Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 juin 2018 et 4 septembre 2019,
M. F..., représenté par Me B... puis Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement 1605207 du 18 avril 2018 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 6 176,16 euros émis à son encontre le 30 juillet 2016 par le président de Roi Morvan Communauté ainsi que la décision du 30 septembre 2016 portant rejet du recours gracieux formé contre ce titre ;
3°) de mettre à la charge de Roi Morvan Communauté la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le titre exécutoire litigieux émis le 30 juin 2016 qui se borne à mentionner un indu de 6 176, 16 euros n'indique pas clairement les bases de liquidation de la créance, ni les éléments de calcul sur lesquels il se fonde ; il ne satisfait pas ainsi aux conditions de forme posées par la jurisprudence ;
- la créance est mal fondée ; les premiers juges ont commis une erreur de droit en estimant que la position de disponibilité d'office dans laquelle il était placée jusqu'au 30 mai 2014 suffisait à faire obstacle à ce que Roi Morvan Communauté soit tenue de lui verser un demi traitement dans l'attente de l'avis du comité médical invité à émettre un avis sur sa situation ; il résulte, en effet, des dispositions des articles 17 et 37 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 que le fonctionnaire se trouvant dans l'attente d'une décision nécessitant soit l'avis du comité médical, soit celui de la commission de réforme, a droit au maintien d'un demi-traitement jusqu'à l'intervention d'une décision ; il se trouvait dans cette situation de juin 2014 à février 2015 puisqu'il était parvenu à l'expiration de ses droits à congé de maladie, et qu'il se trouvait dans l'attente d'un avis de la commission de réforme sur son placement en disponibilité d'office et d'un avis du comité médical sur sa réintégration, et devait donc bénéficier du versement d'un demi-traitement ; c'est également ce que rappelle une circulaire du 5 décembre 2011 ; Roi Morvan Communauté n'est donc pas fondé à solliciter le remboursement des sommes perçues pendant cette période, aucune disposition n'excluant le bénéfice de ces dispositions au fonctionnaire placé en disponibilité d'office ; sa réintégration rétroactive ne peut justifier un remboursement.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 juillet 2018, l'établissement public de coopération intercommunale Roi Morvan Communauté, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. F... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens invoqués par M. F... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant M. F..., et Me D..., représentant Roi Morvan Communauté.
Considérant ce qui suit :
1. M. F..., fonctionnaire titulaire du grade d'adjoint technique territorial de 1ère classe, affecté depuis le 1er avril 2004 au poste de conducteur spécialisé auprès du service des déchets ménager de l'établissement public de coopération intercommunale Roi Morvan Communauté a, par un arrêté du 30 mars 2012, été, après épuisement de ses droits à congé de maladie, placé en disponibilité d'office du 31 mai 2011 au 31 mai 2012 pour raison de santé. Cette position de disponibilité a d'abord été prolongée à titre provisoire par un arrêté du 4 mars 2014 avant de l'être de façon définitive par un premier arrêté du 20 mars 2015 puis par un second arrêté du 9 juin 2016 couvrant la période du 31 mai 2013 au 30 mai 2014. La légalité de ces arrêtés, qui avaient été contestés par M. F... devant la juridiction administrative, a été confirmée par un arrêt de la cour du 1er octobre 2018. Durant toute sa période de placement en disponibilité, soit du mois de juin 2014 jusqu'au mois de février 2015 inclus, cet agent a continué de percevoir un demi traitement. Par un titre de recettes émis le 30 juillet 2016, l'EPCI Roi Morvan Communauté a rendu l'intéressé débiteur à son encontre d'une somme de 6176, 16 euros correspontant aux sommes indument versées durant cette période.
2. Après rejet le 30 septembre 2016 de son recours gracieux formé le 26 août 2016, M. F... a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation du titre de recettes mentionné au point 1 ainsi que de la décision du 30 septembre 2016 portant rejet du recours gracieux formé contre ce titre. Il relève appel du jugement du 18 avril 2018 par lequel cette juridiction a rejeté sa demande.
Sur la régularité du titre de recettes attaqué :
3. Aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Les dispositions du titre Ier du présent décret sont applicables aux administrations publiques (...) mentionnées aux 1° à 5° suivants (...) 2° Les collectivités territoriales, leurs établissements publics (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 24 de ce décret : " Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance, soit par référence à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge des redevables.
