés comme étant des copies d'extraits d'acte de naissance n° 723, 725 et 726 qui auraient été dressés le 27 août 2009 par l'officier d'état civil du centre principal de Sogoniko, sur le fondement des jugements supplétifs dont il vient d'être fait mention, sont dépourvus de caractère probant ; qu'ainsi, c'est à bon droit qu'au vu des incohérences relevées, la commission de recours contre les refus de visas a écarté comme non probants les documents présentés par la requérante pour établir son lien de filiation avec les mineurs présentés comme étant ses enfants ;
6. Considérant, en troisième lieu, que si Mme G... se prévaut de la possession d'état et soutient pourvoir à l'éducation et à l'entretien des enfants, elle ne produit aucun élément de nature à établir cette possession d'état alors surtout qu'il ressort des pièces du dossier que les mineurs en cause ont fait l'objet d'une procédure d'adoption le 3 septembre 2009 au profit de la soeur de la requérante ; que, par suite, celle-ci ne saurait se prévaloir de l'existence d'une telle possession d'état pour soutenir que la commission de recours contre les refus de visas aurait commis une erreur d'appréciation ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des points 5 et 6 du présent arrêt que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que, faute pour les documents d'état civil produits de présenter un caractère probant, la filiation entre Mme C...et les quatre demandeurs de visas ne serait pas établie ;
8. Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'en l'absence d'établissement d'un lien de filiation avec BoubacariE..., Daibéré E...et KaditouE..., les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 3, § 1, de la convention relative aux droits de l'enfant et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; qu'il suit de là que doivent être rejetées par voie de conséquences tant ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de délivrer sous astreinte les visas sollicités que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... G...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 19 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Piltant, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 mars 2016.
Le président-assesseur,
J. FRANCFORT
Le président,
H. LENOIR
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01943