Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 juin 2017 et 21 juillet 2018, M. E..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 30 mars 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 21 octobre 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'a pas été mis à même de prendre connaissance des éléments produits par son employeur à l'appui de sa demande de licenciement du 27 août 2015, ni d'ailleurs au cours de l'entretien du 19 octobre 2015 ;
- son employeur n'a pas sérieusement recherché de poste de reclassement ;
- la décision contestée est en rapport avec son mandat de délégué du personnel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2017, la société Evrecy Ambulances Secours, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2018, la ministre du travail conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... a été recruté en 2001 en qualité de chauffeur ambulancier au sein de la société Evrecy Ambulances Secours. Il relève appel du jugement du 30 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 octobre 2015 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement pour inaptitude physique.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur a, conformément aux dispositions citées ci-dessus de l'article L. 1226-2 du code du travail, cherché à reclasser le salarié sur d'autres postes appropriés à ses capacités, le cas échéant par la mise en oeuvre, dans l'entreprise, de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l'employeur n'a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, menée tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 2421-11 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat (...) ". Si le caractère contradictoire de l'enquête administrative implique de mettre à même le salarié de prendre connaissance, en temps utile, de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande d'autorisation de licenciement ainsi que des éléments déterminants qui ont pu être recueillis par l'inspecteur du travail au cours de l'instruction de cette demande, il n'impose pas à l'administration de lui communiquer, de sa propre initiative ou dans tous les cas, l'ensemble de ces pièces et éléments.
4. M. E...a été convoqué le 31 août 2015 par l'inspecteur du travail en vue d'une enquête contradictoire avec son employeur qui devait se tenir le 21 septembre 2015. Ce courrier indique expressément que la demande d'autorisation de licenciement figure en copie. Si l'enquête a été reportée au 28 septembre 2015 en raison de l'indisponibilité de son employeur, M. E...a eu la possibilité soit de consulter l'ensemble des pièces de son dossier, et notamment la demande d'autorisation de licenciement présentée par la société le 27 août 2015, soit d'en demander une copie. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait usé de cette faculté à cette occasion, ni même lorsqu'il a été reçu le 19 octobre 2015 dans les bureaux de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi lors d'un second entretien. Le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que le caractère contradictoire de l'enquête n'aurait pas été respecté.
5. En deuxième lieu, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur a, conformément aux dispositions citées ci-dessus de l'article L. 1226-2 du code du travail, cherché à reclasser le salarié sur d'autres postes appropriés à ses capacités, le cas échéant par la mise en oeuvre, dans l'entreprise, de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l'employeur n'a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, menée tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.
6. Il ressort des pièces du dossier que du 15 au 20 juin 2015 la société Evrecy Ambulances Secours a recherché les postes disponibles en interne susceptibles d'être proposés à M. E...dans le cadre d'un reclassement. Cette recherche est toutefois restée vaine en raison des recommandations du médecin du travail. Dans son avis du 28 mai 2015, ce dernier a en effet estimé que M. E...était définitivement inapte au poste d'ambulancier au sein de son entreprise, en ajoutant " pas de proposition de poste ou de tâches dans l'entreprise ". Le 16 juin 2015, la société a interrogé les autres membres du groupement d'entreprise d'ambulances auquel elle appartient ainsi que la chambre nationale des services d'ambulance pour savoir si elles disposaient de postes correspondant au profil de l'intéressé. Le 10 juillet 2015, M. E...a refusé le poste d'ambulancier en contrat de travail à durée déterminée au sein de la Sarl Normandy Ambulances qui lui a été proposé le 3 juillet 2015. Le 15 juillet 2015, la société Evrecy Ambulances Secours a précisé ses recherches en indiquant que l'intéressé avait été amené à accomplir des tâches complémentaires de régulation en 2006 et de chef d'exploitation à compter du 1er février 2012. Aucune nouvelle proposition ne lui a été adressée. Compte tenu de l'ensemble de ces démarches, M. E...n'est pas fondé à soutenir que les recherches de reclassement de son employeur n'auraient pas été suffisantes.
7. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. E...a été élu délégué du personnel titulaire pour la première fois le 8 avril 2008 et que son mandat a été renouvelé le 23 octobre 2013. Si le requérant fait état d'un entretien qui se serait déroulé le 1er octobre 2013 au cours duquel Mme A...aurait cherché à le dissuader de se représenter à ces fonctions, la société affirme n'avoir eu connaissance de sa candidature à ces élections que le 16 octobre 2013, après le premier arrêt de travail de l'intéressé. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le licenciement de M. E...pour inaptitude physique présenterait un lien avec son mandat de représentant du personnel.
8. Il résulte de ce qui précède, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. E... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. E... le versement à la société Evrecy Ambulances Secours de la somme qu'elle demande au titre des mêmes frais.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Evrecy Ambulances Secours tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à la ministre du travail et à la société Evrecy Ambulances Secours.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 novembre 2018.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT01728