Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 août 2021, M. A... B..., représenté par Me Philippon, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces arrêtés ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer un récépissé dans le délai de quarante-huit heures à compter de la notification du présent arrêt ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quarante-huit heures, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en l'absence, sur la minute, des signatures prévues par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été répondu au moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 111-7 et L. 111-8, en son 1°, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'était pas inopérant ;
- le jugement a été rendu à l'issue d'une audience irrégulière dès lors que l'interprète désignée pour l'assister, retenue au tribunal judiciaire, n'a pu exercer sa mission, en méconnaissance des articles L. 742-3 et L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le jugement est irrégulier en l'absence de compétence du magistrat désigné, dès lors que seul le président du tribunal administratif est, en vertu de l'alinéa 2 du II de l'article L. 742-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des alinéas 2 et 3 du III de l'article L. 512-1 du même code, compétent pour statuer sur le litige ; il revient au président du tribunal administratif de Nantes de communiquer la décision par laquelle il a autorisé le magistrat désigné signataire du jugement à statuer à sa place sur les litiges relatifs aux décisions de transfert ;
- sa situation personnelle n'a pas été examinée ;
- le préfet de Maine-et-Loire a commis une erreur manifestation en refusant de faire application de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 compte tenu de la détérioration des conditions d'accueil en Italie et de sa situation personnelle et familiale, dès lors que son neveu, qui bénéficie de la qualité de réfugié sur le territoire français, est prêt à l'aider dans ses démarches pour obtenir une protection internationale en France ;
- l'arrêté portant assignation à résidence est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du I de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le premier juge ne pouvait sans se contredire relever que l'autorité préfectorale n'était pas en mesure de procéder à l'éloignement effectif avant l'écoulement d'un délai de deux mois et estimer que la mesure d'assignation à résidence conservait son caractère d'utilité et de proportionnalité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2021, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il justifie du transfert de M. A... B... en Italie et soutient que les moyens soulevés par l'intéressé ne sont pas fondés.
M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 août 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. se disant A... B..., ressortissant soudanais né le 1er janvier 1991, est entré en France le 15 décembre 2020 selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été enregistrée le 12 janvier 2021 par les services de la préfecture de la Loire-Atlantique. La consultation du système Eurodac a révélé que ses empreintes avaient été enregistrées en Italie le 6 novembre 2020. Consécutivement à leur saisine le 14 janvier 2021, les autorités italiennes ont implicitement accepté le 16 mars 2021 de prendre en charge l'intéressé. Par deux arrêtés du 19 mars 2021, le préfet de Maine-et-Loire a ordonné le transfert de M. A... B... aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. L'intéressé a sollicité auprès du tribunal administratif de Nantes l'annulation de ces deux arrêtés. Il relève appel du jugement du 15 avril 2021 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " I. - L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine. / Aucun autre recours ne peut être introduit contre la décision de transfert. / L'étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné par lui le concours d'un interprète. (...) II.- (...) Lorsqu'une décision d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision d'assignation à résidence. Le président du tribunal administratif statue dans un délai de quatre-vingt-seize heures à compter de l'expiration du délai de recours, dans les conditions prévues au III de l'article L. 512-1. (...) ". Aux termes du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'étranger faisant l'objet d'une décision d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 peut, dans le même délai, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision. Les décisions mentionnées au premier alinéa du présent III peuvent être contestées dans le même recours lorsqu'elles sont notifiées avec la décision d'assignation./ Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue au plus tard quatre-vingt-seize heures à compter de l'expiration du délai de recours (...) ". Il résulte de ces dispositions combinées que le président du tribunal ou le magistrat désigné à cette fin est bien compétent pour statuer sur la demande d'annulation des décisions de transfert et d'assignation à résidence. Par ailleurs, la mention du jugement attaqué, qui vise la décision du président du tribunal désignant Mme Wunderlich, vice-président, pour statuer sur les litiges visés au III de l'article L. 512-1 et à l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est suffisante en l'espèce pour établir la compétence du signataire du jugement attaqué pour statuer sur les litiges visés par l'article L. 742-4 de ce code, renvoyant expressément aux conditions prévues au III de l'article L. 512-1 du même code.
3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le requérant avait demandé le concours d'un interprète en arabe soudanais lors de l'audience et que le magistrat désigné a fait droit à cette demande en procédant le 25 mars 2021 à la désignation d'une interprète pour l'audience du 26 mars 2021. Il ressort toutefois des mentions portées sur le jugement attaqué que M. A... B... n'a pas été assisté par cette interprète, retenue au tribunal judiciaire, mais par une étudiante qui, en l'absence de cette dernière, a procédé à la traduction. Si le requérant soutient que le fait que l'interprète désignée n'a pu exercer sa mission entache le jugement d'irrégularité, il ne conteste pas le motif d'empêchement de l'interprète désigné et ne soutient, alors qu'il était assisté lors de l'audience du 26 mars 2021 de son conseil, avoir sollicité, pour ce motif, un report d'audience, qui lui aurait été refusé. Dans ces conditions, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité pour ce motif.
4. En troisième lieu, la minute du jugement contesté a été signée par le magistrat désigné et le greffier d'audience, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré d'une irrégularité du jugement attaqué, pour ce motif, doit être écarté.
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 111-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsqu'un étranger fait l'objet d'une mesure (...) de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'il ne parle pas le français, il indique au début de la procédure une langue qu'il comprend. Il indique également s'il sait lire. Ces informations sont mentionnées sur la décision de non-admission, de maintien, de placement ou de transfert ou dans le procès-verbal prévu au quatorzième alinéa du I de l'article L. 611-1-1. Ces mentions font foi sauf preuve contraire. La langue que l'étranger a déclaré comprendre est utilisée jusqu'à la fin de la procédure. Si l'étranger refuse d'indiquer une langue qu'il comprend, la langue utilisée est le français. ". M. A... B... a invoqué, dans ses écritures introductives d'instance devant le tribunal administratif de Nantes, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que l'information selon laquelle il saurait lire l'arabe soudanais ne figure pas dans la décision de transfert. Il soutient que le jugement est irrégulier faute d'avoir répondu à ce moyen. Toutefois, si la mention de la capacité de M. A... B... à lire les informations écrites revêt un intérêt pour apprécier des conditions dans lesquelles il a bénéficié ou non des garanties attachées à sa qualité de demandeur d'asile, l'absence de cette mention alors qu'il sait lire n'est pas, en elle-même, susceptible d'entacher d'illégalité la décision de transfert. Par suite, le premier juge, qui a analysé ce moyen dans les visas, pouvait implicitement l'écarter comme inopérant et n'a pas entaché sa décision d'irrégularité en s'abstenant d'y répondre.
Sur l'arrêté de transfert aux autorités italiennes :
6. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A... B....
7. D'autre part, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 n'est assorti d'aucune précision nouvelle en droit ou en fait en appel. Il doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
Sur l'arrêté portant assignation à résidence :
8. Il est constant que le requérant faisait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la date de la décision d'assignation à résidence en litige. La circonstance que cette décision serait dépourvue de toute utilité dès lors que l'administration n'organise aucun transfert les deux premiers mois est sans incidence sur sa légalité.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. se disant A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 février 2022.
La rapporteure, Le président,
V. GELARD O. GASPON
La greffière,
P. CHAVEROUX
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21NT023832
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