Procédure devant la cour :
Les parties ont été invitées, en application des dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, à reprendre, dans un mémoire récapitulatif, les conclusions et moyens qu'elles entendaient présenter dans le cadre de l'instance.
Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2014, complétée par un mémoire récapitulatif enregistré le 19 septembre 2016, M.B..., représenté par MeD..., demande à la cour, dans le dernier état de ses conclusions :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 novembre 2014 ;
2°) de condamner la chambre des métiers à lui verser une somme de 71 927,40 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi, assortie des intérêts légaux à compter du 25 avril 2012, date de réception par la chambre de métiers de sa demande préalable d'indemnisation, et de la capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de la chambre de métiers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B...soutient :
- que la chambre de métiers a commis une illégalité fautive en refusant de renouveler son engagement pour la période du 1er septembre 2005 au 31 août 2010 ;
- que cette illégalité a été constatée par la Cour dans son arrêt du 2 mars 2012 ;
- qu'il est fondé à demander l'indemnisation du préjudice né de cette décision illégale ;
- que la circonstance qu'il ait présenté ses conclusions indemnitaires plusieurs années plus tard est sans incidence sur leur recevabilité ;
- que son préjudice ne prendra fin que lorsqu'il sera physiquement réintégré dans les effectifs de la chambre de métiers.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2016, la chambre de métiers et de l'artisanat de la Vendée, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La chambre de métiers fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par le requérant n'est fondé, de même que ses prétentions indemnitaires.
Par ordonnance du 21 octobre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 14 novembre 2016 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;
- le statut du personnel administratif des chambres des métiers ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mony,
- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant M.B..., et de MeA..., représentant la chambre de métiers et de l'artisanat de la Vendée.
1. Considérant que M. B...a été recruté par contrat le 1er septembre 1998 par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Vendée, pour assurer des fonctions d'enseignant dans un centre de formation d'apprentis, pour une période s'étendant jusqu'au 31 août 2000 ; que ce premier contrat a été renouvelé le 17 juillet 2000 pour une période de cinq ans s'achevant le 31 août 2005 ; que la chambre de métiers a informé le 21 juillet 2005 M. B...de ce que son contrat ne serait pas renouvelé à son échéance ; que M. B...a alors contesté la légalité de cette décision ; que l'annulation de cette décision par le tribunal administratif de Nantes a été confirmée par la Cour par un arrêt devenu définitif en date du 2 mars 2012 ; que M. B...a demandé à la chambre de métiers d'exécuter cette décision le 25 avril 2012, sollicitant notamment une indemnisation, à hauteur de 123 500 euros, du préjudice résultant selon lui de cette décision illégale ; que, suite au silence gardé par la chambre de métiers sur cette demande, M. B...a alors formé le 20 juillet 2012 un recours indemnitaire ; que, par un jugement en date du 4 novembre 2014 rendu sous le n° 1207114, le tribunal administratif de Nantes n'a que partiellement fait droit à la demande de M.B..., lui accordant 1 000 euros au titre de son préjudice moral ; que l'intéressé relève appel de cette décision en tant qu'elle n'a pas intégralement fait droit à sa demande ;
Sur l'exception de chose jugée opposée par la chambre de métiers :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B...n'a aucunement, que ce soit à l'occasion de ses conclusions présentées au soutien de l'appel formé par la chambre de métiers contre le jugement du tribunal administratif annulant la décision de non renouvellement de l'engagement de l'intéressé, ou lorsqu'il a saisi la Cour, le 26 juin 2012, d'un recours en exécution de son arrêt du 2 mars 2012, assorti son recours de prétentions indemnitaires ; que, comme précédemment indiqué, de telles conclusions n'ont été formées que le 25 avril 2012 lors de la présentation par M. B...d'une demande préalable destinée à lier le contentieux ; que, par suite, la chambre de métiers n'est pas fondée à opposer à M. B...l'autorité de la chose jugée, la seule décision juridictionnelle ayant trait à des conclusions indemnitaires étant celle dont M. B...relève appel dans la présente instance ;
Sur les conclusions en indemnisation :
3. Considérant que le caractère irrégulier et par suite fautif de la décision du 21 juillet 2005 par laquelle le président de la chambre de métiers de la Vendée a refusé le renouvellement du contrat de M. B...résulte de l'arrêt du 2 mars 2012 de la cour administrative d'appel de Nantes, lequel a acquis un caractère définitif ; que cette illégalité est susceptible d'engager la responsabilité de la chambre de métiers à concurrence des préjudices directs et certains que cette décision a causés à M.B... ;
