Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 septembre 2017 et le 29 mars 2018, Brest métropole, représentée par Me C...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 6 juillet 2017 ;
2°) de rejeter la demande de M. A...présentée devant le tribunal administratif de Rennes ;
3°) de mettre à la charge de M. A...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a apprécié de manière erronée les faits et pièces qui lui étaient soumis ;
- en estimant que Brest métropole ne pouvait contester les éléments médicaux fournis par le requérant que par la production d'éléments médicaux contraires, le tribunal s'est mépris sur son office ;
- la décision du 1er septembre 2015 a été prise par une autorité compétente ;
- aucun des quatre griefs dirigés contre les modalités selon lesquelles l'avis de la commission de réforme a été recueilli ne peut être retenu ;
- la décision est suffisamment motivée ;
- il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de désignation d'un expert chargé d'examiner l'intéressé ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2017, M.A..., représenté par Me Buors, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Brest métropole la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par Brest métropole ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons ;
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public ;
- les observations de Me C...B...pour Brest métropole et de Me Buors, avocat de M. A...;
1. M.A..., agent titulaire de la fonction publique territoriale, exerçant les fonctions de médecin de prévention au sein de Brest métropole, a été placé en congé de longue durée à partir du 22 août 2011 en raison d'un syndrome anxio-dépressif. Il a repris ses fonctions le 1er octobre 2014 à temps partiel thérapeutique, puis a été placé, du 28 janvier au 5 février 2015, en congé de maladie ordinaire pour la même cause. Par un courrier du 9 mars 2015, l'intéressé a demandé à Brest métropole que sa maladie soit reconnue comme imputable au service. Réunie le 16 juillet 2015, la commission de réforme a émis un avis partagé sur cette question. Suite à cet avis, par une décision du 1er septembre 2015, le vice-président délégué aux ressources humaines de Brest métropole a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de M.A.... Par sa présente requête, Brest métropole relève appel du jugement du 6 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 1er septembre 2015 du vice-président délégué aux ressources humaines de Brest métropole.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Au nombre des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite figurent notamment les maladies contractées ou aggravées en service.
3. Pour rejeter la demande de M. A...tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie, le vice-président délégué aux ressources humaines de Brest métropole a estimé que M. A...n'ayant pas saisi ses services, ni transmis de document exposant les difficultés rencontrées dans le cadre de son activité professionnelle, la collectivité n'avait pas eu connaissance des facteurs de risques qui auraient pu causer cette maladie et que, dans ces conditions, il était impossible d'affirmer que cette pathologie était imputable au service. Elle a également estimé qu'au vu des éléments produits par l'intéressé, le lien de causalité entre sa maladie et ses fonctions n'était pas avéré.
4. Toutefois, comme l'a relevé à juste titre le tribunal, il ressort des pièces du dossier que le docteur Ruet-Le Nen, psychiatre, qui a examiné M. A...le 11 mai 2015 à la demande de Brest métropole, a conclu qu'il existait un lien de causalité entre le syndrome anxio-dépressif sévère présenté par le requérant et son poste de médecin de prévention. Cet avis est corroboré par celui du docteur Le Guillou, qui a examiné M. A...le 1er juillet 2015 au centre de gestion de la fonction publique territoriale du Finistère, et a estimé, après avoir relevé l'absence de facteurs personnels autres susceptibles d'être à l'origine de cette pathologie, qu'il existait " un lien très fort entre l'apparition de cette pathologie et l'évolution des conditions d'exercice de cette profession au sein de la collectivité ". De même, le docteur Derrien, médecin traitant de M.A..., a indiqué le 7 mars 2015 qu'il semblait que le contexte professionnel participait à l'état du patient, justifiant une reconnaissance de maladie professionnelle. Au surplus, les expertises médicales réalisées en décembre 2013 par le docteur Charlec, psychiatre, et en juillet 2012 par le docteur Rannou, psychiatre, évoquent toutes deux un lien entre l'état dépressif présenté par M. A... et le sentiment d'une dégradation de ses conditions de travail. Enfin, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que le service de médecine du travail dans lequel a été affecté M. A... a connu une rotation importante des effectifs du fait de plusieurs départs et démissions de médecins, que la situation difficile de ce service a donné lieu à plusieurs interventions syndicales, notamment en 2011 et en 2012 auprès de la collectivité, et que M. A...a évoqué les difficultés auxquelles il était personnellement confronté auprès du comité médical départemental par courrier du 2 novembre 2011. Si Brest métropole conteste ces avis, en indiquant qu'ils ne permettent pas d'identifier concrètement la nature des difficultés professionnelles de l'intéressé, cette argumentation qui ne repose que sur des affirmations, n'est pas de nature à remettre en cause les conclusions concordantes des praticiens cités, tendant à la reconnaissance d'un lien de causalité directe entre la pathologie contractée par M. A...et le service. En relevant que Brest métropole n'établissait pas, par la production d'éléments médicaux contraires, la preuve du lien direct et certain entre la pathologie anxio-dépressive développée par M. A...et ses conditions de travail, les premiers juges se sont bornés à apprécier les pièces qui leur étaient soumises, sans conditionner cette appréciation à la production d'éléments médicaux contraires. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la pathologie de l'intéressé résulterait d'une cause étrangère au service, cette pathologie doit donc, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme imputable au service.
5. Il résulte de ce qui précède que Brest métropole n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 1er septembre 2015 par laquelle le vice-président délégué aux ressources humaines de Brest métropole a rejeté la demande de M. A...tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Brest métropole le versement à M. A...de la somme de 1 500 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Brest métropole est rejetée.
Article 2 : Brest métropole versera à M. A...la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Brest métropole et à M. D...A....
Délibéré après l'audience du 30 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 décembre 2018.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
E. HAUBOIS La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT02755