Par une requête enregistrée le 19 février 2018, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 16 novembre 2017 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 14 novembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de réexaminer sa demande d'asile dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de la violation du principe de l'unité familiale ;
- le préfet a méconnu les stipulations des articles 3 et 17 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013 dès lors que sa tante vit régulièrement en France et que par ailleurs, les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Italie ne sont pas conformes aux exigences de la convention de Genève ;
- la décision l'assignant à résidence est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant transfert en Italie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2018, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er février 2018.
Vu les autres pièces du dossier et notamment celles produites par le préfet d'Ille-et-Vilaine le 27 juillet 2018 attestant que l'intéressé a pris la fuite.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen, relève appel du jugement du 16 novembre 2017 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 novembre 2017 par lequel le préfet du Calvados a décidé sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que de l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que le magistrat désigné du tribunal administratif de Caen a répondu au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 du règlement 343/2003 du conseil du 18 février 2003 en indiquant que ce règlement avait été abrogé par l'article 48 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et que ce moyen était inopérant. M. A...n'est par suite pas fondé à soutenir que le tribunal administratif aurait omis de statuer sur le moyen tiré de la violation du principe de l'unité familiale et de la présence en France de sa tante.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne l'arrêté de remise aux autorités italiennes :
3. Aux termes du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ".
4. M.A..., qui est né le 23 mai 1993 en Guinée, se borne à soutenir, d'une part, que sa tante séjourne régulièrement en France et, d'autre part, qu'il a fui son pays en raison de son appartenance à l'UFDG, parti d'opposition au pouvoir en place. Par ailleurs, si l'intéressé fait état de la situation exceptionnelle dans laquelle se trouve l'Italie confrontée à un afflux sans précédent de réfugiés, il ne ressort pas des pièces produites que cette circonstance exposerait sa demande d'asile à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Il n'est pas davantage démontré qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, doivent être écartés les moyens tirés de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des stipulations des articles 3 et 17 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013.
En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
5. Il résulte du point 4 du présent arrêt que M. A...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de l'arrêté ordonnant sa remise aux autorités italiennes. Le moyen tiré de ce que la décision l'assignant à résidence serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de cette décision ne peut dès lors qu'être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Sur le surplus des conclusions :
7. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. A...et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions principales.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 25 janvier 2019 à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 février 2019.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00720