En ce qui concerne la période postérieure au 31 août 2010 :
4. Considérant que si, du fait d'une annulation contentieuse devenue définitive d'une décision portant non renouvellement d'un engagement à durée déterminée parvenu à son terme, un employeur public doit être regardé comme étant nécessairement saisi d'une demande de renouvellement de cet engagement, il n'est nullement tenu d'y faire droit, même si cet engagement était susceptible d'être reconduit ; que ce renouvellement ne peut au surplus intervenir que pour une durée égale à celle de l'engagement précédent ; que, en cas de refus d'un tel renouvellement, l'employeur s'expose uniquement au risque de devoir indemniser son agent du préjudice susceptible d'avoir été causé à ce dernier du fait des conséquences, notamment financières, de ce refus de renouvellement ; que ce préjudice ne saurait toutefois s'étendre au-delà du terme du contrat qui pouvait être renouvelé ; qu'ainsi M. B...n'est pas fondé à solliciter l'indemnisation d'un préjudice au titre de la période postérieure au 31 août 2010 ;
En ce qui concerne la période du 1er septembre 2005 au 31 août 2010 :
5. Considérant qu'en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre ; que sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité ; que pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser les frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions ; qu'enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction ;
6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M. B...aurait perçu, s'il était demeuré en fonctions au CFA pendant la période de soixante mois comprise entre le 1er septembre 2005 et le 31 août 2010, un total de 97 500 euros ; qu'il résulte des avis d'imposition produits par M. B...que ce dernier a perçu au cours des années civiles 2006 à 2009 des revenus s'établissant au total à 69 161 euros pour ces quatre années ; que les revenus perçus par M. B...au titre de la période allant du 1er septembre au 31 décembre 2005 peuvent être déduits des revenus déclarés par lui au titre de l'année 2005, soit 22 915 euros, desquels doivent être soustraits les salaires versés par la chambre de métiers de janvier à août 2005, soit 12 000 euros, et se montent ainsi à 10 915 euros ; que les revenus perçus par M. B...au titre de la période allant du 1er janvier au 31 août 2010 peuvent être estimés sur ces 8 mois selon un prorata calculé par rapport au total des revenus déclarés par M. B...sur l'ensemble de l'année civile, soit 27 719 euros et s'établissent ainsi à 18 479 euros ; qu'ainsi les revenus que M. B...a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction s'établissent à la somme de 93 128 euros, la responsabilité de la chambre de métiers étant susceptible d'être engagée à concurrence de la différence entre cette somme et le montant de 97 500 euros que M. B...aurait perçue s'il était resté en fonctions, soit 4 372 euros ; qu'il n'y a toutefois pas lieu de prononcer une quelconque condamnation à ce titre dès lors qu'il faut déduire de ce droit à réparation la somme de 5 427 euros que le requérant a perçue dès le mois d'octobre 2005 à titre d'indemnité de fin de contrat ;
7. Considérant, d'autre part, que les frais consécutifs à la formation professionnelle suivie par M. B...dans la perspective de créer sa propre entreprise artisanale, de même que les capitaux qu'il a engagés à perte dans le montage d'une autre société, laquelle a ensuite été placée en liquidation judiciaire, ne présentent aucun lien de causalité directe avec la faute résultant du caractère illégal de l'absence de renouvellement de l'engagement de M.B... ;
8. Considérant, enfin, que le tribunal administratif a procédé à une juste appréciation du préjudice moral subi par M. B...en lui accordant une somme de 1 000 euros pour ce chef de préjudice ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a limité à 1 000 euros l'indemnisation du préjudice résultant de l'illégalité de la décision du 21 juillet 2005 de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Vendée ;
Sur les conclusions en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la chambre de métiers de la Vendée, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande M. B...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...le versement à la chambre de métiers et de l'artisanat de la Vendée d'une somme au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Vendée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et à la chambre de métiers et de l'artisanat de la Vendée. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Région des pays de la Loire.
Délibéré après l'audience du 2 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président,
- M. Mony, premier conseiller,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 décembre 2016.
Le rapporteur,
A. MONYLe président,
J. FRANCFORT
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°14NT03342