4. En l'espèce, le titre de recettes litigieux émis le 30 juin 2016 porte pour mention " rémunération indûment versée - trop perçu de juin 2014 à février 2015- cf. courrier joint au présent titre établissant les bases de liquidation ". Roi Morvan Communauté produit le courrier joint auquel fait référence ce titre, qui précise que le solde de la somme dont le remboursement est demandé à M. F... correspond au versement chaque mois, de juin 2014 à février 2015, d'une somme mensuelle de 686,24 euros correspondant au demi-traitement du requérant. Sur la base de ces indications claires portées à la connaissance de l'intéressé dans le document joint au titre de recettes exécutoire, il était aisé pour M. F..., alors que le montant du demi-traitement versé indument pour chacun des 9 mois concernés était identique, par une simple addition, de vérifier le cas échéant l'exactitude du montant réclamé. Ainsi, le moyen, tiré de ce que le titre exécutoire n'indiquerait pas clairement les bases de liquidation de la créance ni les éléments de calcul de la somme réclamée, doit être écarté.
Sur le bien-fondé du titre de recettes attaqué :
5. D'une part, l'article 72 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dispose que : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite ". Aux termes de l'article 17 du décret susvisé du 30 juillet 1987, dans sa rédaction résultant de l'article 2 du décret n° 2011-1245 du 5 octobre 2011, décret pris pour l'application de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. / Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. / Le fonctionnaire qui, à l'expiration de son congé de maladie, refuse sans motif valable lié à son état de santé le poste qui lui est assigné peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ". Aux termes de l'article 37 de ce même décret : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, en application du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 susvisé, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. / Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l'avis du comité médical, soit l'avis de la commission de réforme, soit l'avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu'à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. ".
6. D'autre part, le deuxième alinéa de l'article 19 du décret susvisé du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux dispose que " La durée de la disponibilité prononcée en vertu du premier alinéa du présent article ne peut excéder une année. Elle peut être renouvelée deux fois pour une durée égale (...) ".
7. Il résulte des dispositions précitées de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 qu'un fonctionnaire en disponibilité perd, en principe, tout droit à rémunération par son administration d'origine. Il résulte par ailleurs des dispositions précitées de l'avant-dernier alinéa de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987, prévoyant la possibilité de maintenir le versement d'un demi-traitement au fonctionnaire ayant épuisé des droits à congés, que cette possibilité ne trouve à s'appliquer qu'aux agents qui, immédiatement après l'expiration de la dernière période de congé de maladie ordinaire dont ils pouvaient bénéficier, ne sont placés dans aucune position statutaire ou sont provisoirement placés en position de disponibilité d'office, dans l'attente d'un avis, selon leur situation, soit du comité médical, soit de la commission de réforme, soit de ces deux instances. De même, les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article 37 du décret du 30 juillet 1987 ne sont applicables qu'aux agents ne pouvant reprendre leur service après l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de congé de longue durée dont ils pouvaient bénéficier, et sont placés dans une situation provisoire dans l'attente d'un avis, soit du comité médical, soit de la commission de réforme, soit de ces deux instances. En revanche, ces dispositions n'ont pas pour effet de prévoir le versement d'un demi-traitement à un fonctionnaire précédemment placé en position de disponibilité d'office pour raisons de santé, et dont la disponibilité a atteint la durée maximale de trois ans, fût-il dans l'attente d'une décision de réintégration ou d'une autre décision destinée à le placer en situation statutaire régulière.
8. En l'espèce, il résulte de l'instruction que M. F... a été placé en congé de maladie ordinaire à compter du 31 mai 2010. Ayant épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire, il a ensuite, comme il a été rappelé au point 1, été placé en disponibilité d'office pour raison de santé pour une durée d'un an à compter du 31 mai 2011, par un arrêté du 30 mars 2012, devenu définitif, du président de Roi Morvan Communauté. La disponibilité d'office de M. F... a été prolongée du 31 mai 2012 au 30 mai 2013 par l'arrêté du 20 mars 2015, puis du 31 mai 2013 au 30 mai 2014 par l'arrêté du 9 juin 2016. Si la communauté de communes a maintenu à M. F... le versement d'un demi-traitement jusqu'au mois de mars 2015, il résulte de ce qui a été rappelé au point précédent que M. F... ne justifiait d'aucun droit à la perception d'un tel avantage. Ainsi, l'établissement de coopération intercommunale Roi Morvan Communauté était fondé à lui demander, par l'émission du titre de recettes litigieux, le remboursement des sommes versées entre le mois de juin 2014 et le mois de février 2015. Par suite, c'est par une exacte application des dispositions précitées des articles 17 et 37 du décret du 30 juillet 1987 que Roi Morvan Communauté l'a rendu redevable de la créance qu'il conteste.
9. Il résulte de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Roi Morvan Communauté, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que M. F... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. F... le versement à Roi Morvan Communauté d'une somme de 1 000 euros au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : M. F... versera à Roi Morvan Communauté la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F... et à Roi Morvan Communauté.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2019, où siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. C..., président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 décembre 2019.
Le rapporteur
O. C... Le président
H. Lenoir
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
18NT02389 2